La FFF passe de la pantalonnade au déballonnage

par LM
jeudi 20 avril 2006

La Fédération française de football tente le ridicule, en rendant aux Marseillais le point qu’ils avaient gagné et aux Parisiens celui qu’ils avaient perdu. Rocheteau semble bien isolé, sur son aile.

Soyons sport, comme dirait Patrick Montel, inénarrable présentateur de la plus pitoyable émission de sport actuellement diffusée à la télévision. Pire que Stade 2. Soyons sport, donc, et la Fédération française de football de Jean-Pierre Escalettes l’a été, en rendant justice aux jeunes et méritants Marseillais qui étaient venus se décarcasser pour arracher un point au Parc des princes face à de moins jeunes et un peu moins méritants Parisiens, dans ce qui devait être un choc au sommet et s’est avéré devenir une redoutable pantalonnade de Ligue 1.

PSG-OM, match retour, c’était il y a quelques semaines déjà, mais depuis il y a eu la réunion spectaculaire du Conseil national d’éthique de Dominique Rocheteau, qui s’est réuni pour décider, dans un élan moral et patriotique sans doute, de sanctionner tout à la fois les dirigeants des deux clubs, qui le méritaient bien, et les joueurs des deux clubs, qui le méritaient moins. Quelques jours après la sanction, l’ancien ailier des verts s’était fendu d’un « on veut faire peur » qui aurait arraché un frisson de terreur au plus aguerri des danseurs étoiles de l’Opéra de Paris. (Saint Germain.)

Seulement voilà, à trop vouloir faire peur, l’ancien frisé des albums Panini s’est un peu pris les pieds dans le tapis (vert). Et hier, la fédération, statuant sur l’appel interjeté par les deux clubs concernés, a décidé de rendre aux joueurs ce qu’ils avaient gagné dans la plus parfaite légalité sur la pelouse. Un point, donc, de plus pour l’OM, qui revient à trois points de la Ligue des champions, un point de plus pour le PSG, qui revient à cinq points de l’UEFA. Chacun sa coupe. La Fédé n’a pas fait dans la demi-mesure, Rocheteau est taclé sévère, même pas par derrière, mais sévère quand même, même si les sanctions prononcées contre les deux présidents sont maintenues.

A la pantalonnade du Parc, la Fédération française de football, donc, dans son immense sagesse, a ajouté la pantalonnade du tapis vert. Un déballonnage spectaculaire qui renvoie l’éthique aux oubliettes. Or, comme le dirait Patrick Montel (difficile d’écrire ça sans rire) et Gérard Holtz (très fort le Gégé aussi pour les leçons de morale façon pensionnat jésuite), sans éthique, quel sport allons-nous voir ? Car enfin, peut-on laisser des équipes fausser un championnat sous prétexte qu’ils estiment que leurs supporters ne voient pas leur sécurité assurée en cas de déplacement ? Peut-on laisser des présidents de club décider du sort d’un match ? Peut-on laisser le PSG ne pas trouver la force ( pas dit : le talent) de battre une équipe de minots marseillais même pas bien classée dans son championnat de CFA ? Patrick Montel a des cheveux à se faire.

Il va devoir, encore une fois, faire appel à son redoutable consultant, Francis Lalanne, pour dénouer cet embrouillamini. Et répondre à quelque questions essentielles : l’OM est-il un club normal ? Le PSG va-t-il désormais devoir chaque soir manger au Buffalo Grill ? Dominique Rocheteau est-il encore crédible dans son Conseil national de l’éthique ? Oui, répond ce dernier, qui après avoir digéré le point perdu-retrouvé, a déclaré qu’il était convaincu d’avoir « envoyé un signal fort. » Il aime bien les phrases slogans, Rocheteau, « On veut faire peur », « On a envoyé un signal fort », il en fait finalement beaucoup plus que sur le terrain à l’époque, où il ne s’embarrassait pas trop de fioritures, traçait son chemin droit vers le but, poteaux carrés ou pas. Bon, alors, deux points retirés par ci, deux point remis par là, on fait quoi maintenant ? On rejoue ? Et pourquoi pas ? Manque de pot pour tous les partisans d’un parcours « à la Calais » chaque année en Coupe de France, cette année, cette épreuve, largement dévaluée depuis dix ans, faute d’une implication suffisamment grande des clubs de l’élite, cette année donc, le PSG et l’OM sont toujours présents au stade des demi-finales. Jeudi soir, on saura si la Coupe s’offrira une de ses plus grandes finales depuis dix ans. Voire quinze.

Une finale qui serait alors pleine de peurs plus ou moins fondées, de CRS très mobilisés, de messages haineux d’un virage de tribune à l’autre, d’enjeu colossal en tout cas pour deux clubs qui, grosso modo, ont vécu une saison très moyenne. Mais une finale qui pourrait aussi bien se jouer... à huis clos. Oui, parce que dans sa vertigineuse sagesse doublée d’un sens aigü de la justice, Rocheteau et son Conseil national d’éthique ont demandé aux dirigeants marseillais et parisiens de « s’entendre » pour qu’à l’avenir une telle « situation » ne se reproduise pas. Faute d’entente, parmi les sanctions envisagées, on parle de futurs matchs au sommet à huis clos.

Donc, rions un peu, envisageons cette finale de Coupe de France à huis clos, 80 000 places vides à Saint-Denis, franchement, ce serait grandiose, non ? L’heure de gloire de l’éthique, de son Conseil, de Rocheteau et de Patrick Montel. Bon, bien sûr, Rennes et Nantes ont autant de chance de briller et de se retrouver à la fête, mais bon, on peut toujours rêver, et espérer que par respect pour la décision (cocasse) courageuse de la Fédération française de football, le PSG et l’OM soient à la hauteur de leur mauvaise réputation. Deux points, c’est tout.


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