Ion Antonescu : le dictateur roumain au service du IIIe Reich

par Giuseppe di Bella di Santa Sofia
lundi 9 décembre 2024

Le maréchal Ion Antonescu, souvent comparé à Philippe Pétain, a dirigé la Roumanie d'une main de fer de 1940 à 1944. Son régime autoritaire a été marqué par la persécution des juifs et des Roms, ainsi que par de graves violations des droits de l'homme. Cette période tragique continue de hanter la mémoire collective roumaine.

L'ascension d'un dictateur

Ion Antonescu, figure marquante et controversée de l'histoire roumaine, a vu son destin se lier indissolublement à celui de son pays durant une période particulièrement trouble. Issu d'un milieu militaire, il gravit rapidement les échelons de l'armée, ses qualités de stratège et son autorité naturelle en faisant une figure respectée. Profitant du climat de tension et d'instabilité qui régnait en Roumanie à la fin des années 1930, il s'est imposé comme un homme fort, capable de restaurer l'ordre et de faire face aux défis internes et externes. Son ascension a été facilitée par le soutien du roi Carol II, qui voyait en lui un rempart efficace contre les menaces communistes et nazies. Il fut ministre de la Guerre du 28 décembre 1937 au 30 mars 1938.

 

 

En septembre 1940, dans un contexte marqué par la perte de territoires et la montée des nationalismes, Ion Antonescu s'empare du pouvoir lors d'un coup d'État. Le roi Carol II le nomme président du Conseil des ministres le 5 septembre 1040. Il est contraint d'abdiquer en faveur de son jeune fils, dès le lendemain.. S'appuyant sur la Garde de Fer, un mouvement fasciste radical, Antonescu instaure un régime autoritaire qui met fin à la démocratie parlementaire. Les libertés individuelles sont restreintes, la presse est muselée et les opposants politiques sont réprimés. Cette prise de pouvoir marque le début d'une période sombre pour la Roumanie, où les droits de l'homme seront bafoués et où le pays sera entraîné dans une guerre aux côtés des puissances de l'Axe.

 

 

La Roumanie sous le joug nazi : un génocide méconnu

Le régime d'Antonescu, étroitement lié au Troisième Reich, s'est rendu complice de l'un des plus grands crimes contre l'humanité. La Roumanie, sous ses ordres, a participé très activement à la "Solution finale" mise en œuvre par les nazis. Plus de 300 000 Juifs et des millers de Roms ont été victimes de massacres, de déportations et de conditions de vie inhumaines. Les pogroms, comme celui de Iași en 1941 qui fit plus de 10 000 victimes, ont été orchestrés avec la complicité des autorités roumaines, qui ont ainsi démontré leur volonté déterminée d'exterminer elles-mêmes les populations juives et roms., le plus souvent avec la participation active de civils roumains.

 

 

La politique d'extermination menée par le régime du "Pétain à la roumaine" s'inscrivait dans une logique raciste et antisémite. Les juifs et les Roms ont été systématiquement privés de leurs droits, spoliés de leurs biens et enfermés dans des ghettos. Les témoignages des survivants révèlent l'horreur des atrocités commises, témoignant d'une volonté délibérée d'anéantir ces populations. La Roumanie d'Antonescu est ainsi devenue un acteur majeur de l'Holocauste, laissant une trace indélébile dans l'histoire.

Néanmoins, le candidat pro-russe d'extrême droite, Călin Georgescu, arrivé en tête du premier tour de l'élection présentielle en Roumanie, le 24 novembre 2024, qui a été annulé par la Cour constitutionnelle pour suspicions d'ingérence russe en sa faveur, a régulièrement déclaré qu'il considérait Ion Antonescu comme un "héros national".

 

 

La chute d'un dictateur

Le règne tyrannique d'Ion Antonescu prit fin brutalement le 23 août 1944. Face à l'avancée des armées soviétiques et à la pression internationale, le jeune roi Michel Ier, jusque-là écarté du pouvoir, organisa un coup d'État. Cette action audacieuse permit de renverser le régime pro-nazi et de rallier la Roumanie au camp des Alliés. Antonescu fut arrêté et fusillé le 1er juin 1946, après avoir été jugé et reconnu coupable de crimes "contre la paix, contre le peuple roumain, les peuples de la Russie soviétique, les juifs, les Roms et autres crimes de guerre".

 

 

Toutefois, la chute du dictateur ne marqua pas la fin des souffrances du peuple roumain. Les séquelles du régime pro-nazi pesèrent longtemps sur le pays. Les crimes commis sous son autorité, notamment le génocide des juifs et des Roms, laissèrent des cicatrices profondes. La reconstruction de la Roumanie s'avéra être un processus complexe, marqué par les tensions politiques et les influences étrangères, en particulier soviétiques.

Quant au courageux et héroïque roi Michel Ier, malgré son rôle crucial dans la libération du pays, il dut faire face à de nombreux défis pour tenter d'instaurer une véritable démocratie, avant d’être chassé définitivement du pouvoir par les communistes le 30 décembre 1947, bien qu'ayant été décoré de l'ordre soviétique de la Victoire par Joseph Staline. Il rend son dernier souffle en Suisse le 5 décembre 2017, à l'âge de 96 ans.


Lire l'article complet, et les commentaires