C’est grâce au communisme et à l’URSS que le capitalisme était plus humain

par Robert GIL
lundi 6 mai 2024

Je lis ou j’entends parfois des absurdités contre lesquelles il est difficile de répondre tant c’est absurde « C’est le capitalisme qui a mis fin à la famine sur terre », « c’est le capitalisme qui a éradiqué la pauvreté », « seul le capitalisme peut empêcher la guerre », « aux États-Unis, même les pauvres sont riches », « Le capitalisme, c’est la liberté, en France le modèle de société socialiste est une tyrannie » j’en passe et des meilleurs. Comment peut-on dire ou écrire ou penser de telles idioties ? Ce qui fait peur, c’est que la plupart de ces personnes sont persuadées de la justesse de leur propos. Pour la plupart ce sont des personnes de plus de 50 ans qui sont restées bloquées à une période où le capitalisme ne pouvait pas exploiter sans entrave, à une période où le capitalisme était obligé de s’autocensurer. Ces personnes ont cru de bonne foi que la prospérité et l’amélioration de leurs conditions de vie étaient les conséquences directes du capitalisme. Elles se sont contentées de « profiter », sans se poser la question de savoir pourquoi, de savoir comment cela était possible. La période des Trente glorieuses, qui est aujourd’hui considérée comme une des périodes les plus fructueuses du capitalisme, a en fait été une anomalie, contrainte par des éléments extérieurs, ce n’était en aucun cas une tendance capitaliste normale. Le taux d’imposition des plus riches étaient de 60% pendant les Trente glorieuses (1). Le capitalisme n’est pas bienfaisant, s’il est libéré de ses entraves, c’est un monstre !

Le capitalisme n’a jamais rien octroyé de gratuit, tout ce qu’a obtenu la classe ouvrière est le fruit de luttes, suivies de répression et parfois de morts. Après la fin de la seconde guerre mondiale, et jusqu’au début des années 1980, les concessions du capitalisme occidental ne peuvent s’expliquer sans tenir compte de la pression exercée sur le capitalisme à la fois par l’existence de l’Union soviétique en tant que modèle alternatif de société, et par des partis de gauche forts, surtout communistes, liés aux syndicats dans les principaux pays d’Europe. Les capitalistes craignaient les revendications, les manifestations, les émeutes et la prise de pouvoir de partis qui remettraient en cause la doctrine même du capitalisme, la remise en cause de la propriété des moyens de production et de la répartition des richesses produites. En ce sens, les régimes communistes et les partis de gauche ont apporté, malgré eux, au capitalisme et aux capitalistes un soutien indirect, en les poussant à réformer le système, à refréner leur cupidité et à prendre conscience qu’en l’absence de politiques sociales fortes, ils risquaient d’être submergés. Les politiques sociales ont été plus fortement développées dans les pays où les partis communistes étaient importants et où la menace de l’Union soviétique était plus grande. En France et en Italie, par exemple, les parties communistes représentaient autour de 20 % des intentions de vote.

La peur d’une expérience soviétique en Europe a eu un impact important, promouvant indirectement des politiques qui n’auraient jamais vu le jour autrement, et qui auraient été rejetées d’emblée par la classe capitaliste. Mais avec la montée de l’économie néolibérale après 1980, et la chute du mur de Berlin en 1989, le capitalisme est revenu à ses pulsions originales, un capitalisme débridé, sans aucune contrainte. Et s’il n’accepte pas de frein à ce qui peut être marchandisé, s’il considère comme un droit divin le fait de pouvoir s’enrichir sans limite, il se dirige inexorablement vers une augmentation des inégalités, et la répétition de crises. De crises en crises, on peut aussi se diriger vers des guerres.

Paradoxalement, la pression communiste, si elle a obligé le capitalisme à lâcher du lest, elle a laissé la population penser que le capitalisme était fondamentalement « bon ». Effectivement, grâce à la lutte des classes, les revenus réels avaient augmenté, les conditions de vie s’étaient améliorées, et une partie de la population a cru que le rôle du parti communiste était tout simplement obsolète. Quand est arrivé le tournant néolibéral du milieu des années 1980, grâce à la droite socialiste, la taille de la classe ouvrière avait déjà diminué, le pouvoir des syndicats disparaissait, le parti communiste était marginalisé. Le néolibéralisme s’est senti enhardi par la dynamique interne qui asphyxiait la classe ouvrière, puis par la chute précipitée de l’Union soviétique et du communisme. Une fois que le capitalisme s’est retrouvé sans rival, il est rapidement revenu à ses politiques passées, manifestant bon nombre de ses pires caractéristiques, oubliées pendant les trente glorieuses.

Les classes populaires se sont trouvées orphelines, les réflexes des luttes oubliés, le matraquage médiatique et l’anticommunisme ont porté leurs fruits Les capitalistes et leurs bras médiatiques ont su monter les français les uns contre les autres, la femme de ménage contre le chômeur, le jeune contre le retraité, le salarié du privé contre le fonctionnaire… la notion de mérite, et la mise en avant du « Gagnant » a fait le reste. Les capitalistes ont dirigé une partie de la contestation dans les bras de l’extrême droite, qu’ils savent dévouée à leur cause. Alors, le problème est simple, ou chacun essaye de trouver une troisième ou quatrième voix, en faisant sa petite « part » dans son coin, en espérant je ne sais trop quoi, ou alors, on revient aux fondamentaux ! Je crois que ça urge, car au vu des évènements, aussi bien au plan national qu’international, on est en droit d’envisager l’avenir avec une certaine crainte.

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Ref :

(1) Le Journal du Dimanche, le 01/03/2012 : « Impôt à 75% : un taux sans équivalent dans le monde ». Les 30 glorieuse sont la période de 1945 à 1975.


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