Meurice, Mélenchon, Zemmour, Achili, Colombe : la liberté d’expression attaquée

par Laurent Herblay
samedi 11 mai 2024

Un vent mauvais souffle décidément sur notre démocratie. Le débat démocratique ou même l’humour sont de plus en plus restreints dans un politiquement correct étroit. Après les difficultés de Mélenchon et Zemmour à venir débattre, France Inter s’engage dans une purge à rebours de sa vocation de service public, quand les Restos du cœur pousse une bénévole sur la touche pour avoir parlé politique.

 

La gauche devient le camp de l’intolérance

C’est bien une forme de censure qui est en marche. Bien sûr, elle n’est pas systématique, certains espaces de liberté se développant, même si certains reproduisent, en inversé, le manque d’ouverture de ceux qu’ils dénoncent. Et bien sûr, ce n’est pas nouveau : on peut penser à la regrettable disparition des Guignols de l’Info ou à la disparition d’antenne de voix trop originales (Nicole Ferroni de France Inter). Mais l’accumulation des censures depuis quelques semaines semble indiquer une aggravation de l’état de notre démocratie. Il n’est pas normal que des dirigeants politiques importants comme Mélenchon ou Zemmour ne puissent pas toujours s’exprimer dans l’espace public à leur guise. L’annulation de la venue du président de LFI est d’autant plus choquante que le président s’est permis un dispositif de sécurité colossal pour pouvoir passer du temps dans certaines parties du Salon de l’Agriculture devenu un bunker.

Décidément, même si ses audiences sont au beau fixe (ce qui n’indique pas une adhésion à la ligne éditoriale), France Inter continue à se distinguer en mal. Après les déclarations de sa patronne justifiant la censure de certaines opinions, la radio s’est distinguée par le licenciement d’un journaliste qui avait eu le tord de trop parler avec Jordan Bardella et d’un humoriste qui a eu le tord de faire une blague qui ne serait pas correcte. Ces deux licenciements posent problème. Pourquoi un journaliste qui a des contacts avec le dirigeant du premier parti d’opposition devrait être écarté d’une station du service public, quand d’autres ont pu entretenir des liens avec d’autres personnalités politiques sans être inquiétées ? Ce faisant, il apparaît trop clairement que si certains liens sont refusés, d’autres ne posent pas problème, confirmant que Radio France défend une ligne politique très marquée, ce que sont statut devrait interdire.

Et cette ligne politique étroite ne semble même plus supporter un humour un peu trop provocant, comme celui de Guillaume Meurice. Pourtant, comme le rappelle Régis de Castelnau, la directrice de France Inter soutenait il y a peu « qu’avoir des humoristes qui sont irrévérencieux, qui n’ont aucune notion du respect du sacré, ça fait un bien fou ! Et ça nous engage  ». On peut apprécier modérément Guillaume Meurice, ou même trouver sa saillie sur Netanyahou d’un goût très discutable, mais licencier un humoriste pour une mauvaise blague est tout de même inquiétant au pays de Charlie. Forcer le trait est le propre de l’humour et il est bien évident que les dirigeants politiques ne doivent pas être protégés d’attaques d’humoristes. Rien ne devrait justifier le fait d’écarter Guillaume Meurice de l’antenne dans notre pays. Sur France Inter, ce ne sont pas seulement les idées alternatives qui sont tues, mais aussi l’humour trop dérangeant.

Pour couronner le tout, après la diffusion d’’une vidéo d’une bénévole des Restos du cœur au RSA votant RN, cette dernière semble avoir été poussée vers la sortie. Bien sûr, l’association ne veut pas faire de politique et éviter toute récupération, mais il est bien évident que ses bénévoles votent et que le score du RN dans les classes populaires fait mécaniquement qu’une proportion non négligeable vote pour ce parti. Ce cas pose d’autant plus question que si un bénévole des Restos parlait de son vote LFI, Verts ou PS, on doute que cela poserait un problème aux responsables de l’association. Ce faisant, se pose à nouveau la question de l’intolérance d’une partie de la gauche à l’égard de toute opinion un peu trop éloignée de la leur et des réflexes autoritaires de censure ou exclusion de toute personne s’éloignant un peu trop d’une ligne politiquement correcte, variant de la gauche France Inter aux antifas…

Pour Bruno Gaccio, « il y a bien en France une façon officielle de penser, décrétée par les autorités occupantes provisoires du pouvoir, diffusée par les médias de grands chemins, et qui prive de travail les récalcitrants  ». C’est une des caractéristiques de la déconstruction, lente, mais réelle, de notre démocratie. Voilà pourquoi il est essentiel de dénoncer ces abus, surtout quand ils touchent un autre camp que le sien.


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