Hôpital à Gaza : la vérité aveuglée par la colère ?

par Sylvain Rakotoarison
jeudi 19 octobre 2023

« Si l'on veut donner une définition de ce que je nomme le palestinisme, on pourrait écrire que c'est le fait d'épouser aveuglément le narratif palestinien sans esprit critique aucun. Avant d'expliquer que ce palestinisme n'est qu'un avatar de l'islamo-gauchisme, je tiens à dire qu'on peut parfaitement être sensible à la cause arabo-palestinienne sans être palestiniste. » (Gilles-William Goldnadel, "Le Figaro" du 17 mai 2021).

J'aurais pu aussi titrer : la vérité s'efface derrière la colère. En revanche, s'il s'agit bien de vérité, il ne s'agit pas de raison (qui s'oppose généralement à l'émotion) : en effet, la destruction d'un hôpital n'a absolument rien de ...raisonnable. En revanche, rechercher la cause de cette destruction doit se faire hors de toute passion, rationnellement. Comme s'il fallait faire la guerre à une surenchère compassionnelle.

Soyons clairs : tout ce qui arrive depuis le 7 octobre 2023 à la population civile de Gaza est de la responsabilité du Hamas. Le massacre commis par cette organisation terroriste qui a coûté la vie à plus de 1 200 personnes en Israël a très logiquement eu pour conséquence une réaction de l'armée israélienne pour assurer la sécurité de ses habitants dans l'objectif d'éliminer les forces terroristes. Cette réaction, hélas, a déjà coûté la vie à au moins 3 000 personnes à Gaza, principalement des civils, et on compterait entre 800 et 1 000 enfants qui y ont péri. Ce bilan désastreux et encore hélas provisoire est aussi condamnable que l'horreur du 7 octobre 2023.

La riposte israélienne ne doit pas être une vengeance mais une opération pour combattre le terrorisme. Ce sont les alliés d'Israël qui ont exprimé le plus inconditionnellement leur soutien et leur solidarité à Israël qui sont les mieux placés pour convaincre Israël d'épargner le plus possible la population civile à Gaza. Les valeurs humanistes sont universelles et s'imposent à tous : la valeur de la vie est la même en Israël et à Gaza.

L'explosion d'un hôpital (l'Ahli-Arab Hospital) à Gaza dans la soirée du mardi 17 octobre 2023 a servi de catalyseur aux peuples arabes pour manifester contre la politique d'Israël. Même dans des pays qui commençaient à nouer des relations diplomatiques avec Israël, comme le Maroc, les manifestants étaient nombreux pour soutenir le peuple palestinien et condamner Israël. Du côté du Hamas, on a communiqué sur le nombre de victimes, d'abord 200, puis jusqu'à près de 500, et pourtant, d'autres observateurs évoqueraient plutôt quelques dizaines, ce qui reste, surtout dans un hôpital, un scandale : dans les hôpitaux à Gaza, il y a non seulement des patients et le personnel soignant et administratif, mais aussi des réfugiés, des familles, qui sont venus faute d'avoir de quoi se loger après la destruction de leur habitation. Le Hamas a très vite accusé l'armée israélienne d'avoir bombardé cet hôpital, ce qui a déclenché ces nouvelles manifestations dans les pays arabes contre Israël mais aussi contre ses alliés, notamment les États-Unis et la France.

Pourtant, le lendemain, on s'aperçoit qu'il n'en est rien. Certes, les dénégations d'Israël sont de bonne guerre et à peine plus crédibles que les affirmations du camp palestinien, chaque belligérant rejetant sur l'autre les conséquences tragiques de "leur" guerre. Mais dans ce cas précis, qui n'exonère pas la responsabilité morale d'Israël des autres tragédies provoquées par sa riposte, on peut douter très sérieusement de la responsabilité de l'armée israélienne, d'autant plus que l'hôpital en question est un établissement chrétien.

L'origine israélienne de l'explosion de cet hôpital est remise en cause, en effet, par des images diffusées en direct par la chaîne qatarie Al-Jazeera, qu'on ne peut soupçonner d'une partialité pro-israélienne. Dans ces images, on voit une roquette qui a explosé en plein vol au-dessus de l'hôpital et dont les éclats sont retombés sur l'hôpital (essentiellement le parking) avant le départ d'un feu.

Cette version est renforcée par le bruit de la roquette (qui n'a rien à voir avec les bombes israélienne) et aussi l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre un membre du Hamas et un membre du Djihad islamique. Ce serait un défaut d'une roquette du Djihad islamique, tirée avec beaucoup d'autres depuis un cimetière peu éloigné de l'hôpital, qui serait à l'origine de l'explosion. Cette version est aussi confirmée par la nature des dégâts : un incendie (dû au carburant de la roquette, liquide inflammable) et pas une explosion au sol, des fenêtres cassées mais pas les murs (alors que les bombes israéliennes détruisent des bâtiments entiers), pas de cratère, etc. Ce qui expliquerait aussi que l'estimation communiquée par le Hamas de plusieurs centaines de victimes est peu crédible (on parle maintenant de plusieurs dizaines de morts, tous des civils).



Du reste, certains rappellent qu'environ une roquette sur vingt lancées depuis Gaza par les terroristes palestiniens pour tuer des Israéliens retombe sur Gaza même, tuant donc des Palestiniens au point qu'on peut sérieusement se demander qui, de l'armée israélienne ou des terroristes palestiniens ont tué le plus de civils palestiniens depuis plusieurs décennies (rappelons que le 7 octobre 2023, le Hamas a lancé 5 000 roquettes contre Israël).

En outre, la venue du Président américain Joe Biden au Proche-Orient le lendemain ne coïncidait pas vraiment dans l'agenda avec une frappe israélienne qui aurait été contre-productive. Les tentatives américaines de médiation dans la région ont été anéanties par cette explosion qui a beaucoup ému des pays arabes qu'il voulait aussi visiter.

La vérité existe puisque les faits sont les faits. Sur cette explosion de l'hôpital, cela paraît donc peu probable que l'armée israélienne en soit responsable. Mais celle-ci a finalement une faible importance face aux foules enflammées. Et comme je l'ai écrit plus haut, la non responsabilité de l'armée israélienne de cette destruction ne l'exonère pas de celle des autres tragédies qu'elle commet en réponse à l'horreur du Hamas. Malgré la désinformation, la colère se base sur du réel aussi.



Avez-vous remarqué que lorsque des peuples non islamiques sont touchés par de tragiques attentats, sont mis en avant la tristesse et le recueillement comme émotions principales, tandis que lorsqu'un peuple islamique est touché par une tragédie guerrière, c'est la colère qui l'emporte, et l'esprit de vengeance ? La colère est une courte folie, dit la formule latine. Combien de temps faudra-t-il attendre pour que la folie cesse enfin et que les deux peuples, israélien et palestinien, qui ne sont peuples que depuis 1948, puisse cohabiter paisiblement avec une mutuelle reconnaissance et dans un mutuel respect ? C'est l'objectif des rationnels, ceux qui laissent la passion de côté et qui veulent la raison. Ils sont ultra-minoritaires dans cette région du monde...


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (18 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
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Hamas : tirs groupés contre les insoumis.
Horreur en Israël : les points sur les i de Gérard Larcher et Emmanuel Macron.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 12 octobre 2023 (vidéo et texte intégral).
Allocution du Président du Sénat Gérard Larcher le 11 octobre 2023 (texte intégral).
Horreur totale en Israël ; émotion et clarification politique en France.
Terreur Al-Aqsa : Israël en guerre contre son agresseur, le Hamas.
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