Le Chemin du Bout du Monde

par C’est Nabum
lundi 18 septembre 2023

 

Le Chemin du bout du monde ...

 

Sans s'enfeignater, à matine, dès le chant du coq, toute la pratique se déyeuche afin de se tourner vers la Loère. Les nautoniers cassent la croûte de boumn heur , enfilent leur gariot, s'afisltolent pour la Grande Remontée ! Dès l'ver du jour, is s' mettent en route ! Tous ces ga's s'en vont faire la foère au Festival de Loère en empruntant les ch'mins de l'ieau.

Sur l'chemin, l'long des rives, les gueux du bourg et d'alentours se pressent coumme à counfesse pour admirer ces seigneurs de l'ieau à la drôle d'allure. La belle rivière parfois si brutale, en ces biaux jours de septembre est maigrichone comme une charlusette qui s'abouette point à sa soif ! À c't'heure, elle est chargée d'abasseurs et parfois c'est peu qu'un maigrichon gouillat.

Grande et belle assemblée de nautoniers qu'voil'à. Matelots de peu ils s'en retrournent Gouépailler et s'abasoudir pour leur seul contentement en Orléans ! Tantôt, ce s'ra le raout des Marchands de Loère Les riverains sont ben gaitiaux à l'idée qu'leurs nayons vont s'cabosser, s'culbuter, caberioler et se ramasser au passage des ponts .

Les nautiers se gaussent de ses fadaises. Sur l'ieau, en dépit de l'étiage, i's sont si benaises qu'i s'berlancent sur les flots sans jamais biger les garnazelles ! Tous en chœur i's'encanaillent sur' l'dos des culterreux, les mangeux de terre aux gros sabiots et sauf vot' respect, ces malembouchés d' bourseoisiaux du bourgs.

En attendant, y'a un p'tit vent ben frisquet sur leu' berge si ben qu'à s'accoter sur la levée ceusse-là pourraient ben attraper la mort avnt qu'leu' heur ait sonnée. Si ben que ces gaillars s'pressent pour se mett'e dans le gosiers queques godets de vin pour r'metre d'aplomb. C'est ainsi doit agir un houmm' qui va passer l'après midi dehor' à 's'aberluter de la belle dame Liger. Y'a pas d'accagnardis dans c' armada !

Le breuvage leur réchauffe les boyaux du vent'e et délie itou les langues. Y'a à c't'heure ben plus de boniments sans queue ni raison que d'propos sensés, mais Ils ont ben l'drouet de se laisser aller avant d'monter sur leur bateau de bric et de broc. Pour les briques, j'ch'on pas ben certain mais pour les brocs y'a pas doute. Faut ben vider leu embarcations qui boivent par en haut comme par en bas avec des écopes.

Pour ces bons p'tits gars le franchissement du dessous des ponts n'est pas une mince affaire. Les curieux et les badauds s'agglutinent le long du quai.pour voir ces pe'tios souffler comme de beufs, geingner et hananer pour franchir sans férir c'tt maudite marche. Ça fait grand chahut de bois qui s'entrechoque contre les piles et les cailloux. Les barquasses s'en vont à Hue ou à Dia au gré du courant et des remous aux grosses vagues du pont.

Sur leur bateau ça brancille, ça tersaute mais y'en pas pas une qui chavire. Nos gars s'retrouvent jamais l'bec dans l'iau mais plus sûrement dans une chopine si tôt sur la berge. Dans l'iau, pour les haler, y'en a qui s'berdillent sans avoir l'air de savoir nager. Faut un grand aveniau pour les hisser sur la berge et l'es tirer de ce mauvais pas sans leur tenir des arguenasses ...

Y'a p'us moyen de les reconnaître Y sont pareillemnt trempés l' tête aux pieds. Faut dire qu'elle est bien mouiollante not' Loère même comme à c'heure, qu'elle n'a guerre d'ieau à traîner jusqu'à la mer ! Depuis d'début de leur vadrouill', z'on connu bien des avananies sans jamais les décourager.

L'temps s'met d'la partie en versant sur l'dessus leur tête, une grosse secouée, bien pire qu'un aquadiau, une vraie arnapée du diable. C'est ben là l'charme de ce rivière et d'son pays de cocagne de vous virer le temps qui fait, de faire la pluie comme le joli temps et de vous nayer parfois avec les eaux du ciel.

Mais rentournons-nous à la Grande Remontée de nos bateaux. V'las ti pas qu'à bout tracasseries et d'contrariétés deux matelots s'accotent et s'lancent des horions à faire pâlir les belles feumelles. Leur manière est en rapport avec leur tenue, la rivière est maîtresse exigeante qui parfois vous tourneboule le têtiau. À la fin partie, c'est autour d'un canon des plus pacifiques qui vont sceller leur réconciliation.

Tous les aime-bouillons, sont tous gaïtieaux. Les plus ficelle d'la bande sont déjà à la buvette et s'mettent à beugler à plein poumons pour que les autres s'accotent à eux autres. C'est ti drôle ce tas d'gens qui braill'nt coumm' des vieaux sur les bords d'l'ieau ! Maintenant qui sont à quais, l' reste qu'à clabauder, sur les geigneux du canton pourvu y'en ai pas à portée d'zoreilles !

Tout ça va finir en soirée avec une belle bordée, d'la musique, des causeries, des circonférences, des pirouettes et des histoires. Toute la pratique du canton abreuvera nos marins d'eau douce de grandes lichées de vin du pays qu'ils aval'ront à p'tites lampées afin garder les pieds sur terre, eux les gars de l'ieau. Qui sont heureurs nos piquit's, ils vont faire du chahut jusqu'à la nuit ! Et don', coumm'ça, bras-d'ssus, bras-d'ssous, s'en vont s'coucher tout gaitiaux quand s'ra pas d'heure à la nuit.

À la fin' vadrouill' y'en pas un qui s'ra saoul' à renifler dans un chalumeau " car au lendemain dès le l'ver du soleil, i's'en retournent tous à leurs bateaux. Y' aura grand ouvrage sur la Loère et n' faudra pas pâter en chemin pour arriver au jour du grand Festival. Sont pas là pour peser d'l'avoine tout du cours de leur grande remontée.


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