Aisne : un Gilet Jaune condamné ŕ un an de prison pour une agression au couteau

par Nicolas Kirkitadze
mardi 8 janvier 2019

Combien de fois avons-nous entendu la phrase suivante : "L'assaillant aurait crié Allahu Akbar avant de poignarder la victime" ? Le couteau est pourtant loin d'être une arme exclusive aux jihadistes. D'autres faits divers, tout aussi cruels, sont commis tous les jours avec ces ustensiles de cuisine dont la mission première est de découper les aliments et non son voisin.

Or, on note que quand le couteau n'est pas manié par un islamiste, ça ne paraît pas assez sexy aux médias pour en parler. Ainsi, ces médias ont totalement passé sous silence l'agression à l'arme blanche d'un jeune homme de 22 ans par un individu affublé du désormais mythique gilet jaune. Nul n'en aurait entendu parler si les journaux locaux n'avaient diffusé l'information à travers les réseaux sociaux – la rendant dès lors virale et impossible à arrêter. Merci à eux. Car, l'objectivité n'est pas à sens unique : il est tout aussi condamnable de prêter un méfait à un Gilet Jaune s'il est innocent que de passer sous silence (par peur ou par accointance idéologique) les délits avérés d'un Gilet Jaune lors d'une manifestation.

Les faits remontent à la nuit de la Saint-Sylvestre. Comme partout en France, une vingtaine de Gilets Jaunes étaient rassemblés sur un rond-point de la commune d'Hirson afin d'y réveillonner entre partisans d'une même cause : se donnant ainsi une image d'unité et cimentant leur communauté autour d'une auto-mythification : affronter le froid, la nuit et l'inconfort est un excellent placebo pour se donner un air de guerrier, de gavroche, de sans-culotte bravant les éléments pour une cause que l'on s'imagine noble.

Seulement, ce qui devait être un réveillon jauniste dans la joie et la bonne humeur, s'est vite mué en une soirée sanglante. Tout a commencé à dérailler lorsque, à l'approche de 2019, l'un des participants a proposé d'observer une minute de silence en mémoire des dix Gilets Jaunes décédés depuis le début du mouvement : une idée somme toute honorable si l'on exclut le fait que, dans le récit collectif jauniste, ces morts sont directement imputées à Emmauel Macron et que les victimes sont déjà élevés en "martyrs" de la cause jaune, comme s'ils avaient expressément été tués à cause de leur appartenance au mouvement, alors qu'il s'agit (pour toutes les personnes) d'accidents involontaires – l'une de ces dix personnes a par exemple été accidentellement heurtée par la voiture d'un autre Gilet Jaune. Et il faut aussi noter les victimes "collatérales". Ainsi, toujours dans l'Aisne, un conducteur a accidentellement provoqué la mort de sa compagne en prenant une route à contresens pour éviter un barrage jauniste. Il serait tout aussi inapproprié d'imputer la mort de cette femme aux Gilets Jaunes que d'imputer la mort des dix manifestants au gouvernement.

Quoi qu'il en soit, la minute de silence qui devait être un hommage tout à fait compréhensible aux compagnons défunts ne s'est pas déroulée comme prévue. Il faut tout d'abord rappeler qu'une quinzaine de personnes (extérieures au mouvement) s'étaient jointes au groupe afin de témoigner leur soutien. Parmi eux, un jeune homme de 22 ans visiblement éméché (les témoins rapportent que l'alcool avait coulé à flots en ce soir de réveillon) qui ne s'est visiblement pas rendu compte que l'hommage avait débuté et a continué sa discussion avec deux de ses amis aussi vêtus de gilets jaunes. Une attitude jugée comme une profanation de la cause jaune par un militant zélé qui a sorti son couteau pour le plonger dans les boyaux de l'hérétique afin de lui faire expier son impénitence.

Toutes les versions ne concordent pas : d'après certains témoins, l'assaillant aurait poignardé le jeune homme de 22 ans sans préavis, d'autres affirment qu'il y a eu une altercation qui a dégénéré. Quels qu'en soient les détails, le couteau de l'agresseur a raté de peu l'artère fémorale de la jeune victime qui a néanmoins été sérieusement blessée, au point qu'il a fallu le transporter à l'hôpital où il a été soigné en urgence par une équipe médicale dont la dextérité a permis d'enrayer la gravité de la blessure. Le jeune homme a malgré tout eu dix jours d'incapacité totale de travail, c'est dire si la blessure n'est pas légère.

Placé en garde à vue, l'assaillant n'aurait montré aucun remord ou compassion envers sa victime. Il a été déféré au parquet au bout de quarante-huit heures et jugé en comparution immédiate. Contrairement aux réquisitions du procureur, qui demandait une peine de deux ans, le juge s'est montré assez clément, n'infligeant qu'un an de détention pour port d'arme illégal et blessures volontaires. En comparaison, un alcoolique qui a poignardé sa belle-mère à Cherbourg vient d'être condamné ce 7 janvier à 18 mois de prison ferme : soit six mois de plus avec un seul chef d'accusation tandis que notre Gilet Jaune était jugé pour deux délits (l'agression et le port d'arme illégal). Nous ne saurons donc jamais pour quelle raison il s'est senti obligé de se rendre armé à une soirée de réveillon…


Lire l'article complet, et les commentaires