Ne pas savoir attendre

par C’est Nabum
mercredi 12 avril 2023

 

Impatience...

 

Un rendez-vous capital se profile à l'horizon, il aura lieu dans quelques heures qui pour l'instant vous paraissent des années. Vous ne pensez plus qu'à ce moment tant espéré, il envahit vos pensées, vous interdit de faire quoique ce soit en attendant cet instant qui se fait tant attendre.

C'est à devenir fou, plus rien n'a d'importance. Le regard obnubilé par la pendule qui a cessé de tourner à son allure habituelle, vous sentez bien que le maître des horloges vous joue un vilain tour ; le temps s'écoule désormais au ralenti à moins qu'il n'ait cessé de poursuivre son cycle immuable.

Vous en êtes désormais certain, quelque chose s'est détraqué dans l’univers. Tout s'est figé pour engluer votre existence dans une suspension des secondes totalement irrespirable. C'est à devenir fou, c'est une torture insupportable auquel vous vous condamnez stupidement, le regard fixé sur un compte à rebours qui se refuse à progresser.

Que faire en attendant ? Comment se libérer de ce poids qui vous étreint, vous interdit de penser à autre chose, vous fait devenir chèvre, tournant en rond comme un lion en cage ? Plus rien n'est possible : lire ou une quelconque autre occupation se refusent à vous. Votre idée fixe a scotché les aiguilles et la marche du temps. Vous ne pouvez vous sortir de ce blocage qui vous rend fou.

Respirer vous devient pénible, penser impossible, vous occuper un défi. Il n'est rien d'autre à faire que d'attendre. C'est interminable, intolérable, insupportable, invivable. Il y a de quoi s'arracher les cheveux. L'enfer sur terre dans ces heures qui ne s'égrènent plus. Vous voudriez être plus vieux, abolir ce délais hideux, douloureux, mortifère.

Écrire ? Sera-ce la solution ? Le moyen de fuir ce blocage, d'oublier ces heures suspendues à une vaine attente ? Il n'est pas certain que ce soit le meilleur moyen. Là aussi se joue la ronde des temps y compris à tous les modes. Il eut fallu que vous vous accordassiez un répit, une feinte pour tromper votre attente par un dérivatif illusoire.

Au lieu de quoi vous vous fracassez sur cette page blanche qui se refuse à déchirer le voile du temps qui passe. Vous n'avez rien à raconter, il n'est pas d'autre souci, d'autre préoccupation que ce rendez-vous qui vous obsède. Il convient pourtant de jouer la montre, de tuer ce temps déjà mort pour vous.

Seul le silence ponctue vos désespérances. Nulle musique, nulle conversation ne permettent d'échapper à ce gouffre temporel dans lequel vous perdez pied. C'est à bout de force et d'espoir que vous vous rendez compte qu'enfin, le moment est venu. Même plus encore, à trop le réclamer, à chercher à sans cesse le faire surgir, vous avez laissé son heure.

Il n'est que temps de le rattraper. Votre retard serait plus épouvantable que cette avance sur sa quête qui vous a laissé coi. Mais si avant l'heure, et vous l'avez éprouvé au plus intime de votre être, ce n'est pas encore l'heure, après, c'est déjà trop tard. Vous avez manqué le train, perdu sur votre clavier à vouloir rendre compte de ce malaise temporel.

L'espoir est parti. Seul vous restez avec votre désespoir. À trop attendre, vous avez laissé passer la bonne heure à moins que ce ne soit le bonheur qui à jamais se dérobe à vous. Vous allez vous faire remonter les bretelles, il eut mieux valu que ce ne fussent les pendules.

À contre-temps.

 


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