Un coup de tonnerre pour qui reste en rade

par C’est Nabum
vendredi 29 septembre 2023

 

Le couac final…

 

Décidément, il se passe toujours quelque chose sur le Festival de Loire. Jusqu'au dernier moment nous ne sommes pas à l'abri d'un coup de tabac ou d'un de ces fameux grains qui permettent de reconnaître les véritables marins. Il se peut aussi que mettre de vieux loups de mer, héritiers des forçats d'antan sur une eau douce et tumultueuse puisse finir par leur faire éprouver l'envie de mettre enfin leur grain de sel.

Ils le firent de façon spectaculaire au sens propre comme au sens figuré même si je doute en la circonstance que le sens de la mesure et de la nuance fut leur fort. Excédés sans doute de voir leur cher Curragh macéré dans une eau trop douce, ils décidèrent de mettre de l'eau de vie dans leur vin pour s'empresser de quitter le quai.

Il est vrai que laisser en rade les princes du tonnerre finit par leur tournebouler l'esprit qu'ils ont près du bonnet. En un éclair, ils se mirent en vedette, voulant crever l'écran ou l'abcès afin qu'enfin tous les regards se braquent sur eux. Le marin peut parfois se montrer cabotin même s'il ne navigue pas sur un caboteur c'est ce qui finit par advenir en cette clôture de Festival.

Alors qu'un trio auquel ils n'entendaient rien continuait d'amuser la galerie, il leur prit le désir de sortir leur chère embarcation de ce cloaque fluvial. L'envie du large leur tourna la tête au point de trouver la fuite côté levant, ce qui leur faisait tourner le dos à leur cher Océan. Se souciant comme de colin tampon des trois guignols et désirant leur voler la vedette, c'est dans une tenue typique de la (grande) Bretagne que l'un d'eux se mit en évidence.

Ne se contentant pas de son grand ramdam, l'individu chaloupant sur la rive souhaita gagner la cale en glissant son frêle esquif sur un chariot à roulettes tout en passant sur les câbles de la sonorisation. C'est ce petit détail qui mit le feu aux poudres et servit de point de départ à une bataille navale, clou du Festival.

L'irascible navigateur essuya la remarque ferme mais aimable du sonorisateur de différer son départ jusqu'au terme du concert. Qu'un cul terreux puisse lui donner un ordre déclencha dans l'instant une tempête dans ce crâne surchauffé par un soleil puissant. Il fit face à l’imprudent poupe contre poupe, front contre front, apparemment décidé à passer en force. Les musiciens passèrent à l'abordage pour venir en aide à leur technicien.

Les noms d'oiseaux volèrent. Les menaces claquèrent dans le vent d'ouest. « Malheur à vous si vous venez chez nous. Il vous en coûtera ! ». Le propos sentait plus les bas-fonds et la vase que les embruns. Pendant ce temps, un beau parleur amusait les spectateurs afin que la scène tragiquement désolante fût prise à la dérision par ceux qui étaient aux premières loges. Les rires fusèrent ce qui était certainement bien mieux que les horions.

L’irascible dut rebrousser chemin, persuadé en son for intérieur qu'il était dans son bon droit. Il en va souvent ainsi de ces gens qui abolissent ceux qui les entourent lorsqu'ils se prennent pour un phœnix à la face rubiconde. Il avait pour le moins réussi son coup de Trafalgar, sa tenue écossaise lui donnant sans doute l'illusion de la supériorité navale, en mettant un terme à un spectacle qui ne pouvait continuer après cette sournoise attaque.

Le but ultime de cette poussée d'adrénaline de la part de ce mauvais coucheur était de démontrer à tous que l'Arsenal conservait une force de frappe qui méritait le respect au lieu de quoi il fut le dindon de la farce, se ridiculisant devant des spectateurs outrés par son comportement. Le technicien sortit la tête haute de cette algarade.

Le festival s'achevait pour les Souffleurs de Vent par une petite risée dont ils se sortirent sans dégâts. Seul l'indélicat moussaillon restera à jamais la risée de ce coup de force dérisoire. Bon vent à lui, il sera ainsi notre contre-point d'orgue d'une aventure haute en couleur qui n'avait nullement besoin de cette conclusion détestable.

À contre-temps.

 


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