Réindustrialisation : la nouvelle arnaque de Macron

par Laurent Herblay
samedi 27 mai 2023

C’est le thème de communication du président des deux dernières semaines, entre interviews, déplacements sur le terrain, sommet avec les investisseurs et annonces triomphalistes. Mais si la plupart des médias ont relayé la propagande de l’exécutif docilement, la réalité, comme souvent avec Macron, n’a rien à voir avec la fable communiquée, quel que soit l’angle d’analyse pris.

 

Entre Orwell et Pravda

Mais comment les média peuvent relayer les éléments de langage de la présidence, sans les remettre en perspective par des faits pourtant basiques  ? Service du pouvoir, incompétence : aucune des explications n’est vraiment rassurante… Car la réalité n’a vraiment rien à voir avec le conte sur papier glacé raconté depuis Versailles lundi. Un simple fait devrait disqualifier tout le discours de la majorité sur la réindustrialisation : notre déficit commercial sur les produits industriels, qui a battu un nouveau record en 2022, à 78,5 milliards d’euros, quatre fois plus qu’il y a 10 ans ! Pire, pour qui prend la peine d’étudier les statistiques, ce déficit a doublé en 3 ans, puisqu’il a augmenté de 15 milliards en 2022, après avoir augmenté de 7 en 2021 et 21 en 2020. Comment peut-on parler de réindustrialisation alors que notre déficit est passé de 35 à 78 milliards d’euros de 2019 à 2022 ? En fait, la situation s’aggrave…

D’ailleurs, la construction automobile en France a atteint un plus bas depuis 60 ans en 2022  ! Et, assez logiquement sur l’emploi, la situation n’est pas brillante non plus. La France comptait près de 5 millions d’emplois industriels dans les années 1970. Nous sommes tombés depuis à 2,7 millions, et ce chiffre semble être un plancher depuis quelques années. Cependant, avec la légère augmentation de la population active, cela revient à une légère baisse de la part des emplois industriels dans la population active, comme l’avait pointé Aurélie Trouvé. D’ailleurs, sur le front de l’emploi, les annonces faites à l’issue du sommet sont très modestes : à peine huit mille emplois, sur plusieurs années, 0,3% du total… Nous sommes dans l’épaisseur du trait. Pourtant, on imagine que ce total ratisse assez large, et ne comporte pas seulement les nouvelles discussions issues du sommet. Une réindustrialisation taille XXS.

Et c’est bien le problème de toutes ces annonces, comme l’a très timidement pointé Gilles Bouleau face à Macron lundi soir  : chaque projet génère peut d’emplois en France, une trentaine en moyenne, bien moins qu’en Allemagne et en Grande-Bretagne. Martial You, sur RTL pointaint il y a peu que les projets espagnols génèrent dix fois plus d’emplois. Voilà pourquoi la macronie ne rapporte que le nombre de projets pour raconter que nous serions les plus attractifs… Si nous comptions en nombre d’emplois créés, la position de la France serait beaucoup moins glorieuse. Comme toujours, la macronie manipule les statistiques grossièrement pour isoler le chiffre qui lui est le plus favorable, au mépris d’une représentation juste de la réalité. Pire, cette comptabilité omet les faillites, en forte augmentation.

Pire, ce faisant, les commentateurs à la mémoire courte, ou biaisés, oublient de mentionner la poursuite des soldes de nos actifs industriels, lourd passif du ministre Macron (Alcatel, Alstom, Technip), qui continue malheureusement malgré le discours sur la souveraineté et la réindustrialisation. Mais pourquoi la France a laissé filer Exxelia cette année, une pépite industrielle qui fournit Dassault, Airbus et Boeing  ? En effet, nous savons trop bien que la prise de contrôle par des intérêts étrangers peut être le prélude à une délocalisation des activités. Voilà un autre point que Gilles Bouleau aurait dû mentionner. Idem sur le coût exorbitant des baisses de taxes destinées à améliorer notre compétitivité depuis 10 ans (autour de 100 milliards par an), qui n’a eu aucun effet positif sur notre balance commerciale…

Il n’y aura pas de réindustrialisation sans protectionnisme et politique industrielle, impossibles dans l’UE. Et si quelques usines ouvrent, il n’y a pas de véritable réindustrialisation, ni même de véritable politique mise en place pour le faire depuis dix ans. Il y a juste un exercice effarant de communication relayé trop servilement par la plupart des médias. Rappel utile que rien de ce que dit Macron ne peut être cru.


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