Ethique environnementale

par Fabrice
jeudi 9 février 2006

Bref résumé des courants marquants de l’éthique environnementale

La civilisation occidentale s’est faite au détriment de la nature. Les progrès techniques ont entraîné par omission, sans réelle volonté de nuire, la pollution de notre milieu de vie, au point d’être à l’origine d’un problème sanitaire sans précédent. Une réflexion morale sur le milieu ambiant s’impose plus que jamais.

En remontant à la vision édénique de la Genèse : « Dieu plaça l’homme dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder », version sympathique, ou la version plus dure : « Soyez fécond, remplissez-la et dominez les animaux », nous comprenons que les textes religieux occidentaux sont anthropocentriques et justifient la domination sans contestation de l’homme sur la nature. Sans retenue philosophique, nos sociétés se sont construites sur ce concept, en oubliant que la relation qui nous lie à notre environnement est intime et indissociable de notre bien-être.

Au XIXe siècle, la sécularisation de la société nous libère de cette conception erronée des rapports entre l’homme et la nature. D’abord pour des raisons esthétiques, le romantisme, et enfin pour des raisons scientifiques, le sentiment environnementaliste naît avec notamment l’invention du mot « écologie » par Ernst Haeckel, en 1866.

Deux pensées écologistes vont alors s’opposer, les préservationnistes et les conservationnistes. Les préservationnistes, dont le chef de file est John MUIR, sont inspirés par la pensée d’Henri David THOREAU. Ils cherchent à protéger la nature sauvage comme un sanctuaire. Les conservationnistes, de philosophie utilitariste, sont prêts à utiliser le potentiel économique de la nature en gérant les ressources « pour le plus grand bien du plus grand nombre et pour le plus longtemps ».

Nous voyons clairement apparaître deux modes de pensées toujours actuelles, ainsi que les oppositions d’aujourd’hui entre les environnementalistes et les économistes.

Ce débat ne pouvait intéresser que quelques élites nord-américaines -car bien loin des préoccupations quotidiennes- jusqu’à l’entrée en force des problèmes de pollution dans la vie de tous les jours. La première grande crise environnementale survint dans la décennie 1960-1970. La conjonction d’une médiatisation internationalisée, d’un problème de santé jusqu’alors inconnu et de meilleures connaissances scientifiques a fait entrer l’environnement dans notre vie. D’ami, il devient ennemi potentiel, et qui est pointé du doigt ? L’homme et son industrie, plus difficile encore à accepter, notre mode de vie.

A la suite de ces crises sanitaires sans précédents, les intellectuels prennent conscience, en même temps que la population, que l’environnement mérite une réflexion distincte et donc une éthique propre, issue d’une pensée philosophique claire et structurée. Alors que les philosophes nord-américains approfondissent les recherches sur la morale environnementale, les Européens favorisent la voie de l’écologie politique.

Les articles fondateurs sont publiés en 1973 et 1975 par Richard Routley et Homes Rolston. Issue d’une position surtout préservationniste, l’extension de la morale à l’environnement se structure en fonction de la nature des êtres auxquels sont attachés ces valeurs.

Les anthropocentristes qui, après la théologie, ont trouvé en Kant un défenseur de la seule valeur intrinsèque de l’homme en tant que sujet moral, refusent le droit de valorisation aux autres êtres vivants. Ces derniers n’ont qu’une valeur instrumentale qui n’est valorisée qu’en fonction des intérêts humains. Cette approche utilitariste qui préconise une utilisation réfléchie du patrimoine naturel est défendue par les philosophes contemporains que sont Eugene Hargrove et Bryan Norton. Pour eux, la seule utilisation économique est dépassée, cette utilisation de la nature doit répondre à des critères esthétiques, scientifiques, symboliques, spirituels...

Mais même avec cette extension moins économico-centriste, cette vision du rôle de la nature est considérée par beaucoup comme de l’égocentrisme humain ; l’homme se reconnaît à lui seul une valeur intrinsèque, en tant que seul être doué de conscience. De nombreux courants d’éthique environnementaliste s’opposent à cette vision nombriliste pour étendre à d’autres catégories ontologiques les valeurs morales : le pathocentrisme, le biocentrisme, l’écocentrisme... Ce dernier étant le plus complet, car il attribue une valeur intrinsèque à la communauté biotique dans son ensemble. Comment vouloir protéger le panda de Chine sans préserver son cadre de vie dans son ensemble ?

Le pathocentrisme reconnaît une valeur aux êtres sensibles, le biocentrisme donne une valeur à tout être vivant et l’écocentrisme, lui, reconnaît toutes les parties comme un ensemble d’individualités qui forment un tout.

Ces notions semblent complexes, mais cette réflexion éthique est indispensable à la reconstruction d’un rapport équilibré et respectueux entre l’homme et son milieu ambiant.


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