Un célèbre inconnu (6)

par olivier cabanel
mercredi 23 août 2023

Le jazz est l’une des musiques qui a croisé ma vie à plusieurs reprises, et de Mingus à Pharoa Sanders en passant par Monk, ce furent toujours de belles rencontres… je vous raconte

Le jazz a toujours été présent dans ma vie, dès mon plus jeune âge, puisque je m’étais approprié le piano destiné à mes sœurs, lesquelles avaient abandonné rapidement la pratique de cet instrument…

c’était un « cadre en bois », et il me fallait donc accorder le piano quasiment chaque jour, avant d’en jouer…

comme le local où il se trouvait était en rez de chaussée, la fenêtre largement ouverte sur la rue, attira rapidement des amateurs de jazz et des musiciens..au début, je m’acharnais à m’inspirer de la technique d’Errol Garner, en pratiquant ce léger décalage entre la main gauche et la droite...mais c’est aussi le jazz novateur qui m’attirait : à l’époque, on écoutait les Jazz Messengers, le MJQ, Thelonius Monk, Miles Davis, Ahmad Jawal et bien sur John Coltrane.

Plus tard je fus contacté par un fan de jazz, imprimeur de son état, qui réussit à me convaincre de me mettre au vibraphone : avec un ami bassiste, nous l’avons rejoint lui et sa compagne, laquelle jouait de la guitare, lui étant un percussionniste performant...à 4 nous avons créé le tétraèdre, répétant toutes les semaines...hélas la vie du groupe était fragile, et s’arrêta un triste jour : j’avais eu l’accord du groupe de nous présenter à un festival de jazz à Genève, mais quelques jours avant l’échéance, le batteur et sa compagne guitariste décidèrent que nous n’étions pas prêts...

Mais le jazz était là, y compris en 1968, où je me trouvais à Juan les Pins, découvrant entre autres Pharoa Sanders et son légendaire « karma », qui mit le feu au festival. lien

J’étais en compagnie d’une amie genevoise qui avait une particularité qui nous ouvrit plus tard de larges portes.

En effet, elle avait ramené d’un séjour africain d'originales sandales en cuir, fabriquées exclusivement par une petite tribu africaine…

or à la fin des concerts du festival, nous savions que les musiciens se retrouvaient dans un club de nuit de Juan, et nous nous sommes posté à l’entrée du dit club espérant pouvoir y rentrer…

hélas, seuls les musiciens, et leurs staffs étaient autorisés à y rentrer…

or, lorsque Pharoa arriva, il était accompagné entre autres de son batteur, en l’occurrence Najeed Shabazz, lequel tomba en arrêt devant ma copine, et surtout devant ses étranges sandalettes africaines ...il portait exactement les mêmes, étant originaire de ce même petit village africain, et nous fit pénétrer tous les deux à l’intérieur du club.

J’avais emporté un petit magnétophone à cassettes, et inutile de dire que j’enregistrai la jam qui s’y déroula...moment inoubliable, et cassette disparue...ou volée ?…

2 ans plus tard, je me retrouvais à New-York, lors de ce qui était appelé pompeusement « voyage d’étude », alors que j’étais projeteur architecte, dans un grand bureau Genevois…

le programme de ce « voyage d’étude » commença plutôt mal, car après avoir subi une visite en haut de la statue de la liberté, un repas dans un « restaurant français » assez affligeant, et d’autres joyeusetés, je décidais de faire mon propre programme...la nuit tombée, je pris le métro direction Greenwich Village, genre d’activité fortement déconseillée le soir par mes collègues.

Pourtant cette audacieuse virée me procura une grande joie, car en pénétrant au hasard de mes pérégrinations, je tombais sur une boite de jazz dans laquelle, à mon grand étonnement, Charlie Mingus, et son work shop se produisaient.

Le plus étrange c’est que les rares clients du lieu ne semblaient pas être plus intéressé que ça à la musique qui se créait sous leurs yeux...les musiciens n’en tenaient d’ailleurs aucun compte, et s’arrêtaient au milieu d’un morceau pour se mettre d’accord sur la musique jouée, sous la haute bienveillance de Mingus.

Des moments inoubliables.

Lors de mon retour dans la cité helvétique, la surprise de mes collègues fut grande tant le récit que je fis de cette semaine passionnante était différent de ceux qui avaient fait le même voyage, à croire que nous n’avions pas visité la même ville.

Eux n’avaient pas observé ces cafards géants qui voisinaient avec les prétentieuses façades tout en marbre blanc, ni vu de pauvres ères agonisant sur des trottoirs défoncés, alors que les new-yorkais me conseillaient « take it easy... don't mind »...ni découvert les myriades de taxis jaunes au milieu des jets de vapeur du réseau de chauffage de la ville.

Plus tard, le jazz revint dans ma vie avec Guy Pédersen, le grand bassiste de jazz, lequel décida de produire mon premier disque, un 45 tours, coproduit avec CBS.

Et encore plus tard, je rencontrais un certain Thomy Valdes, un musicien de jazz isérois avec lequel je vécus des moments passionnants,

mais ceci est une autre histoire que je vous raconterais bientôt sous les couleurs du « jour de la terre  »…

comme dit mon vieil ami africain : «  la vie est un ballet qu’on ne danse qu’une fois  ».

Merci aux internautes pour leur aide précieuse

la photo illustrant l’article vient de jazzàlavillette

Olivier Cabanel

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