Bilan footballistique de Chirac

par Peachy Carnehan
mercredi 16 mai 2007

Footix président

Tout comme en politique sociale ou européenne on a souvent reproché à Jacques Chirac de n’y rien entendre en matière de ballon rond. C’est injuste pour le vainqueur de France 98.

Tout comme en politique sociale ou européenne on a souvent reproché à Jacques Chirac de n’y rien entendre en matière de ballon rond. C’est injuste et aller un peu vite en besogne car c’est oublier les grands succès footballistiques nationaux remportés sous son double mandat.

Les mauvaises langues aiment parfois à rappeler qu’il a confondu Coupe de France et Coupe du monde lors de la garden-party d’après 12 juillet ou qu’il ne connaissait même pas par coeur les noms des 22 joueurs d’Aimé Jacquet. En somme qu’il n’était qu’un Footix de circonstance, un supporter de la 25e heure comme des millions d’autres en 1998. Certes, ces fautes sont gravissimes pour un chef d’État mais elles ne doivent pas faire oublier l’essentiel : le palmarès footballistiques de Jacques Chirac.



DES DÉBUTS ENCOURAGEANTS

Lorsque J.Chirac entre à l’Élysée en mai 1995 il sait que la tâche qui l’attend sera ardue. L’homme qui lui transmet le pouvoir, François Mitterrand, part auréolé d’un titre de Champion d’Europe des nations en 1984 et d’une Ligue des Champions en 1993. Tonton est pour l’histoire le premier grand vainqueur du football français. Une réputation cependant ternie par la médiatique affaire VA-OM et un France-Bulgarie de triste mémoire dont il partage la responsabilité avec son Premier ministre de cohabitation Édouard Balladur.

En 1995 le dossier Euro 96 attend donc Chirac sur son bureau de l’Élysée. Aimé Jacquet et Zinédine Zidane sont des collaborateurs performants et la France se qualifie pour le championnat d’Europe en Angleterre après un match fondateur réussi en Roumanie. L’élimination prématurée en demi-finale entraîne une déception immense dans les cafés du commerce mais l’essentiel est fait, la nation possède une équipe capable de remporter le grand rendez-vous de la Coupe du monde 98 que la France organise.

Le président peut se réjouir, il n’a pas manqué son entrée en scène. En cette même année 1996, marquée par de grands mouvements sociaux anti-Juppé, il voit même s’écrire la première ligne de son palmarès footballistique avec la victoire du PSG en Coupe des coupes. Équipe nationale et clubs performants, et si le "meilleur d’entre nous" n’était pas le maire de Bordeaux mais plutôt son ancien entraîneur, Aimé Jacquet ?


LES ANNÉES DE TRIOMPHE

En 1997 le meilleur se nomme Lionel Jospin qui devient Premier ministre après une abracadabrantesque dissolution ratée. Le duo fonctionnera à merveille jusqu’aux événements de septembre 2001 qui ont vu les Bleus perdre de leur superbe dans une série de défaites inquiétantes (Espagne, Belgique).

En attendant ces années funestes, 1997 voit le PSG atteindre une seconde fois la finale de la Coupe d’Europe mais Ronaldo qui n’est pas encore devenu Gronaldo prive le club de Julien Quemener d’un doublé historique.

Ignorant les critiques qui s’abattent sur Aimé Jacquet début 1998, après une série de zéro à zéro décourageante, Jacques Chirac refuse de se soumettre à la pensée unique des lignes éditoriales de l’Équipe et de France Football et s’aligne sur les positions "Extrême Bleus" d’un tout nouveau venu appelé à un grand avenir Les Cahiers du Football.

L’idée est excellente, les bénéfices de la victoire au soir du 12 juillet également.

La France devient pour un temps Black-Blanc-Beur. La nation aux 35 heures envahit l’Étoile, sanctifie le soldat Zidane, bouscule les canards de Mitterrand dans les bassins de l’Élysée lors d’une garden-party mémorable, et, comble du bonheur, entend dire son président que l’argent coule à flot par la grâce du mulot d’internet, des nouvelles technologies et de la baisse massive du chômage.

Un million de sans emplois retrouve le chemin du travail entre la dissolution de 1997 et le 21 avril 2002. Soit selon l’OCDE une baisse de 28% du taux d’unemployment, n’en déplaise au Medef. Des performances sportives que Jacques Chirac se doit de partager avec un Lionel Jospin pourtant encore plus nul que lui en matière de ballon rond.

La victoire face aux perfides italiens lors de l’Euro 2000 ne fait que confirmer la puissance nouvelle du football français. Le but formidable de Trézéguet en finale face à la sinistre Squaddra Berlusconia ne trouve d’équivalent à l’époque que dans le coup de pied au cul donné à Christine Boutin avec le vote du PACS. Le succès est total.

En l’an 2000, dites-le un jour à vos arrière-petits-enfants, la France est championne du monde, d’Europe, de la croissance économique, du progrès social. En l’an 2000 la France est le pays ou il fait le plus bon vivre. De Gaulle avait son Tintin, Jacques Chirac a son Zinédine Zidane.

LE DÉCLIN

La campagne "Coupe du monde 2002" au Japon et en Corée débute avec la réélection à 82% de Jacques Chirac face aux brutes amateurs du Front national. Le président commet d’entrée une erreur politique en ne privilégiant que les membres de sa famille politique au détriment de ceux qui l’ont amené jusqu’aux firmaments. Le régisseur Lionel Jospin est viré au profit du catastrophique Jean-Pierre Raffarin pour qui "the yes needs the no, to win against the no". Cet individu inconséquent ne laissera que peu de traces dans les mémoires des amateurs de football. Tout juste lui accordera-t-on une finale de Coupe des champions perdue par Monaco face à Porto en 2004.

Mais la canicule n’est pas encore d’actualité en juin 2002 quand les Bleus de Roger Lemerre se brûlent les ailes dès le premier tour, éliminés par le Sénégal, l’Uruguay et le Danemark. La mauvaise surprise est totale et les stocks de maillots à deux étoiles sont détruits en même temps que les invendus du single de Johnny Hallyday. Chirac ne se rendra pas à Tokyo pour défendre depuis les tribunes le titre remporté quatre ans plus-tôt. Le Japon, sa seconde nation, se refuse pour une fois à lui.

Accident de parcours par la faute d’un management délirant ou malaise plus profond ? L’illuminé mégalomane Roger Lemerre est finalement viré au profit d’un autre dérangé : l’autiste Jacques Santini. La vie reprend son cours quotidien et les bons résultats en qualification pour l’Euro portugais semblent pour un temps accréditer la thèse de l’accident. C’était sous-estimer la capacité de nuisance de Jean Pierre Raffarin et Jacques Santini. Après la débâcle électorale des régionales la France est piteusement sortie du Championnat d’Europe par 11 défenseurs grecs.

Nouvelle désillusion dans un contexte national de morosité symbolisé par le début de la domination ultralibérale lyonnaise en Ligue 1. Les zéro à zéro s’enchaînent en championnat de France, l’ennui gagne les tribunes et comme il fallait s’y attendre le Non à la Constitution européenne l’emporte avec 55% des votes. Raffarin est enfin remercié et part retrouver Santini sur le banc de touche de l’infamie.

LA FIN

C’est le duo Villepin-Domenech qui prend ensuite le relais. Curieusement leurs trajectoires respectives seront diamétralement opposées. Après 100 jours de grâce le fringuant trois-mâts du Premier ministre, éventré par un mois d’émeutes et le CPE, sombre corps et âmes. Inversement Raymond Domenech, qui n’a en tête que le 9 juillet 2006, parvient à la surprise générale en finale de la Coupe du monde.

Jacques Chirac, qui espérait enrichir son palmarès, subit à Berlin un nouveau revers avec la victoire honteuse de l’Italie aux tirs au buts. Zinédine Zidane, son plus utile soutien, est même expulsé après un coup de free fight sur celui dont on ne doit pas prononcer le nom.

Dimanche 11 mars 2007 Jacques Chirac dans une allocution télévisée a déclaré qu’il ne solliciterait pas de nouveau mandat. S’il peut être fier de son bilan aux affaires étrangères (et un peu moins dans les autres domaines) il n’a pas à rougir de son palmarès footballistique.


Le palmarès de Jacques Chirac (1995-2007)

Équipe de France (139 sélections) :
Vainqueur de la Coupe du monde 1998, finaliste en 2006, ridicule en 2002.
Vainqueur de l’Euro 2000, ridicule en 2004, demi-finaliste en 1996.

Clubs :
PSG vainqueur de la Coupe des Coupes en 1996, finaliste en 1997.
Monaco finaliste de la Champion’s League en 2004.
Bordeaux finaliste de la Coupe UEFA en 1996.
Marseille finaliste de la Coupe UEFA en 1999 et 2002.

Lire aussi : Rétro Coupe du Monde 2006
NordenSport

Peachy Carnehan
NordenStar.com, 16 mai 2007


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