Un célèbre inconnu, la suite

par olivier cabanel
lundi 7 août 2023

Frédéric Dard, tout le monde ne connaît peut-être pas...mais nombreux sont ceux qui ont au moins entendu parler de San Antonio...non ?

Les hasards de ma vie l’ont mis sur mon chemin, et ça fait partie des rencontres que l’on ne peut oublier…

Je vous raconte.

À Genève, ou j’officiais comme « animateur élu » dans « la maison st Gervais », sorte de pépite culturelle dont je vous conterais les péripéties plus tard, car elles en valent la peine, j’avais fais venir pour un week-end mensuel un artiste quasi lyonnais, nommé Robert Grange, que ses proches considéraient comme « le chantre du Beaujolais »…lien

il rencontra un joli succès lors de notre cabaret, à tel point, qu’avec quelques amis, (qui allaient devenir plus tard « Aristide Padygros »), nous décidâmes de le garder toute la semaine qui suivit...et ce fut une semaine d’enfer avec prise d’otage des clients des bistrots genevois, dans lesquels des fêtes mémorables se déroulèrent…

A tel point que l’artiste du beaujolais décida de nous emmener à la fin de son séjour en pays helvète, nous étions trois, dans son beau pays pour nous faire rencontrer ses amis vignerons, des caves improbables, et divers artistes, artisans..

Le dernier jour de notre séjour en pays Brouilly, il nous emmena en Dauphiné, rencontrer son frère, André pour ne pas le nommer, lequel avait la double casquette de gestionnaire d’un château, celui de Chapeau Cornu, et de maire du village, un village nommé Vignieu en l’occurrence.

Guitares et violons furent sortis, fêtes y compris, et ce lieu magique me revit plus souvent qu’à mon tour…

Je vous raconte.

En effet, bien plus tard, à la recherche d’une autre voix que celle d’Helvétie, André Grange me proposa de m’accueillir…

Mais ceci est une autre histoire.

Bref, après quelques semaines de vie, avec ma compagne d’alors, dans le pigeonnier du château, nous nous sommes mis à la recherche d’une « maison à nous »…

Les hasards de la vie nous amenèrent à St Chef, un village à quelques kilomètres de là, puisqu’une certaine Marie Tabardel nous proposa d’habiter le premier étage de sa vieille maison en pisé.

Vous pensez ne pas connaître Marie Tabardel  ?… et pourtant…

Dans les « san Antonio » Frédéric Dard l’appelle « Félicie », et il la présentait comme sa mère : elle était aussi une excellente cuisinière, dans ses bouquins, et dans la réalité.

Cette « Marie/Félicie » est d’ailleurs à l’origine de plusieurs restaurants dans ce village, comme par exemple « la taverne rustique », ou « l’auberge ensoleillée, dans lesquels établissements on déguste encore son célèbre poulet aux écrevisses.

Or, Frédéric Dard lui rendait visite régulièrement, à chaque sortie d’un nouveau roman...c’est à dire souvent.

Un jour, elle m'ouvrit un grand buffet, dans lequel s’alignaient toujours neufs, (elle m’avoua ne les avoir jamais lus !) tous les livres qu’il lui avait écrit et aussi dédicacés, car je lui avais dit toute mon admiration que j’avais pour l’auteur.

Elle me promit de m’appeler la prochaine fois qu’il viendrait…

Je garde encore le souvenir ému de cette rencontre.

Je ne crois pas avoir rencontré un pareil personnage : direct, nature, sans chichis, le tutoiement de rigueur, et tant d’émotions dans ce qu’il me racontais que je me souviens de larmes qu’il a fait naître.

Il était comme je l’imaginais.

Impossible d’oublier une si belle personne, je vous le jure.

Bon, c’est vrai, les « San Antonio  », c’est comme disait son auteur, de la littérature de gare, et pourtant dans chaque roman, au-delà de l’intrigue cousu de fil blanc, il faut découvrir les « échappées belles » de Dard, dans lesquelles il balance sans complexes ses états d’âme, et ces pépites sont de purs moments de bonheur.

Et puis, il y a les romans noirs, et là il faut s’accrocher, parce que c’est vraiment sombre, voire déprimant… ce que pouvait être Dard, qui, comme chacun sait traversait plus souvent qu’à son tour de lourds moments de mélancolie...et finalement, les San Antonio était son défouloir...d’autant que les 3 héros de ses romans, béru, pinuche, et San Antonio étaient un peu les 3 faces de son personnage : Le gourmand de la vie qu’était bérurier, le triste enquêteur de pinuche, et le beau gosse du commissaire...

Je me suis toujours demandé ce qu’étaient devenus ces romans tout neufs, et dédicacés, car après le décès de Marie, ils furent peut-être dispersés, ou mis dans une benne...va savoir ?

Il faut tout de même savoir que les éditions originales de l’écrivain valent aujourd’hui de petites fortunes.

Le premier San Antonio, s’intitule « réglez lui son compte  », et il vaut près de 1500 €, surtout s’il est dédicacé.

Et j’en sais quelque chose, que je raconterais peut-être plus tard, car j’ai eu ce livre si rare dans mes mains...

Comme dit mon vieil ami africain : « au bout de la patience, il y a le ciel ».

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