Mémoirel, l’Europe en proie à la soumission ! Comment dire l’indicible ? Comment nommer l’invraisemblable ?
par Cassandre G
vendredi 25 avril 2025
« En 2025, l’Europe n’efface plus — elle recompose.
Le Mémoirel formate les esprits, le passé devient algorithmique,
et les mots, des outils de soumission volontaire.
Résister, c’est inventer des langues qui saignent encore. »
Mémoirel n’existe dans aucun dictionnaire. Et c’est précisément pourquoi il était nécessaire. Il fallait un mot juste — rare, dur, politiquement utile. Il fallait qu’il claque. Il fallait un outil, un signal, un refus. Il fallait désigner ce phénomène rampant : cette mécanique feutrée par laquelle une élite saturée de storytelling et de bonne conscience numérique façonne le passé selon ses intérêts, prescrit certains souvenirs, interdit les autres. Une mémoire sur mesure, faite pour soulager les consciences refoulées des actes innommables de l’histoire européenne.
C’est Orwell qui me l’a soufflé. L’auteur de *1984* savait que restreindre les mots, c’est raccourcir les pensées. Et que l’oubli n’est jamais aussi efficace que lorsqu’il se déguise en souvenir.
Mémoirel, c’est cela : un souvenir reconditionné. Lissé. Digeste. Commémorable. En 2023, le ministère de l’Éducation allemand a modifié les programmes scolaires pour évoquer la colonisation comme un « processus d’échanges inégaux » — un euphémisme critiqué par les historiens, selon le Deutsches Historisches Museum. Pendant que le 9 mai, date symbole de la victoire soviétique contre le fascisme, disparaît des commémorations européennes — non par oubli, mais par recalibrage idéologique. L’Union européenne ne nie pas l’Histoire. Elle la reconfigure. Elle réassortit les couleurs, révise les légendes, recadre les plans. Elle transforme la mémoire en module éducatif, en carte blanche narrative, en produit culturel exportable. Hier, les empires parlaient de « mission civilisatrice » pour masquer les pillages ; aujourd’hui, Mémoirel parle d’« héritage partagé ».
Et ce processus n’est pas diffus : il est activement mémoirelisant. Institutions, musées, manuels scolaires, programmes politiques — tous participent à cette domestication du passé. Les dates deviennent des alertes, les héros, des avatars, les crimes, des silences pratiques. L’oubli devient un alignement stratégique.
Face à l’autoritarisme langagier de Mme Kaja Kallas, commissaire aux affaires étrangères de l’Union européenne, qui orchestre l’effacement des dates gênantes comme on gomme un bug informatique, aucun mot du lexique établi ne suffisait. Alors je l’ai inventé : Mémoirel. Pour nommer l’indicible. Pour dire l’impensé. Pour rappeler que toute politique de la mémoire commence par des silences imposés. Ce qu’Orwell redoutait, l’UE l’institutionnalise.
Né d’une impasse langagière, Mémoirel répond à un moment où les mots manquent, parce que la réalité les dépasse. Il vient résister à l’effacement organisé : cette stratégie douce par laquelle l’Histoire est nettoyée, édulcorée, transformée en produit dérivé. Ne parlons pas des faits, mais d’une mémoire digeste, vendable, qui rassure — et distrait.
Voyez Mme Kallas, désormais directrice orwellienne et officieuse de ce que l’on pourrait appeler l’Unité Mémoire Sélective et des récits Conformes et Acceptables. Le 9 mai 2025, date emblématique pour la Russie, a été prestement escamotée des commémorations. Non pas par oubli, mais par recalibrage géopolitique. Elle n’a pas effacé une date : elle a redéfini le souvenir. C’est cela, Mémoirel : une mémoire politiquement utile, moralement désinfectée, commercialement vendable. Et dans ce monde reconfiguré, le langage suit. Il n’éclaire plus le passé : il l’oriente.
Mémoirel devient une langue en soi. Avec ses locuteurs — les mémoirelisants — et ses dissidents : ceux qu’on appelle encore, faute de mieux, complotistes, rétrogrades, infréquentables. Ceux qui osent penser hors du cadre.
Mais l’ennemi, c’est souvent celui qui se souvient trop bien. Peut-être est-ce vous. Car peut-être, ne serait-ce que par cette lecture, que vous deviendrez suspect, auriez-vous l’outrecuidance d’interroger, d’analyser, voire de croiser les informations. Dans ce cas, méfiez-vous : le souvenir vous expose. Car le passé est devenu flexible, modelable, adaptable. Peu importe que l’Europe paie son gaz trois fois plus cher : la mémoire s’ajuste au marché. Les sanctions contre la Russie auraient-elles un effet boomerang ? L’élite nantie et la structure de l’État profond — financier et technocratique — prétendent savoir mieux que n’importe quel citoyen. Et appliquent leur loi : injuste, cynique, autoritaire.
Un exemple ? En 2025, les mémoirelisants interprètent la colonisation comme un « échange culturel ». L’Histoire devient un diaporama nostalgique.
Dans ce contexte, le Président Macron, le belliqueux, devient le prototype du Mémoirel performatif. Il ne propose plus de récit national : il administre des scripts de résilience. Il proclame : « Il faut regarder le monde tel qu’il est » — mais c’est précisément ce monde qu’il détruit, en désignant l’ennemi, en administrant la peur comme programme social.
Et pendant ce temps, la commissaire européenne aux crises rédige des tutoriels d’apocalypse en PDF. Serviettes converties en filtres à air. Couteaux suisses en accessoires de survie. Kits de 72 heures agrémentés d’un sourire rassurant d’hôtesse en tenue aux tons pastels, le tout sponsorisé — puissamment — par ces 800 milliards fantômes, extraits des poches déjà vides d’une Europe persuadée que l’argent imaginaire suffit à simuler la grandeur.
On croit halluciner. Mais non.
C’est déjà le monde d’après. Celui du Mémoirel total, où tout souvenir doit servir à survivre — mais jamais à comprendre. L’apocalypse devient un tutoriel. Un art de vivre parmi les ruines. L’apocalypse, c’est cool !
Car oui, l’Occident ethnocentré se pense toujours incontournable. Les élites technocratiques, ivres d’une bonne conscience suprématiste, veulent imposer leurs valeurs universelles. Pendant que le reste du monde devient multipolaire, elles gesticulent, déplacent les projecteurs, maquillent.
Elles veulent rester au centre — au moins comme animatrices de la fin du spectacle.
Et c’est là que Mémoirel revient. Non plus comme mot, mais comme grille de lecture. Une matrice par laquelle le souvenir devient arme. Une mémoire domestiquée. Clivante. Stratégiquement utile.
Un monde-forteresse modélisé par les élites, où chacun doit tenir son rôle — à condition de ne plus penser. Les médias accordent la voix unique du récit. Les autres, dissonants, sont réduits à des fous, des suspects, des parias. L’Union européenne imprime des souvenirs modulables, à géométrie variable.
Le prix du gaz a triplé depuis 2022 ? Qu’importe. La mémoire s’ajuste au prix du baril.
Le passé devient une application obsolète — chaque mise à jour efface un bug nommé vérité. Un patch moral.
Et toujours, le même axiome :
Ce que l’on ne peut plus dire, on ne peut plus penser.
Ce que l’on ne peut plus penser, on ne peut plus contester.
Mais La Boétie, le philosophe de la servitude volontaire, l’avait pressenti. Il savait que la soumission commence quand on cesse de se souvenir par soi-même.
C’est pourquoi Mémoirel n’est pas qu’un mot : c’est un outil de domination cognitive.
Il ne brûle pas les livres — il les remixe. Il ne censure pas les commémorations — il les sponsorise. Il transforme la mémoire en marchandise éthique. Et ce faisant, il anéantit sa puissance critique.
La Boétie aurait reconnu, dans les manœuvres de Kallas, les prêches de Macron, les kits pastels de survie, les signes d’une servitude volontaire. On confisque la mémoire. Puis la rage. Puis le langage.
Alors, à ceux qui croient encore que les mots nouveaux ne servent qu’à flatter l’époque, je dis ceci :Non. Parfois, ils sont des armes. Des clés. Des refus.
Ils désignent ce que l’ordre veut rendre indicible. Et Mémoirel, aujourd’hui, est de ceux-là.
Alors, à ceux qui s’agrippent encore au dictionnaire, je dis ceci :
Relisez mes textes. Pas pour leur forme. Pour ce qu’ils tentent de dire — sous la langue. Pour l’esprit.
Et si d’autres mots devaient naître, sachez-le :
Parfois, les mots nouveaux sont les cris des silences passés.Des silences que certains préfèrent enterrer — mais que nous devons garder vivants.
Comment dire l’indicible ? En inventant des mots qui saignent encore.
Cassandre G
Notice sur l'illustration d’Antigone pour Cassandre G
NOOSPEAK : LA LANGUE QUI RÉÉCRIT CE QUI DÉRANGE
« En 2025, l’Europe n’efface plus — elle recompose.
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et les mots, des outils de soumission volontaire.
Résister, c’est inventer des langues qui saignent encore. »