Chevalerie et Côté Obscur : Une lecture monarchique et chrétienne des Sith dans Star  Wars

par Franck ABED
jeudi 24 avril 2025

Depuis sa création, Star Wars fascine autant par ses batailles spatiales que par son riche symbolisme spirituel et politique. Sous les sabres laser et les flottes de chasseurs se cache une puissante allégorie de la chevalerie médiévale et de la tradition monarchique chrétienne. 

Dans cet univers, les Sith et les Jedi ne sont pas de simples adversaires : ils représentent deux façons radicalement opposées d’envisager le pouvoir, l’honneur et le service. Cet article propose de décrypter la figure du Sith à la lumière de la chevalerie chrétienne et de la monarchie de droit divin, pour mieux comprendre comment Star Wars met en scène la chute, la perversion et enfin la rédemption de l’être humain.

Dans la chevalerie médiévale, le chevalier prêtait serment d’hommage à son suzerain : une promesse de fidélité, de protection des faibles et de défense de la foi. Chez les Sith, en revanche, le pacte qui unit l’apprenti à son maître n’est jamais empreint de charité ni d’amour : il est purement instrumental. Le néophyte absorbe une partie de la puissance de son mentor, mais trahit aussitôt ce lien de dépendance en reniant toute forme de miséricorde. Là où le chevalier méritait terre et dignité en servant humblement, le Sith use de la tromperie et de la violence pour s’emparer de la première place.

 

L’épée est pour le chevalier le symbole même de la justice divine  : elle tranche l’iniquité et protège les innocents. Son équivalent galactique, le sabre laser, revêt une fonction sacrée pour les Jedi. Le cristal bleu ou vert qu’ils utilisent est le fruit d’une quête spirituelle et technique, à l’image d’une relique bénite. Les Sith ont quant à eux recours à des cristaux synthétiques, teintés par leur haine et leur colère  : leur sabre rouge devient un instrument de terreur. Là où l’arme chevaleresque est bénie pour défendre le Bien commun, le glaive des Sith se nourrit de l’ombre et rompt la continuité sacramentelle de la tradition chevaleresque.

La monarchie traditionnelle se fondait sur le concept de droit divin  : le roi gouvernait par la volonté de Dieu, mais restait soumis à la loi naturelle et aux contre‑pouvoirs spirituels, notamment l’Église. Dans la galaxie, Palpatine incarne la figure tyran privé de toute légitimité morale  : il se présente comme gardien de la paix, mais étouffe les libertés sous une hiérarchie excessive, rigide et sans contrepoids. Le pouvoir politique, quand il est coupé de sa dimension sacrée, se transforme inévitablement en tyrannie.

Le péché d’orgueil, décrit dans la tradition chrétienne comme la première des chutes trouve un écho frappant dans l’arc narratif de Dark Vador. Séduit par la promesse d’une toute‑puissance, il renie son serment Jedi et trahit ses frères d'arme. Cette trahison rappelle la légende de nombreux chevaliers déchus, qui, par vanité, sacrifient leur honneur au profit d’une ambition délétère. Pourtant, l’histoire de Vador ne s’achève pas dans l’abîme  : c’est en renouant avec son amour paternel et en acceptant le sacrifice ultime qu’il restaure l’équilibre de la Force, tout comme un chevalier repentant revient à son serment pour sanctifier de nouveau son épée.

 

 

Au Moyen Âge, la rédemption d’un chevalier passait par l’humiliation, la pénitence et le service aux plus démunis, symbolisant la conversion du cœur. Dans Star Wars, la réhabilitation de Dark Vador obéit aux mêmes lois spirituelles  : en choisissant de sauver son fils et de renoncer à l’obscurité, il incarne la vertu chevaleresque du sacrifice désintéressé. 

Cette métamorphose souligne que la plus grande force n’est pas dans la domination, mais dans l’abandon de soi pour le bien d’autrui. Star Wars est bien plus qu’un simple space‑opera : c’est une fresque chevaleresque et monarchique, où la lutte entre Sith et Jedi illustre la dialectique éternelle de l’orgueil et de l’humilité, de la tyrannie et du service. 

En revisitant la chevalerie chrétienne à travers le prisme futuriste de la Force, la saga nous rappelle que tout pouvoir, sans serment sincère et sans dimension spirituelle, court inéluctablement vers la corruption. À l’inverse, le vrai pouvoir naît de la fidélité à un idéal plus grand que soi – qu’il se nomme Dieu, peuple ou Force...

 

 


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