Hors programme

par C’est Nabum
mercredi 23 septembre 2015

Festival de Loire d'Orléans

 

L'omission opportune.

Vous vous souvenez peut-être de ma requête quelque peu cavalière, à moins qu'elle ne fût simplement que marinière, réclamant au maire d'Orléans un petit vestibule afin de pouvoir bonimenter lors du Festival de Loire. Rendons grâce à l'intervention de quelques élues qui n'ont eu de cesse de me soutenir en dépit d'une réputation délétère : j'ai obtenu satisfaction, disposant d'une scène pour raconter ma Loire, loin de la foule agglutinée sur les quais.

Mes exigences étaient considérables, il faut bien le reconnaître : aucun cachet, un espace à l'écart de l'animateur qui ne cesse de prendre la parole sur un ton de radio périphérique et la possibilité d'exprimer devant quelques curieux ma passion pour l'histoire de notre fille Liger. Elles furent acceptées, ce qui me surprit tout autant que me combla.

L'été passa sans que j'eusse plus de nouvelles. C'est à la lecture du programme officiel que mon sang ne fit qu'un tour : je ne figurais pas sur le précieux document qui orientera les curieux lors de ces cinq jours de festivités. Oubli ou bien omission ? chacun dispose de sa vérité quand tout ne peut être dit au risque de briser le lien ténu et au combien fragile qui s'est établi en dépit d'oppositions tenaces et souterraines.

Il se trouve que la disparition n'est pas innocente, d'autant plus que j'ai eu la malencontreuse idée de m'aliéner l'icône locale de la rivière : le maître de cérémonie, un charmeur incontournable, le numéro Un de la flotte locale. Il ne fallait pas faire d'ombre et encore moins de vagues : une bonne communication a besoin de cohérence et de clarté. Écarter le bouffon semble être légitime au royaume des bisounours.

Que cette entourloupe soit volontaire ou bien insidieuse, qu'elle émane simplement d'un malencontreux concours de circonstances, fort opportun au demeurant, n'a strictement aucune importance. Je reste sur ma chaloupe, débarqué que je suis du grand rafiot officiel. Les spectateurs devront faire preuve d'une grande opiniâtreté pour venir à ma rencontre du simple fait du hasard ou d'un bouche à oreille qui se passera naturellement d'une presse locale prompte à honorer les puissants et à mépriser les humbles.

Pour ceux qui me font l'honneur de me lire et qui, par extraordinaire, viendraient jusqu'à cette merveilleuse animation fluviale, je suis à la lettre le fameux précepte qui affirme qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même. C'est donc au travers d'un billet que je vous informe de ma programmation, terme en la circonstance assez dévoyé puisque privé de son expression papier !

Si vous souhaitez entendre mes Bonimenteries, vous n'aurez qu'à traverser le pont Royal, ce solide ouvrage de pierre inauguré en son temps par la marquise de Pompadour, venue avec meubles et bagages par les voies d'eau et qui eut le malheur de perdre une partie de son petit mobilier de voyage lors du naufrage de son coche d'eau … Mais ceci est une autre histoire.

Toujours est-il que ce brave pont de pierre inauguré en 1760 supportera bien votre passage : ayant été baptisé par le plus lourd fardeau que la France ait supporté. Vous franchirez sans peine les 339 mètres de ce magnifique ouvrage d'art construit sur les plans de l'architecte Jean Hupeau. Ses travaux ont débuté en 1751 pour s'achever finalement en 1763.

Vous pourrez admirer ses neuf arches durant cette traversée piétonnière qui vous conduira jusqu'à l'octroi qu'il fallait alors payer pour avoir le droit de l'emprunter. C'est donc sur la rive Berry, comme elle se disait à l'époque, que vous découvrirez une guinguette où votre serviteur fera le bouffon savant, le conteur falsificateur, l'animateur décalé, loin des vedettes de la rive opposée et de toutes les embarcations historiques. Je serai si proche de la circulation automobile, qu'il vous faudra tendre l'oreille et vous pincer le nez.

C'est à l'heure de la sieste, sur le coup de la digestion, à 15 heures qu'il se trouvera encore quelques personnes vaillantes pour affronter une prestation qui ne méritait sans doute pas l'encre du programme. Exceptionnellement je manquerai au rendez-vous le jeudi puisque mes amis de La BouSol se produiront sur l'autre rive, celle de la multitude et qu'ils m'ont fait l'honneur de me demander de présenter leur spectacle qui figure, lui, au programme officiel, accompagné d'une illustration soigneusement choisie sur laquelle je ne suis pas.

Voilà, vous savez tout et j'ai, une fois encore, noyé le poisson pour ne pas faire de vagues. Il faut reconnaître que l'entreprise eût été délicate en eau douce. Le duit, cette digue longitudinale qui sépare notre rivière en deux afin de lui assurer un chenal sur la rive Nord, me permettra d'éviter les algarades et les quolibets venus de l'autre rive.

Que la fête soit belle et n'oubliez pas de demander le programme même s'il n'est pas tout à fait complet. Je vous attends de pied ferme et la langue tout aussi pendue que le laisse supposer cette proposition abracadabrante. Ceux qui sont susceptibles ou dénués d'humour, n'ont qu'à passer leur chemin. J'ai jeté l'encre à deux pas des Tourelles, là où dame Jeanne réalisa son plus bel exploit. C'est un pied de nez supplémentaire qui amusera le comité d'éthique ; je ne manquerai pas de conter son histoire à ma façon. À bientôt si le cœur vous en dit !

Programmatiquement leur.


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