Mettre la flèche

par C’est Nabum
jeudi 17 août 2023

 

Le code en plein doute

Le phénomène ne fait que s'amplifier, exprimant ainsi le peu d'intérêt que désormais le quidam qui circule accorde à ses semblables qu'ils soient comme lui automobilistes ou bien usagers de la route mais aussi piétons malheureusement. Il semble que plus les véhicules se font solides, encombrants, confortables plus le pilote engoncé dans son habitacle se soucie comme d'une guigne du monde qui l'entoure.

Il est désormais évident que l'individualisme ambiant, résultat tangible du conditionnement général de la population pour transformer chaque personne en un consommateur effréné, a eu une conséquence certaine sur la manière de se conduire en société mobile. Mettre la flèche ce serait faire feu de tout bois pour prendre en compte les autres, ces quantités négligeables qui nuisent considérablement à la liberté d'agir à sa guise.

Si au début de l'automobile, le chauffeur tendait le bras pour signaler son intention de virer, l'apport de la technologie lui a donné un sacré coup de main pour s'épargner ce geste d'autant plus complexe quand il s'agissait de tourner à droite. La pratique s'est alors penchée sur les cyclistes à la condition qu'ils puissent lâcher leur guidon du côté où ils veulent aller.

Hélas, pour les adeptes de la petite reine, de nouveaux venus, profitant de l'électrification de leur engin, oublièrent cet effort d'autant plus facilement que la notion même d'effort disparaissait de la pratique. Évacuons de suite l'idée saugrenue de demander aux autres utilisateurs de ce qu'on nomme les mobilités douces qui se passent de code et de signalisation, de courtoisie et de prudence.

Revenons aux quatre roues qui ne mettent plus le clignoteur depuis que les ronds-points leur ont fait perdre la tête. Ils rentrent dans ce cirque routier sans même avertir de leur intention, oublieux que le code prévoit de mettre la flèche à gauche tant que la sortie n'est pas envisagée. Puis, la volonté de sortir du manège imposerait un signalement à droite. Dans bon nombre de cas, les deux phases sont omises tandis que le choix de la file demeure aléatoire.

On mesure à quel point les carrossiers doivent bénir ces pratiques qui mettent du beurre dans leurs épinards. Le pli étant pris, l'usage du sinophile devient optionnel en toute circonstance, comptant sur la sagacité des autres usagers pour deviner les intentions de celui qui veut changer de direction. Ajoutons pour sa défense que l'usage du GPS pratiquement systématique fait du conducteur un personnage qui aime à se laisser mener par le bout du nez. Pourquoi dans pareil cas faire le moindre effort.

Le code de la route est tombé dans le panneau à moins que ce ne soit la police qui s'est uniquement focalisée sur sa mission de fiscalité routière pour gagner des sous avec les radars et les jumelles pour perdre leur temps sur tous ces petits riens qui font de la route en ville surtout, une véritable jungle.

Je devine qu'on va me taxer d'exagération. Pourtant les signaux lumineux virent au rouge tandis que sur la chaussée nombre d'entre-nous ne savent plus où donner de la tête ni où mettre les pieds. Rassurez-vous, utilisateurs de la route, les trottoirs ne tarderont pas à suivre le même chemin, ils sont d'ailleurs sur la bonne voie et seuls les piétons, les poussettes, les chariots n'ont plus qu'à répondre aux injonctions des avertisseurs sonores des furieux nucléaires.

Peut-on évoquer l'incivilité dans ce domaine ? J'émettrai une petite réserve tant il apparaît clairement que le législateur joue de la confusion, ne réagit jamais assez tôt lors de l'apparition de nouveaux modes de déplacements et favorisent les uns en leur laissant implicitement tous les droits ou presque. Même le gyrophare dans ce bazar ambiant n'est plus certain de jouir de la priorité tant ceux qui revendiquent ce privilège sont désormais pléthore.

Tout va bien, je mets la flèche, et pour achever cette diatribe routière, j'achève ce parcours laborieux par trois points de suspension assorti d'une amende forfaitaire de 35 euros ...

À contre-sens.


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