Turquie dans l’Europe : soyons clairs !

par Sébastien
mercredi 31 août 2005

J’ai vécus un an et demi en Turquie, un temps suffisant pour constater, finalement, que ce pays n’est pas, à mes yeux, "européen".

Qu’est-ce que cela veut dire ? Le pire, c’est que je ne sais pas vraiment. Je ne sais pas véritablement définir ce que c’est "qu’être européen" et, pourtant, j’avais le sentiment que ce pays ne l’était pas. Cette conclusion n’est pas à proprement parler le produit d’une réflexion approfondie. C’est davantage un sentiment. Une impression lorsque je me baladais dans le pays. Une sensation plus qu’un raisonnement.

A bien y réfléchir, je crois qu’il y a deux éléments qui expliquent cette perception : la langue et la religion, l’une et l’autre si "autres" qu’elles ne permettent pas cette affinité que l’on peut éprouver au contact des autres pays européens.

En Italie, en Espagne, au Portugal, vous trouverez rapidement une complicité dans l’expression, qu’elle soit parlée ou gestuelle.

En Allemagne, en Scandinavie, au Royaume-Uni, en Europe centrale, la complicité se fera au travers des églises, des monuments, en un mot de l’histoire.

Histoire des mots d’un côté, histoire des pierres de l’autre, partout une affinité possible, une complicité en marche.

Rien de cela véritablement en Turquie. Un sentiment d’altérité, davantage qu’une impression de complicité.

Question : l’Europe doit-elle alors être ou non identitaire ?

L’identité est-elle un socle indispensable ? Le primat de tout progrès collectif ? La garantie contre tout risque de dissolution ?

Je crois que c’est le seul argument qui pourrait me convaincre de s’opposer à l’entrée de la Turquie dans l’Union. C’est aussi le seul que l’on n’évoque jamais véritablement, ou entre les lignes, de manière subliminale. Le seul qui ne fasse pas vraiment l’objet de débats.

A l’ère de la mondialisation, des échanges, et de la volonté de l’Occident à vouloir partout démocratie et droits de l’homme, comment évoquer, sans se faire traiter de culturaliste rétrograde, l’argument identitaire dans le débat pour ou contre l’entrée de la Turquie dans l’Union ? On fuit le débat pour éviter de passer pour un extrémiste.

Et pourtant c’est bien de cela qu’il s’agit. Et puisque c’est la principale question, il faut cesser de l’envisager à mots couverts. Il faut être clair. Cesser d’évoquer l’argument de la géographie qui n’est qu’un prétexte : Chypre est au large du Liban et de la Syrie et cela ne pose pas de problème. Cesser de parler des retards de l’économie ou des droits des minorités : la Bulgarie est plus pauvre et le sort des Roms n’est guère plus enviable que celui des kurdes.

Non, la vraie question, c’est celle de l’identité européenne.

L’identité est-elle ce socle sans lequel toute fondation est impossible ou est-ce au contraire une chimère, nullement indispensable à l’essor de l’Union et au rayonnement de son projet politique ?

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