Palestine un « génocide » en cours avec l’assentiment de l’Occident

par LATOUILLE
jeudi 19 octobre 2023

Quatre compères de malheur se sont réunis dans une même idée : aider Israël à asphyxier, à étouffer Gaza ! Emmanuel Macron (président de la République française), Jo Biden (président des États Unis d’Amérique), Olaf Scholz (chancelier de la République allemande) et Rishi Sunak (Premier ministre de Grande Bretagne) ont proposé, pour les uns, que l’Europe cesse son aide financière à Gaza, pour l’autre de participer activement au blocus maritime dans le cadre du siège complet de Gaza mis en place par Israël.

Tous parangons de vertu comme chacun le sait, leur stratégie pour contraindre les gouvernants qui ne leur conviennent pas c’est d’affamer les peuples. Ils l’ont mise en œuvre contre la Russie, contre l’Afghanistan, et d’autres ; c’est la stratégie dite des sanctions. Ces sanctions visent à entraver la vie économique du pays et, par conséquent, de rendre difficile la vie des habitants ; ce faisant la bande des quatre espère que, étant affamée, la population se retournera contre ses dirigeants. En Afghanistan c’est la suspension des aides « humanitaires » et financières qui a été mise en œuvre pour un pays dont l’économie en dépend presque totalement. Or, bien que l’histoire montre que cette stratégie n’amène jamais de révolte populaire contre leur gouvernement, c’est cette même stratégie qu’ils proposent aujourd’hui en confortant, une fois encore, Israël dans sa politique génocidaire. Car il s’agit bien pour les édiles israéliens et sans doute pour une large partie de la population israélienne d’éradiquer, au-delà du Hamas, Gaza de la carte du monde et se débarrasser des Palestiniens. Pour autant n’omettons pas de rappeler que le cœur du projet du Hamas est bien de supprimer Israël et ses habitants de cette partie du Moyen-Orient, et sans doute au-delà. Allons-nous laisser jouer ce jeu ignoble ?

L’attaque perpétrée par le Hamas est un crime odieux, inexcusable ; inexcusable mais explicable car un évènement ne surgit jamais de nulle part mais est toujours issu d’un contexte. Soutenir inconditionnellement Israël, interdire en Europe les manifestations de soutien au peuple palestinien c’est nier ce contexte historique, social et politique ; c’est une faute morale qui entachera l’image des hommes politiques et celle des pays qu’ils représentent et une faute politique parce que ce faisant ils entravent voire ils empêcheront toute possibilité de recherche d’une paix durable. Depuis l’erreur des accords Balfour et la création incohérente de l’État d’Israël en 1948 les gouvernants occidentaux n’ont jamais cessé leur soutien inconditionnel à Israël, niant l’existence de la Palestine et des Palestiniens. Combien de fois a-t-on entendu : « Israël a le droit de se défendre », combien de fois n’a-t-on pas entendu « les Palestiniens sont spoliés de leur terre, sont quotidiennement humiliés… » ? Or, il n’y a pas d’entente possible, donc de paix, si on ne « reconnaît pas qu’une vie vaut une autre vie »[1]

Israël est, sinon plus, du moins autant l’enfant des gouvernants occidentaux qu’il n’est la conséquence du sionisme. L’attaque du Hamas odieuse par les morts qu’elle a faits, et aussi un rappel de l’histoire et un renvoi des Occidentaux vers une histoire qui leur colle à la semelle ; ils ont désormais à gérer leur histoire : le colonialisme, la traite des noirs, le massacre des Indiens d’Amérique du Nord, la guerre du Vietnam, le massacre des Tutsi au Rwanda largement couvert par le silence de la France, la Deuxième Guerre mondiale voulue par l’Allemagne et sa cohorte d’exactions dont la Shoa sur laquelle ils ont largement fermé les yeux quand ils n’ont pas collaboré durant la période de la guerre.

Pour expier cette partie de leur histoire les quatre ont donné un territoire au projet sioniste, à l’époque déjà vieux de presque un siècle, au sortir de la deuxième guerre mondiale. Par la suite ils n’ont jamais cessé de soutenir Israël même (surtout) quand le pays ne respectait pas les résolutions de l’ONU que pourtant les quatre avaient approuvées (Histoire de la question de Palestine - Nations Unies - La question de Palestine). Ce faisant ils ont engendré la « question palestinienne », et ils oublient que leur politique a entraîné en 1948 le déplacement de millions de Palestiniens et ouvert la voie à la colonisation de leur territoire par Israël. Aujourd’hui, veulent-ils profiter de l’excuse de légitime défense qu’ils octroient à Israël pour se débarrasser de la question palestinienne en laissant exterminer les habitants de Gaza que le siège mis en place par Israël prive d’eau potable, d’électricité avec outre les conséquences sur la vie quotidienne celles sur les hôpitaux, puis très vite apparaîtra le manque de denrées alimentaires…

Y a-t-il du sens « humain » dans de tels projets, pire dans leur mise en œuvre ? Quel sens, et quelle efficacité politique, à répondre à une attaque terroriste aussi meurtrière soit-elle par l’extermination d’une population ?

La bande des quatre peut-elle soutenir inconditionnellement une action qui ressemble tellement à celles qu’elle condamne de la part de la Russie en Ukraine et de l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh. Car n’est-ce pas soutenir inconditionnellement Israël lorsque le président américain se rend en Israël et participe à la réunion du cabinet de guerre, formé par le Premier ministre Nétanyahou ? N’est-ce pas prendre part et parti dans cette « guerre de vengeance » lorsqu’on envoie des armes, qu’on positionne des navires de guerre en face des côtes de Gaza et qu’on met en état d’alerte 2000 soldats. N’est-ce pas donner un blanc-seing à Israël lorsqu’en France on interdit toute manifestation, tout soutien à la Palestine et aux Palestiniens, qu’on expulse une militante de la cause palestinienne : « Mariam Abou Daqqa (âgée de 72 ans) a été interpellée à la gare Saint-Charles tôt lundi 16 octobre et assignée à résidence dans un hôtel à Marseille. Désormais promise à l’expulsion du pays, elle était présente dans le département depuis plusieurs jours, déclenchant au passage la polémique avec des demandes d’interdiction formulées par le Rassemblement national. » (Source Médiapart) Le président Biden a mis une semaine avant de rappeler à Israël l’importance du droit humanitaire international, la France n’a pas fait mieux, mais l’un et l’autre pays sont dans l’incohérence totale : comment rappeler l’importance du droit humanitaire international alors qu’en même temps on arme un des belligérants. Jonathan Cook, journaliste indépendant (www.jonathan-cook.net) écrivait dans Middle East Eye le 8 octobre : « L’hypocrisie de l’Occident à l’égard de l’invasion de Gaza est à vous retourner l’estomac. Il y aura peu de sympathie en Occident alors que, une fois de plus, les Palestiniens assiégés sont bombardés par Israël, leurs immenses souffrances étant justifiées par le terme de « représailles israéliennes » Nous sommes dès lors en présence de l’hypocrisie de l’Occident envers l’invasion de Gaza qui est révoltante. Quelle « urgence » y avait-il à se précipiter dans un soutien inconditionnel à Israël ? L’urgence des Palestiniens qui demandent le droit de ne pas vivre comme des prisonniers dans leur propre patrie ? Pour Jonathan Cook « Les Israéliens et les Occidentaux peuvent continuer leur gymnastique mentale pour justifier l’oppression des Palestiniens et leur refuser le droit de résister. Mais leur hypocrisie et leur aveuglement sont exposés à la face du monde. »

On ne combat pas la violence par une autre violence, toute victoire obtenue par la violence n’est que provisoire. Comme l’écrit l’éditorialiste du Foreign Policy, le 13 octobre, « La vengeance n’est pas une politique. Les réactions émotionnelles de Washington n’empêcheront pas de futures violences. Le démantèlement de la prison de Gaza pourrait le faire. » Mais, comment faire entendre cela à des gens qui ont tellement conduit d’actions violentes dans le passé ; mais, comme le disait Bergson : « L’œil ne perçoit que ce que l’esprit est prêt à comprendre ». Comment comprendre sereinement lorsque l’exaction de l’un permet aux autres de cacher leurs méfaits passés mais jamais lavés ?

On voit bien, même s’il faudrait pousser plus loin la réflexion, que si la violence n’est jamais excusable pour autant elle n’est pas dénuée de raison d’être, de fondement. Dans ce cadre, si on me permet l’expression, les torts sont partagés par de multiples acteurs autour de multiples causes. C’est pour cela, pour ne pas prendre sa part de responsabilité dans l’émergence d’une action violente, qu’on se cache derrière des slogans souvent simplistes mais qui frappent les esprits comme terrorisme ou derrière des faits passés forts en émotion comme la Shoa. Cette dernière, à laquelle il ne faut rien enlever de l’horreur qu’elle représente, est largement instrumentalisée dans la propagande Israélienne et au-delà par les gouvernements en lutte plus ou moins ouverte contre « l’islamisme » lui-même mot « pudique » pour cacher le rejet de tout ce qui peut être musulman, arabe… Comme en France la laïcité : que cache l’étendard de la laïcité ? Ainsi le recours à l’usage du mot « terrorisme » permet d’éluder les vrais problèmes et les questions fondamentales.

Dès lors ces quelques réflexions posées nous sommes en devoir de nous demander avec Jonathan Cook (le 17 octobre) : « Pourquoi nous sommes toujours en guerre ? Nos dirigeants veulent que nous encouragions une nouvelle guerre, car elle les enrichit et nous divise. Il y a des raisons pour lesquelles l’Occident mène continuellement des guerres, ou les alimente. Pensez à l’Afghanistan, à l’Irak, à la Libye, à la Syrie, à l’Ukraine, à Gaza – tous au cours des deux dernières décennies seulement. L’une des raisons est qu’il y a beaucoup d’argent à gagner grâce à la guerre – du moins si vous appartenez à la classe dirigeante. […] Mais il y a une autre raison. Si nous n’étions pas en guerre, si une nouvelle guerre ne dominait pas toujours les gros titres de la presse, nos pensées et nos passions, nous rendant indignés ou craintifs pour l’avenir, nous aurions l’espace mental et l’énergie nécessaires pour penser à autre chose. Par exemple, à quel point nos sociétés sont mal gérées, à quel point l’écart de richesse ne cesse de se creuser, à quel point nos dirigeants semblent incompétents et à quel point peu est fait pour résoudre les plus grands problèmes auxquels nous sommes confrontés, comme l’effondrement écologique. »

Peut-être même pourrions-nous mettre en œuvre la pensée de Iain S. Thomas[2] : « Tu peux embellir le monde en refusant de mentir à son sujet. » et nous mettre sous la bannière de Albert Camus : « La paix est le seul combat qui vaille d’être mené ».

 En attendant cette embellie qui tarde, faute de courage de la part des hommes et à cause de l’hypocrisie (aussi de leur sottise, de leur inculture et de leur inhumanité) Gaza est écrasée, réduite en cendre et en poussière, des milliers d’enfants, de femmes, de vieillards, de handicapés et de malades, meurent sous les bombes Israéliennes, et ceux qui survivront aux bombes n’auront qu’un court sursis avant de mourir de faim et de soif à cause du blocus autorisé par les gouvernements occidentaux au nom d’une « légitime défense » qui arrange bien leurs propres affaires rarement aussi propres qu’ils le prétendent.

Emmanuel Macron (président de la République française, Jo Biden (président des États Unis d’Amérique), Olaf Scholz (chancelier de la République allemande) et Rishi Sunak (Premier ministre de Grande Bretagne), Ursula von der Leyen (présidente de la commission européenne) et d’autres cachés derrière les plus « célèbres » : vous porterez la responsabilité du massacre de millions de Palestiniens !

 

[1] In le Monde du 16 octobre 2023 : Guerre Israël-Hamas. Pour défendre le paix il faut d’abord reconnaître qu’une vie vaut une autre vie.

[2] Poète d’origine sud-africaine, auteur et créateur du projet à succès international I Written This For You


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