Brice Hortefeux invente le Photoshop pour les statistiques

par Bernard Roman
jeudi 21 janvier 2010

Le ministre de l’Intérieur vient d’inventer le Photoshop pour les statistiques. Jeudi dernier, il a organisé une conférence de presse pour annoncer une baisse de la délinquance en France.

Inutilement agressif, sur la défensive, Brice Hortefeux a attaqué « les commentateurs professionnels du dénigrement » et les « donneurs de leçons ». Comme s’il savait bien, au fond de lui, que son triomphalisme était un peu forcé, et ses déclarations plus proches de la propagande que de l’information.

Tout est affaire de présentation. Le ministre indique que le nombre de crimes et délits constatés par les services de police et de gendarmerie a baissé de 1,04% en 2009 par rapport à 2008, grâce à une amélioration au dernier trimestre (depuis son arrivée, donc) après huit mois de légère hausse. Il en déduit que « la tendance à la hausse a été totalement cassée et réellement inversée », alors que sa statistique est tout simplement truquée et enjolivée, notamment par un mélange de rubriques diverses.

Car les chiffres diffusés par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales sont sans appel : les violences aux personnes ont augmenté en 2009 de 2,8%, les cambriolages de 8,2% et les vols à main armée de 15,8%.

La progression des violences aux personnes est une tendance constatée depuis plusieurs années, qui se confirme et s’accélère donc en 2009. Les atteintes volontaires à l’intégrité physique, c’est à dire les coups et blessures, les homicides, ont augmenté de 14% entre 2003 et 2008, et si l’on s’en tient aux coups mortels et violences volontaires non mortelles, la hausse atteint 39,4%.

Pour une droite qui fait de la sécurité son thème de prédilection, il n’y a pas de quoi pavoiser. Depuis 2002, dans ses fonctions de ministre de l’Intérieur puis de président de la République, Nicolas Sarkozy a fait voter 15 lois et procéder à 120 modifications du code pénal. Ces réformes d’opportunité, souvent bâclées, inapplicables sur le terrain, n’ont donc pas endigué la dégradation générale de la sécurité. Les policiers eux-mêmes se plaignent de la course aux chiffres et de la culture du résultat qui leur imposent de travailler sous la pression. Ils sont les premiers à regretter d’avoir à privilégier la répression sur la prévention, la quantité sur la qualité, d’où cette inflation d’interpellations et de gardes à vue inutiles. Sans compter que l’obsession sécuritaire de cette majorité n’empêche pas les réductions d’effectifs. En trois ans, 9 121 emplois de policiers et de gendarmes ont été détruits. Sur la période 2009-2013, la suppression de 11 400 postes est programmée. Le gouvernement fixe des objectifs, la police est sommée de les remplir, et les Français sont priés d’admirer les belles images retouchées brandies par Brice Hortefeux.


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