La rage sans le soin …

par C’est Nabum
lundi 25 septembre 2023

Qu'en pensent les gens du palais ?

Un baladin, un saltimbanque par définition parcourt les routes, va d'une ville à l'autre pour exercer son métier qui est aussi un talent. Il semble qu'il soit désormais impossible de dire la même chose pour certaines professions qui sont devenues exclusivement à but lucratif. Suivez donc les pérégrinations d'un musicien chanteur qui s'est fendu une dent au cœur de sa tournée…

L'incident eut lieu juste au départ d'une aventure fluviale, le conduisant durant près de trois semaines en itinérance sur notre Loire. Il devait agir au plus vite pour régler ce problème qui pouvait le faire souffrir mais surtout, perturber grandement son art. Le réflexe du patient ordinaire fut de saisir la requête suivante sur cette toile supposée faire des miracles : « Urgence dentaire Orléans ». Nous étions début septembre.

Le moteur de recherche toujours sur les dents proposa une adresse qui se vantait de n'offrir qu'une heure d'attente en plein centre-ville. L'appel s'avéra d'un tout autre tonneau, un rendez-vous était donné presque au terme du voyage, quinze jours plus tard. Notre ami l'accepta en se disant que faute de mieux, il se rendrait à celui-là.

Le lendemain, lors d'une conversation, une amie lui expliqua qu'elle avait rendez-vous chez son dentiste habituel dans la semaine et qu'elle acceptait volontiers de lui laisser la place à la condition que le praticien accepte cette substitution sous le signe de l'urgence. Il lui suffirait de rejoindre le point de départ par le train pour se faire soigner…

Hélas, ce professionnel, parjure de son serment, repoussa la suggestion prétextant que le jour dit, il ne réalisait que des radios, étant un adepte inconditionnel du Taylorisme appliqué à la pratique dentaire. La dent devait se tenir tranquille, il faudrait attendre.

Plus tard durant le voyage, alors que le convoi passait dans une ville ligérienne ayant un service d'urgence, notre chanteur se fit emmener dans cet établissement portant un nom célèbre de la cinquième République. Il fut reçu par un interne qui ne trouva rien de mieux que de lui donner des cachets de paracétamol en lui affirmant qu'il ne pouvait rien faire de mieux.

La suite contraignit le chanteur à manger que d'un côté pour préserver ce qui pouvait l'être jusqu'à ce fameux rendez-vous, deux jours avant le Festival qui couronnait cette épopée. Il fut conduit dans ce grand CHRO, adepte du jeu de piste pour automobiliste docile. Hélas, notre moins patient s'était fait conduire et n'avait plus que ses jambes à son cou.

Il faut brinquebaler d'un lieu à l'autre, faisant fi des kilomètres et des difficultés. De La Source à Orléans pour revenir à la Source et reprendre le chemin inverse sans pour autant avoir le moindre soin mais finir par passer une radiographie avant de devoir aller ailleurs. Dans ce dernier établissement, terme supposé de son marathon avant le soin, on lui demanda d'aller chercher la radio qu'il venait de passer loin de là et que naturellement on ne lui avait pas remise.

Excédé, las, énervé, il pria cette zélée secrétaire de demander à ses collègues de faire parvenir le document par les moyens rapides que la technologie met à notre disposition. Que nenni mon bon monsieur, la dame n'avait pas le droit de faire cette demande : la déontologie médicale exigeant que le patient ne prenne pas racine et aille chercher lui-même le cliché.

Il explosa de rage, non plus dentaire mais citoyenne, demandant si par hasard, on ne se moquait pas de lui. Il reçut la surprenant réplique : « Vous ne voulez pas vous soigner ! ». L'abjection n'ayant pas de limite, un rendez-vous lui fut proposé pour un soin dans trois mois. Heureusement qu'il était passé par les urgences…

Il a malgré tout reçu une prescription. Il faut faire vivre les amis des laboratoires en le priant de contacter son dentiste traitant sur son lieu domiciliaire. Inutile de préciser qu'il ne dispose pas de ce professionnel rare puisque chez lui, les professionnels du palais, ne prennent plus de nouveaux clients (pardon patients, osent-ils encore dire). L'envie de mordre ces gens, de leur sauter à la gorge effleura l'idée de celui qui devenait enragé. Il espère finir le festival sans devoir prendre le mal à la racine...

À contre-soin


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