Seine-Saint-Denis : Les expulsions se multiplient

par Pierre
vendredi 26 août 2011

Deux expulsions de grande ampleur, à Bagnolet le 22 juillet, et à Montreuil le 30, témoignent d’une période de l’année propice à ce genre de décisions. Une manœuvre qui se répète tous les étés mais qui trouve un écho particulier cette année.

A Bagnolet, le 22 juillet, une vingtaine de ménages ont été expulsés de leur bâtiment au 178 rue Robespierre, qui était occupé illégalement depuis 14 ans. Aucune solution d’hébergement d’urgence n’a pu être proposée aux expulsés. Cet incident survient dix-huit mois après l’expulsion au bulldozer, dans la même ville, en plein hiver, des occupants du 92 rue Victor Hugo, qui attendent toujours les 50 logements sociaux promis alors.

Samedi 30 juillet, la police intervenait pour libérer les locaux du 94 rue des Sorins, à Montreuil, des 218 squatters qui les occupent depuis 2008. Depuis, les squatteurs se sont installés dans le square attenant. Un collectif de soutien s'est créé et a distribué un tract le lendemain de l'expulsion dans lequel il explique avoir fait des travaux d'aménagement du site avec l'accord de la mairie. Dominique Voynet, maire de Montreuil, en appelait alors dans un communiqué « l'Etat à prendre ses responsabilités et à proposer des solutions de relogement dignes aux occupants du squat ». 

Une période favorable aux expulsions

Selon les associations, la période de l’été est plus propice aux expulsions des familles. Les ralliements contre les expulsions trouvent en effet souvent leur force autour de l’école où étudient les enfants menacés. Les mois d’été, la mobilisation est ainsi moins forte, et les associations et les médias moins réactifs. Les associations soulignent aussi une recrudescence en octobre, avant la trêve hivernale.

Les expulsions illégales

A Montreuil encore, les 23 et 24 juillet, de jeunes militants politiques, précaires et chômeurs, se faisaient expulser manu militari d'une maison au 74 rue des caillots qu'ils occupaient illégalement depuis 2007. Un fait divers qui a fait le tour du web avec une vidéo qui montre des hommes armés de barres de fer entrer de force dans la maison, la saccager, et frapper ses occupants. Les squatteurs n'avaient reçu aucune lettre de mise en demeure de la part de la préfecture.

Dans une interview accordée à 93-Infos, Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l’association ‘Droit au Logement’ (DAL), souligne que ces méthodes illégales d’expulsion musclées sont en augmentation en Seine-Saint-Denis. L’association a même alerté le Préfet à ce sujet. (en attente de preuves)

La situation en Seine-Saint-Denis

Il existe, selon le DAL, 20 000 ménages en situation précaire en Ile-de-France, en droit d’obtenir un logement dans le cadre de la loi du droit au logement opposable (DALO), votée en 2007. Jean-Baptiste Eyraud explique la situation particulière en Seine-Saint-Denis par la rigidité de la Commission de médiation, chargée d’attribuer des logements sociaux en urgence. Selon le DAL, depuis le 1er janvier 2011, au niveau national, 45% des demandes ont abouti, contre 28% en Seine-Saint-Denis. « Très précisément, 10102 refus pour 3993 avis favorables, dont 2353 familles toujours en attente d’un logement.[…] Certaines familles se sont vues recevoir un avis négatif, pour des motifs jugés irrecevables par le Tribunal Administratif. Obligée de traiter à nouveau le dossier, la Commission a même refusé certains dossiers une deuxième fois, pour les mêmes motifs illégaux ! »

Ces difficultés se couplent désormais aux coupes budgétaires affectant le Samu Social, votées en mai 2011, concernant l’hébergement d’urgence. A titre d’illustration, la Seine-Saint-Denis a vu son nombre de places hôtelières réservées aux plus précaires passer de 1800 à seulement 900, toujours selon le DAL, et le Samu Social affirme avoir dû restreindre ses veilles à 5 soirs par semaine en Seine-Saint-Denis, là où il assurait un service continu avant le mois de mai.

Les solutions

Selon le porte-parole de l’association, « il faudrait que l’Etat et le Département répondent à leurs obligations, tout simplement. Les lois existent, elles sont juste bafouées. » Le DAL a ainsi obtenu la condamnation du Conseil Général de Seine-Saint-Denis, qui a obligation de ne plus suspendre de logement pour les familles concernées par le dispositif, depuis le 1er juillet 2011.

Jean-Baptiste Eyraud rappelle que depuis de nombreuses années, les associations de mal-logés font pression sur l’Etat pour la réquisition des logements vacants, estimés à 320 000 en IDF par le DAL [L’INSEE en dénombrait 410 000 en 1999].

 

Liens Legifrance :

la loi DALO : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000271094

la Commission de médiation : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000020466048&cidTexte=LEGITEXT000006074096&dateTexte=vig


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