Dumping fiscal et social, crise Ukrainienne au menu des élections européennes

par Jean d’Aïtone
lundi 18 mars 2024

Les élections européennes revêtent une importance particulière tant elles pèsent sur l’avenir des pays qui composent cette union et donc sur la France. C’est à travers de directives comme celle de Frits Bolkestein que le dumping social sape les acquis sociaux. C’est à travers l’absence de contrainte et d’unité en matière fiscale que l’Europe recèle des paradis fiscaux en son sein et impose le dumping fiscal. Dans le jeu de la concurrence, les impôts pèsent de plus en plus sur les salariés consommateurs et de moins en moins sur les multinationales. A l’optimisation fiscale il faut opposer l’optimisation sociale, c’est-à-dire de nouveaux acquis sociaux. Les élections sont aussi l’occasion de désapprouver la politique menée par Macron et ses conséquences : casse des acquis sociaux, détérioration des services publics, accroissement de la dette due à la défiscalisation des plus riches (suppression de l’ISF), aux réductions d’impôts aux grandes entreprises et aux aides comme le CICE., mais aussi escalade dans la guerre en Ukraine.

Valoriser le travail en s’attaquant aux droits sociaux ! Valoriser le travail en montrant du doigt les chômeurs à travers la fraude sociale ! Le jeune premier de Matignon promet de multiplier par trois les contrôles des chômeurs et de réduire la fraude sociale. Va-t-il multiplier par trois les contrôles fiscaux ? Macron n’aime pas parler de la fraude fiscale et préfère employer l’expression « optimisation fiscale » qui mérite une médaille puisqu’il a décoré Bernard Arnault, orfèvre en matière d’optimisation fiscale et habilleur de Brigitte Macron. « Optimiser » n’est donc pas cacher des revenus au Fisc, mais utiliser les moyens légaux de le faire.

Parlons de « l’optimisation hollandaise  » ! . Il ne s’agit pas d’évoquer le meilleur de notre ancien Reblochon de la République au nez rose, mou sous la croûte, mais du régime fiscal du pays du Gouda et de la tulipe. C’est un pays de moulins à blé mais le mot « blé » signifie aussi dollar, euro, livre sterling...

Les Pays-Bas (ou la Hollande) ont donné à l’Europe le commissaire Fritz Bokelstein dont on a retenu le nom comme étant celui qui a vanté le plombier polonais et qui a donné son nom à la directive dite « Bokelstein ». Il a établi le dumping social en Europe au nom de la libre concurrence.

En 2001, l'ancien commissaire européen Frits Bolkestein avait annoncé lui-même le refus de la Commission européenne d'enquêter sur Cedel International-Clearstream après la parution du livre Révélation de Denis Robert (Les Arènes, 2001). Ce livre met gravement en cause la banque russe Menatep, au passé sulfureux et à laquelle collabore Frits Bolkestein. Dans son édition du 26 avril 2006, le quotidien gratuit 20 minutes affirme que par deux fois, la Commission européenne a refusé d'enquêter sur Clearstream, banque luxembourgeoise, dont le PDG était Edmond Israël qui a créé une récompense (afin d'exprimer « la reconnaissance de contributions exceptionnelles dans la modernisation de l'Europe) délivrée en dernier lieu à Jean-Claude Junker, ancien Premier ministre et ministre des finance de Luxembourg … actuel Président de la commission européenne.

Des pays européens participent à la mise en place du dumping social et du dumping fiscal. Le Pays-Bas est l’un des paradis fiscaux préférés des entreprises françaises, y compris celles dont l’Etat est actionnaire, comme EDF, GDF-SUEZ, Thales, Véolia… Le chercheur Eric Vernier avait chiffré le manque à gagner pour le fisc de 500 millions à 1 milliard d'euros par an. Les Pays-Bas offrent une législation permettant de faire transiter les revenus d'une filiale étrangère vers un paradis fiscal, comme les Îles Cayman, pour exemple via la fameuse technique du "sandwich néerlandais. Par exemple une grande entreprise a des bureaux aux Pays-Bas, un centre administratif en Irlande et des sociétés aux Îles Cayman. "Du coup, la branche française n'est que commissionnaire et les bénéfices remontent , par un circuit de sociétés offshore, en Suisse", où la dite-société a installé son siège européen, dans le petit village de Rolle, qui accueille les multinationales.

Dans un vieil article du Monde, Dominique Gallois expliquait le montage financier : « Si cette entreprise avait voulu envoyer directement l’argent aux îles Cayman, par exemple, elle aurait dû s'acquitter d'une retenue de 33,3 %. En 2011, l’entreprise avait enregistré 66 millions d'euros de bénéfices, mais n'a payé que 462 665 euros en impôts, soit 0,7 % d'imposition. Même stratégie pour Yahoo, Google, Facebook, Amazon ou Apple ». Les grandes entreprises du web installent souvent leurs filiales dans des pays où la fiscalité est plus avantageuse, ce qui permet de réduire leurs impôts.

L’article de Dominique Gallois est revenu t dans l’actualité au moment où le scandale éclatait sur les pratiques fiscales du Luxembourg et la responsabilité de Jean-Claude Junker, Président de la commission européenne, dans la pratique d’accords secrets entre l’administration fiscale luxembourgeoise et les entreprises multinationales.

Les Pays-Bas, le Luxembourg, Chypre… des membres de la communauté européenne (auxquels on peut ajouter la Suisse) pratiquent le « ruling », une sorte de devis fiscal qui tient lieu d’offre d’une fiscalité avantageuse. Ils ont mis ainsi une concurrence fiscale qui génère le dumping fiscal au détriment des autres Etats.

Des cabinets d’Audit font des offres de service « branche fiscalité » jusqu’à Paris où ils ont ouvert des bureaux comme le cabinet Loyens & Loeff, basé à Rotterdam. Alors que plusieurs parlementaires néerlandais ont appelé à réformer ce système qui met leur pays au cœur de circuits financiers opaques, l'Union européenne a du mal à s'accorder sur un changement coordonné, dans la mesure où il nécessiterait un accord des 27 Etats membres, Pays-Bas, Irlande, Luxembourg et Chypre compris. Entre ceux qui pratiquent le dumping fiscal et ceux qui pratiquent le dumping social, le libéralisme sauvage s’est installé en Europe.

Sur l’euro des Pays-Bas, figure la devise : « Dieu est avec nous »… et sans doute aussi Saint Mathieu, patron des banquiers, des comptables et des inspecteurs des impôts, puisque c’est la religion de l’argent qui dicte sa loi divine et, dans les circuits financiers de la fraude et de l’évasion fiscale, les voix du seigneur sont impénétrables.

Médiapart avait monté, en 2014, tout un dossier sur le dumping social et les paradis fiscaux en Europe. Tout est passé en revue ! Réformes dites « structurelles », budget européen au rabais, travailleurs low-cost, chômage de masse, évasion fiscale massive, Troïka et politiques d'austérité. Vous pouvez retrouver le dossier et les artcles qu’il contient. .

Un livre écrit par Éric Walravens va paraître sur le Dumping social le 17 avril prochain . Il est édité par « Les petits matins ». Fondées en 2005 par Olivier Szulzynger et Marie-Edith Alouf, les éditions Les petits matins publient des essais qui analysent les évolutions et les transformations de la société, particulièrement ses mutations écologiques et économiques. Du reportage à l’enquête, nourris de témoignages, les livres abordent des thèmes aussi variés que les crises climatique et sociale, la nécessaire transition écologique et économique, les inégalités, l’économie sociale et solidaire, le féminisme, etc. Certains livres sont publiés en partenariat avec l’Institut Veblen, le mensuel Alternatives économiques, Le Celsa, entre autres. L’opus est présenté comme suit : « Pourquoi de plus en plus de films français sont-ils tournés en Belgique ?? En raison d'une mesure fiscale très alléchante (le " ?tax shelter") incitant les entreprises à investir dans le cinéma belge. Résultat en France ? Davantage de chômage pour les techniciens et un manque à gagner considérable pour les caisses de l'État. Cet exemple est emblématique d'un phénomène de concurrence fiscale mondialisé, qui touche aussi la finance, l'industrie, l'exil de personnalités ou celui de riches retraités. Chaque État...

Le 1er juillet prochain, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières verra ses missions s’étendre au « recueil », au « traitement » et à la « diffusion du renseignement en matière de fraude fiscale grave » pour le compte de la direction générale des finances publiques. En novembre, la Cour des comptes avait, pour la deuxième fois en quatre ans, recommandé l’amplification du renseignement fiscal, notant à l’occasion que « la France ne dispose d’aucune évaluation rigoureuse de la fraude fiscale ». Des parlementaires lui avaient emboîté le pas quelques jours plus tard avec un rapport selon lequel le montant de la fraude fiscale s’établit entre 80 et 120 milliards d’euros par an. On nous expliquera ensuite qu’il ne faut pas confondre fraude et optimisation. On nous mettra en garde avec l’argument éculé de la fuite des capitaux devant trop d’impôts. En matière de fraude fiscale, on constate que l’urgent est toujours d’attendre. 

Le Parlement européen n'a pas de pouvoir sur la fiscalité, hormis celui de dénoncer les failles de l'Union européenne, tout en défendant la libre concurrence. Le 26 mars 2019 ce parlement a désigné cinq paradis fiscaux au sein de l'UE : Chypre, Malte, l'Irlande, le Luxembourg et les Pays Bas. A partir de 2020, le pays du Gouda a commencé à évoluer sur ce sujet. Le gouvernement néerlandais a décidé de prendre des mesures pour ne plus être le point de passage (et de fuite vers des paradis fiscaux) des profits des multinationales du monde entier. Il n'a pas vraiment eu le choix, car une nouvelle directive européenne imposait des changements pour 2020, mais le gouvernement hollandais est parfois allé plus loin que la directive (tout en cherchant en parallèle à repousser au maximum les dates d'application des nouvelles mesures). Il est évident que les profiteurs du dumping fiscal font du lobbying actif auprès des élus européens pour freiner toute mesure qu’ils estiment contraire à leurs intérêts et donc à l’augmentation de leurs profits. Pour eux, il n’y a pas de gros bénéfices mais uniquement des grosses pertes et la fiscalité est une cause de pertes financières.

Ce n’est pas avec l’aristocrate ultralibérale Ursula von der Leyen à la tête de la commission européenne que les choses pourront évoluer rapidement si elle est réélue à la présidence de la commission européenne. On connaît le traitement confidentiel qu’elle a donné aux commandes astronomiques de vaccins Covid fournis par le laboratoire Pfizer. On connaît ses liens familiaux avec Big Pharma et avec Mac Kinsey. Son passage dans le gouvernement allemand n’a pas laissé le souvenir d’une bonne gestionnaire. 

Les élections européennes revêtent une importance particulière tant elles pèsent sur l’avenir des pays qui composent cette union et donc sur la France. C’est à travers de directives comme celle de Frits Bolkestein que le dumping social sape les acquis sociaux. C’est à travers l’absence de contrainte et d’unité en matière fiscale que l’Europe recèle des paradis fiscaux en son sein et entretient le dumping fiscal. Dans le jeu de la concurrence, les impôts pèsent de plus en plus sur les salariés consommateurs et de moins en moins sur les multinationales. Par des lois successives, le gouvernement Macron a autorisé des entreprises privées à employer détenus et condamnés à des travaux d'intérêt général, sous-payés et sous-protégés. Derrière des arguments humanistes, c'est un immense dumping social qui est enclenché, et les réformes du RSA pourraient bien démultiplier la main d'oeuvre payée par le contribuable, au profit des grandes entreprises. Gabriel Attal s’attaque aux chômeurs pour réduire leurs droits et demande aux bénéficiaires du RSA des heures de travail, pendant que des subventions sont distribuées aux plus grosses entreprises sans contreparties. Le jeune premier du Matignon part en guerre contre la fraude sociale mais on ignore de quels fraudeurs il s’agit. Une grosse partie de la fraude sociale est à mettre sur le compte de professionnels de la santé et d’entrepreneurs.

Au-delà de considérations sociales et fiscales, l’Europe est engagée dans une aide financière et militaire à l’Ukraine en guerre avec la Russie de Poutine. Macron a, sans crier gare, prit l’initiative personnelle de faire des déclarations pouvant constituer une escalade et entrainer la France dans la cobelligérance, sans l’aval des autres pays européens et de l’Otan. Il est donc plus que nécessaire de battre les Macronistes pour désavouer la prise de position de Macron. Ce dernier cherche à imposer son leadership sur l’union européenne dans la crise ukrainienne. Il a décidé de porter l’aide financière de la France à trois milliards cette année. Macron veut nous installer dans une économie de guerre et continue à aggraver la dette alors que son ministre de l’Économie avait déjà prévu 10 milliards d’économie supplémentaire cette année et 20 milliards l’année prochaine. Ainsi on apprend que le budget des hôpitaux sera amputé de 600 millions d’euros alors qu’ils auraient besoin d’investissements pour faire face aux déserts médicaux et à l’encombrement des urgences. La France n’arrive plus à faire face aux besoins courants de santé publique, comment pourrait-elle soigner une surcharge de blessés de guerre ? On a l’impression que Macron a transféré son « quoiqu’il en coûte » sur l’aide à l’Ukraine dont il fait l’affaire prioritaire de l’autocrate qu’il incarne sur la scène politique où il se produit depuis 2017 dans un rôle trop grand pour lui. Un avorton narcissique ne peut pas être un grand chef d’Etat. La menace d’une guerre met une chape sur tous les autres problèmes qu’ils soient sociaux ou fiscaux. Le budget de l’Europe sert chaque année davantage à tenir l’Ukraine sous perfusion financière. Entre 2021 et 2022, il a triplé pour atteindre 18 Milliards. Destinée à la période 2024-2027, une facilité de 50 milliards d’euros a été approuvée le 1er février 2024 par les chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres, réunis en Conseil européen à Bruxelles. Un instrument constitué de 33 milliards d’euros de prêts et de 17 milliards d’euros de dons pour l’Ukraine.

Il paraît que Macron lorgne sur Marseille pour sa vie après 2027. Il ne nous fera pas croire que c’est parce qu’il est un fan de l’OM. Sans doute, est-il dans le secret de quelques projets juteux. On parle d’un pipeline de gaz liquide Barcelone-Marseille-Lyon. Il faudra que Vulcain alias Jupiter élyséen apprenne à parler le marseillais. Dans la cité phocéenne, lorsqu’un ami me dit « je te donne un milliard que l’OM gagnera la coupe d’Europe », cela signifie « je te parie tout ce que tu veux que… » Macron a-t-il dit à Zelenski : « Je te donne trois milliards que j’enverrai des troupes en Ukraine ! » Tout est possible chez un mégalo qui part en biberine, m’a dit mon copain marseillais. La Biberine était autrefois le nom commercial d’une confiserie locale crée dans les années 1920,constituée par une poudre de sucre aromatisée à la menthe, au citron ou à l’orange. Fabriquée à partir des années 1950 par la confiserie Le Mistral située dans le quartier marseillais de Saint-Menet, elle était conditionnée dans un sachet de quelques grammes et vendue avec un chalumeau en réglisse à travers lequel on aspirait la poudre. À l’origine elle était contenue dans une sorte de cornet de papier dont on coupait la pointe pour en aspirer la poudre comme un biberon, d’où son nom, mais le papier mouillé par la salive se décomposait rapidement et laissait échapper la poudre sur le visage et les vêtements des enfants. Ce désagrément a donné naissance à l’expression tomber ou partir en biberine, qui signifie réduit en poudre et par extension tomber en déconfiture. On peut se demander ce que Macron met dans sa biberine. Peut-être de la poudre de perlimpinpin !

Les élections européennes sont l’occasion de voter contre l’austérité, contre une économie de guerre, contre le dumping social et contre le dumping fiscal. La justice sociale est dépendante de la justice fiscale. A l’optimisation fiscale il faut opposer l’optimisation sociale, c’est-à-dire de nouveaux acquis sociaux. Ces élections sont aussi l’occasion de désapprouver la politique menée par Macron et ses conséquences : casse des acquis sociaux, détérioration des services publics, accroissement de la dette due à la défiscalisation des plus riches (suppression de l’ISF), aux réductions d’impôts aux grandes entreprises et aux aides comme le CICE., mais aussi escalade dans la guerre en Ukraine. L’abstention n’est pas la solution et profite à l’establishment. Chacun devrait savoir où sont les intérêts de la majorité des électeurs et cette majorité doit s’exprimer dans les urnes, donc ne pas s’abstenir.


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