La ferme des Bertrand

par C’est Nabum
mercredi 31 janvier 2024

 

Incontournable documentaire.

 

 

N'attendez pas le prochain salon de l'agriculture pour comprendre vraiment ce qu'est la vie paysanne, l'amour de la terre et des bêtes, le respect de la nature et la puissance de l'engagement qu'exige ce merveilleux métier. Ne comptez surtout pas sur les prochains discours des ministres ou du président qui vous jureront, la main sur le cœur qu'ils ont compris la colère des agriculteurs.

Évitez plus encore les déclarations des leaders syndicaux de la FNSEA, ce chancre purulent qui n'agit jamais au nom de leurs adhérents mais bien plus pour favoriser les plus puissants, ceux qui ont le temps de participer aux réunions pour toujours plus s'accaparer de terres et de subventions. La réalité et l'amour du métier ne sont pas dans le pré carré des médias qui vont couvrir la crise agricole, mais dans un documentaire à moins que ce ne soit une ode à la plus ancienne des professions.

La ferme des Bertrand est un moment de grâce, une bulle d’authenticité et d'humanité à des années lumières des reportages que ne manqueront pas de vomir nos chaînes d'informations. Ce n'est surtout pas les clichés aseptisés que l'on peut créer de toute pièce lors de la visite d'un premier ministre dans une exploitation à l'abri des griefs et des réalités.

Vous partagerez la vie d'une famille qui a voué son existence à l'amour d'un métier qui n'est pas toujours celui du choix mais qu'on ne peut réaliser sans passion et courage, efforts et sacrifices, déceptions et joies. Tous les sentiments y sont présentés sans rien cacher de ce qui pose problème mais aussi en n'oubliant jamais ce qui fait la grandeur de cette extraordinaire aventure humaine.

La force de ce reportage est de mêler les époques, de montrer cette famille sur plus de cinquante ans, avec des extraits d'un reportage de 1972 de Marcel Trillat puis du premier film que Gilles Perret avait monté en 1997 : « Trois frères pour une vie » avec ce retour vingt-cinq ans plus tard pour retrouver les héros de cette épopée.

Héros oui car non seulement ce sont des gueules de cinéma mais aussi des parcours individuels qui sont à eux seuls des romans, des drames, des tragédies et des comédies. Les spectateurs ne peuvent s'empêcher de s'émouvoir un instant puis de rire aux éclats la scène suivante tout en étant à chaque image totalement subjugués par l'immense sincérité à la fois des membres de cette famille mais aussi du regard de la caméra.

Gilles Perret est leur voisin, il fait presque partie de la famille qui se confie, se livre sans fausse pudeur mais jamais sans démonstration. Tout est dans les regards, les silences, les paysages, le rythme des saisons pour comprendre la transmission d'une génération à l'autre et l'âpreté d'une profession qui devient vocation par l’incroyable implication qu'elle impose à ceux qui l'ont embrassée.

Coupez au plus vite le flot des bulletins d'information, des déclarations des uns et des autres, des mensonges de tous les décideurs du monde agricole et précipitez-vous pour appréhender véritablement ce qui relève d'un mystère : la communion d'une famille avec sa terre, ses bêtes et son territoire.

 

Les discours de l'écologie urbaine seront alors aussi vains que les exhortations des uns ou les allocutions des autres. Ce film à lui seul, transformera vos idées reçues, balaiera vos clichés, insinuera toutes les ambiguïtés et subtilités qu'exige ce dossier pour véritablement toucher du doigt la beauté d'un métier qu'on entend sacrifier sur l'autel de la mondialisation et d'une politique européenne, parodie de gestion raisonnée de ce dossier.

Mes mots sont de peu d'importance, ce film est un coup de poing, une pépite, un moment hors du temps qui fait toucher l'âme de ce qui fit la grandeur de ce pays.


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