Un anniversaire presque gâché
par Stéphane W.
mercredi 13 septembre 2006
Comme chaque année depuis 2001, il ne m’est plus possible de voir la date fatidique du 9-11 comme une journée ordinaire. Même si depuis plus de vingt ans, elle n’a jamais été une journée comme les autres, depuis 2001, j’ai du mal à me faire à l’idée d’avoir à ressasser tout ce qui entoure cet événement : les commentaires encore aujourd’hui des « heureux survivants » de New York, les propos de ceux qui ont perdu connaissances, collègues, amis, frères et sœurs, fils et filles ou conjoints, qui n’arrivent plus à retrouver le petit quelque chose, la petite assurance qu’ils avaient en 2001, à 8 h, en ce 11 septembre.
New York, qui représente l’Amérique dans le paroxysme de son aboutissement, dans la réussite de son gigantisme, mais aussi dans sa tradition d’ouverture d’esprit, de multi- et d’inter-culturalisme, de modernisme et de libéralisme pur, a été touchée en plein dans sa chair. Cette Amérique, encore marquée par le passage de Clinton, à peine entrée dans l’ère du conservatisme à la Bush II version 1, n’était pas prête. Prête à quoi ? Au combat de la nouvelle ère internationale : l’ère de la guerre contre le terrorisme.
L’heure aujourd’hui n’est pas à savoir qui sont les coupables ou les responsables, s’il y avait suffisamment de mesures de sécurité ou de protection, s’il fallait plus de surveillance, plus de ci, moins de ça : l’heure est au recueillement. Aujourd’hui, il ne faut ni fêter la tristesse de l’événement, ni persévérer dans la recherche du coupable concret et/ou idéologique. Dans l’année, il y a près de 359 jours pour cela. Il faut plutôt penser à ceux qui ne sont plus, à ceux qui n’ont jamais voulu cet évènement. Il faut faire abstraction aujourd’hui du débat public et politique sur les enjeux de la nouvelle guerre presque froide entre États et groupuscules, entre Bien et Mal, ou même entre l’Occident et le reste (si tant est que cette guerre soit réelle bien sûr).
Nous devons, en ce jour anniversaire, penser aux « élus » : ceux qui, en quelque sorte, ont été choisis pour incarner ce renouveau de l’ordre mondial. Ces élus qui, malgré eux, devraient et devront rester gravés dans nos mémoires et dans celles des enfants de nos petits-enfants comme étant non pas les martyrs de la liberté et d’un modernisme libre, les martyrs d’une pseudo-guerre sans nom, mais plutôt comme le résultat de ce que l’être humain peut faire dans son état pur d’animal sans intelligence, capable du pire pour son semblable.
Et pour ceux qui ne veulent voir les élus qu’en comparaison à d’autres, je leur dis ceci : l’année compte près de 360 jours, et chaque jour devrait subir sa peine ; celle du 11 septembre n’a pas été choisie mais imposée.
Quant à ceux qui, comme moi, ont vu et verront le jour un certain 11 septembre, j’ai le regret de vous annoncer que votre anniversaire ne sera jamais plus le même : ce sera un anniversaire presque gâché, et jamais oublié.