De quoi Merz va-t-il parler avec Trump dans le Bureau Ovale ?
par Patrice Bravo
vendredi 6 juin 2025
À Washington, le chancelier allemand, Friedrich Merz, sera le « porte-parole » de l’UE. Celui-ci, qui vient d’arriver à Washington pour rencontrer Donald Trump, est confronté à une grave crise dans les relations américano-allemandes.
La visite officielle du chancelier allemand, Friedrich Merz, aux États-Unis vient de débuter ce jeudi. Die Welt annonce la teneur de cette visite : « Il s'agit d'une visite inaugurale qui donnera le ton aux relations germano-américaines pour les années à venir. La discussion d'aujourd'hui ne porte pas sur des accords politiques concrets, mais simplement sur la question suivante : Merz et Trump trouveront-ils un terrain d'entente ? »
À Washington, il s'entretiendra avec le président Donald Trump, suivi d'une conférence de presse à la Maison Blanche. Les dirigeants discuteront des relations entre les deux pays, des questions internationales, notamment les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, et des droits de douane sur les importations de produits européens aux États-Unis.
Le porte-parole du chancelier allemand, Stefan Kornelius, a annoncé que Merz tiendrait sa première rencontre officielle avec Trump ce 5 juin. En fin de matinée (17h30, heure locale), le chancelier allemand sera à la Maison Blanche.
Selon les autorités allemandes, la question ukrainienne sera au cœur des discussions. Avec la visite du chancelier allemand, les médias allemands ont attiré l'attention sur le récent voyage aux États-Unis du ministre fédéral allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, considéré comme une personne de confiance de Merz. À Washington, Wadephul a rencontré le 28 mai dernier Marco Rubio qui cumule actuellement les fonctions de secrétaire d'État et de chef du Conseil de sécurité nationale.
À l'issue de sa visite aux États-Unis, Wadephul a déclaré que les relations germano-américaines étaient en crise. Il a notamment évoqué le ton dur des négociations avec lui à Washington et il a appelé à établir des liens avec les responsables politiques américains. Wadephul est arrivé à la conclusion que la confiance entre l'Allemagne et les États-Unis était insuffisante.
Lors d'une interview télévisée avec la ZDF au début du mois de juin, le ministre allemand a présenté les principaux sujets des discussions de Merz à Washington. Outre la situation en Ukraine, les discussions avec Trump porteront sur de nouvelles sanctions contre Moscou, le prochain sommet de l'OTAN, le dossier nucléaire iranien, la situation dans la bande de Gaza et les actions du gouvernement israélien. Mais, surtout, Merz abordera la question de la guerre tarifaire à venir entre l'Europe et les États-Unis, reportée au 9 juillet.
La question extrêmement douloureuse des tarifs douaniers est primordiale pour Merz lui-même. Il est arrivé au pouvoir sur des promesses de croissance économique après plusieurs années de récession, marquées par les expériences économiques du gouvernement précédent. Ce n'est pas un hasard si la nouvelle ministre allemande de l'Économie et de l'Énergie, Katherina Reiche, a récemment accusé directement son prédécesseur, le ministre « vert » de l'Économie et du Climat, Robert Habeck, au sein du gouvernement d'Olaf Scholz, d'imposer une politique « anti-croissance ». Cette politique se résumait à une prétendue stabilisation de la vie économique et sociale du pays, impliquant une légère hausse du PIB, voire une stagnation.
Si Trump impose les droits de douane américains à l'Europe, ils toucheront en premier lieu des secteurs de l'industrie allemande comme la construction mécanique et l'automobile. Le déclin de l'industrie automobile, pilier de l'industrie allemande, a déjà entraîné la fermeture de plusieurs usines.
Par ailleurs, comme le souligne la presse allemande, Merz devra démontrer à Trump son statut de leader européen. Ce n'est pas un hasard si, sur la question de la prévention d'une guerre tarifaire, Merz, en accord avec Bruxelles (Ursula von der Leyen), défendra une position commune des pays de l'UE. Observateur Continental a averti : « La guerre commerciale mondiale devient réalité ».
Merz, à en juger par l'interview de Wadephul, ne s'attend pas à ce que la situation politique intérieure allemande soit abordée à Washington. Le ministre a d'ailleurs été interrogé sur la prétendue tyrannie en Allemagne, liée à la persécution des populistes de droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD).
L'existence d'une telle tyrannie a été évoquée à plusieurs reprises par les responsables américains depuis le début de l'année. Au début de mai dernier, le secrétaire d'État, Marco Rubio, a parlé de « tyrannie secrète » après que l'AfD a été classée comme extrémiste de droite par l'Office fédéral de protection de la Constitution. Le vice-président JD Vance, qui avait déjà accusé l’Allemagne de déficits démocratiques lors de la Conférence de Munich sur la sécurité en février dernier, a fait des commentaires similaires.
Dans un entretien au Zeit, Friedrich Merz a renvoyé la balle en ces termes : « Nous devons absolument rejeter de telles déclarations » ; « L'Allemagne a été libérée de la tyrannie par les États-Unis ; l'Allemagne est désormais stable, libérale et démocratique. Nous n'avons pas besoin de leçons de démocratie ».
Pierre Duval
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Source : https://pierreduval.substack.com/p/de-quoi-merz-va-t-il-parler-avec