Ours en France : la polémique continue...

par Christophe CORET
jeudi 27 avril 2006

Comme tous les ans au sortir de l’hivernation, les ours font parler d’eux, car malgré leur régime omnivore composé à près de 80% de végétaux, il leur arrive d’attaquer le bétail pour répondre à leurs besoins. Systématiquement s’ensuivent bon nombre d’articles de presse anti-ours, expliquant que l’ours est incompatible avec le pastoralisme... Et il semble qu’en cette année 2006, qui marque le début des opérations de réintroduction d’ours dans les Pyrénées, cette tendance s’accentue.

L’ours est un animal opportuniste qui effectivement peut s’attaquer aux troupeaux lorsqu’ils ne sont pas protégés, mais cela ne doit absolument pas remettre en cause le programme de réintroduction. La cohabitation est possible ! Au cours des dernières semaines, plusieurs ovins ont été tués par des ours, ce qui n’est absolument pas exceptionnel en ce moment, "car c’est la période la plus difficile pour lui pour trouver de la nourriture depuis la fin de l’hibernation", a expliqué Etienne Dubarry, de l’équipe technique ours.

Aussi un bélier et un agneau ont-ils été retrouvés morts lundi à Aston (Ariège), tués par un ours (probablement Boutxy) dans un parc en bordure de forêt, à proximité du village. Deux autres brebis ont été tuées et des ruches ont été détruites dans les communes de Luzenac, Perles-et-Castelet, Orgeix, et Mérens-les-Vals.

Certains éleveurs, les quelques élus qui surfent sur la vague anti-ours pour se faire un nom, et les médias, avides de sensationnalisme et de guerrillas (urbaine ou rurale, peu importe du moment que ça fait vendre l’info) se sont vite emparrés de ce dossier pour tenter de faire avorter le programme de réintroduction actuellement en cours.

Certains journalistes n’hésitent pas à utiliser des mots violents "un ours mâle, vraisemblablement Boutxy, serait responsable de cette tuerie", ou à tenter d’instiller la peur en disant que l’ours est près des villages, dangereux pour l’homme... De grâce, un ours qui mange une brebis est-il plus un tueur qu’un rapace qui se saisit d’un lapin, qu’un homme ventripotent qui dévore sont steak saignant ? L’ours est-il plus violent et condamnable que le groupe d’extrémistes qui n’a pas hésité à saccager la mairie d’Arbas le 1er avril dernier, soutenu par quelques z’élus en écharpe ? Je ne crois pas !

Il me semble d’ailleurs que ces personnes, qui sont les premières à se plaindre de l’ours, ne refusent pas les avantages qui leur sont octroyés grâce à sa présence : héliportage du matériel, restauration des cabanes d’alpage... Et le plan de restauration de l’ours dans les Pyrénées 2006-2009 insiste sur ces points :


- un soutien (en complément des aides agricoles) sera donc apporté, y compris en Béarn, pour la réalisation d’un gardiennage permanent par un berger salarié, un éleveur prestataire sur troupeau collectif ou encore un éleveur sur son propre troupeau. Sur des troupeaux importants, le recours à un second berger pourra également être soutenu.
- A cela s’ajoute le financement du portage du matériel de première nécessité des bergers... En Béarn (Pyrénées-Atlantiques), l’action est complétée, pour lutter contre un pastoralisme de bêtes taries, par la prise en charge, à la montée comme à la descente d’estive, du matériel nécessaire à la traite...
- le financement de moyens de communication (téléphones portables, radio-téléphones)
- incitation au regroupement nocturne du troupeau
- la protection effective du troupeau passe par l’utilisation d’un ou de plusieurs chiens patous et / ou de clôtures électriques... Une aide sera attribuée aux gestionnaires d’estive pour leur permettre de s’équiper d’une clôture électrique pour le regroupement nocturne et la protection des troupeaux. Ce financement prend en charge le matériel ainsi que sa livraison (matériel mobile, matériel fixe ou parcs de sécurité électrifiés, couplés avec des systèmes d’alerte et de déclenchement de dispositifs d’effarouchement lumineux).

Des aides sont allouées pour compenser le temps de travail nécessaire à l’installation de ce matériel, mais aussi en cas d’utilisation de patous... Ce plan est une véritable incitation à la cohabitation, et il me semble que la mauvaise volonté dont font preuve certains éleveurs devrait être dénoncée dans la presse, plutôt que relayée, la larme à l’oeil !

Les opérations de suivi et de capture des ours ont actuellement lieu en Slovénie, depuis le 15 avril 2006. 5 ours (4 femelles et un mâle) seront relâchés en Pyrénées centrales cette année, sur les territoires des communes suivantes, qui se sont portées volontaires pour ces lâchers :
- Arbas en Haute-Garonne
- Bagnères-de-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées
- Burgalays en Haute-Garonne
- Luchon en Haute-Garonne.

Ces réintroductions ne pourront être un succès que si tout le monde en accepte les règles. Que ceux qui les refusent rejettent aussi les avantages que l’ours leur apporte !


Lire l'article complet, et les commentaires