Qui était vraiment le roi Léodagan ?

par Michel Lebarillec
mercredi 7 février 2024

Voici le portrait d'un autre personnage des romans arthuriens, extrait de la liste publiée dans mon livre Le roi et le graal :

- PARILLE  

- TITUREL  

- FRIMUTEL  

- AMFORTAS  

- ARTHUR  

- UTHER PENDRAGON  

- YGERNE  
 - MORGANE  

- LEODAGAN  

- PERCEVAL  

- LANCELOT  

- VIVIANE, LA DAME DU LAC  

- MERLIN  

- LE PERE BLAISE  

A noter que pour ceux qui sont intéressés par une biographie plus détaillée du roi Théodoric le grand, je les renvoie à l'ouvrage "Ravenne, Capitale de l'Empire, creuset de l'Europe" de Judith HERRIN aux éditions passé/composés.

Léodagan, connu également sous le nom de Léo de Grand ou de Grance, est le père de la reine Guenièvre et donc le beau-père d’Arthur. Il est roi de Carmélide dont la capitale semble être une ville nommée Carohaise ou Carahes. Arthur l’aurait aidé dans sa lutte face à Claudas de la terre déserte. D’après certaines versions de la légende, il aurait été le dépositaire de la table ronde à la mort d’Uther Pendragon et l’aurait offert à Arthur comme dot pour le mariage de sa fille.

Historiquement, il ne peut donc s’agir que de Théodoric le Grand, le beau-père d’Alaric II, le roi des Ostrogoths en Italie qu’il ne faut confondre ni avec Théodoric Ier, ni avec son fils Théodoric II qui étaient tous les deux des rois wisigoths.

Une fois constaté que le suffixe RIC signifie chef puissant et donc que Théodoric le grand peut se comprendre comme le roi Théo le grand, il devient difficile de ne pas faire le rapprochement avec le nom du personnage Léo de Grand.

En tous cas, le rôle de Léodagan dans la légende arthurienne n’est pas à la hauteur de celui de Théodoric dans l’Histoire car celui-ci comptait parmi les grands personnages de l’époque. Voilà ce qu’en dit l’historien byzantin Procope de Césarée :

Il commanda seul sur les Italiens et sur les Goths avec une puissance absolue. Il ne prit néanmoins ni le nom, ni l'habit d'empereur des Romains ; il se contenta de la qualité de roi qui est celle que portent les capitaines des Barbares. Il faut pourtant avouer qu'il a gouverné ses sujets avec toutes les vertus qui sont dignes d'un grand empereur. Il a maintenu la justice, il a établi de bonnes lois, il a défendu son pays de l'invasion de ses voisins, et a donné toutes les preuves d'une prudence et d'une valeur extraordinaire. Il n'a fait aucune injustice à ses sujets ni permis que l'on leur en fît, si ce n'est qu'il a souffert que les Goths aient partagé entre eux les terres, qui avaient été distribuées par Odoacre à ceux qui suivaient son parti. Enfin, quoique Théodoric n'eût que le titre de roi, il ne laissa pas d'arriver à la gloire des plus illustres empereurs qui aient jamais monté sur le trône des Césars. Il fut également chéri par les Goths et par les Italiens, ce qui n'arrive pas d'ordinaire parmi les hommes, qui ont coutume de n'approuver dans le gouvernement de l'État que ce qui est conforme à leurs intérêts, et qui condamnent tout ce qui y est contraire. Après avoir régné trente-sept ans, et s'être rendu formidable à ses ennemis, il mourut de cette manière.

Comme l’explique Godefroy Kurth dans son ouvrage Clovis, il avait tissé des liens de parenté avec la plupart des rois de l’époque :

Il avait fait tour à tour entrer, dans sa clientèle ou dans son alliance, tous les peuples barbares de l’Occident, et il était en Europe le chef d’une famille de rois qu’il travaillait à serrer le plus étroitement possible autour de sa personne. Grâce à une série de mariages politiques, il se trouvait le beau-père du roi des Burgondes et de celui des Visigoths, le beau-frère de celui des Vandales et de celui des Francs, et l’oncle de celui des Thuringiens ; enfin, il avait adopté comme fils d’armes celui des Hérules. Ces liens de parenté entre les rois lui semblaient la meilleure garantie de la paix entre leurs peuples.

En effet, Théodoric Le Grand avait marié ses filles aux rois et princes de l’époque :

Et alors que les deux premières étaient nées d’une union avec une concubine, la dernière avait pour mère Audoflède, une des sœurs de Clovis, ce qui faisait donc de Théodoric le beau-frère du roi des Francs.

Comme les rois wisigoths, il était de confession arienne. A la fin de son règne, certainement atteint de paranoia, il fit emprisonner le philosophe Boèce pour trahison avant de le faire éxécuter. Il passa la majeure partie de sa vie à Ravenne, où il mourut officiellement de dysenterie à l’âge de 73 ans même si selon certaines sources, il est possible qu’il ait été empoisonné par les catholiques. En effet, il fit emprisonner le pape Jean Ier qui mourra sans doute de faim le 25 mai 526, et le 26 aout il publia un décret pour bannir la religion catholique. Et le 29 aout 526, pris de violents vomissements, Théodoric décéda sans que ses médécins ne puissent le sauver…

On peut visiter son mausolée à Ravenne, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Il est connu dans des légendes nordiques ainsi que dans la chanson des Nibelungen sous le nom de Dietrich von Berne. Rappelons également que sa statue figure parmi celles des ancêtres de l’empereur Maximilien Ier à Innsbruck, aux côtés de celles du roi Arthur et de Clovis.


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