Tomber le masque…

par C’est Nabum
mardi 10 septembre 2024

 

Une fort vilaine conduite

 

Il est une activité sociale qui en dit bien plus sur un individu que bien des discours ou des postures de façade. Il semble qu'alors, tombe le masque et toutes les barrières qui ont été dressées pour dissimuler le véritable personnage, celui qu'il convient de dompter quelque peu afin de faire bonne figure en public.

Soudain tout bascule. Adieu l'être de tolérance et de modération. Finis les belles tirades et les discours pompeux. Oubliés les théories scabreuses et les propos alambiqués. Chasser le naturel prétend l'idiome et il reviendrait au galop. Il ne reste plus qu'à définir le rythme de ce galop sur un cheval moteur qui hennit plus qu'il ne ronronne.

L'humain ordinaire se métamorphose quand il pénètre dans son habitacle, qu'il se serre la ceinture en refusant de se faire dicter sa conduite. Personne ici-bas ne lui remontera les bretelles puisqu'il devient soudainement seul maître à son bord, qu'importe ses semblables et ceux qui partagent son petit espace, pas toujours vital hélas.

Il suffit de tourner une clef non pas pour s'ouvrir sur le monde même si l'intention ici est de la parcourir mais plutôt pour s'enfermer à double tour dans sa certitude d'une supériorité sur la terre entière. En dépit d'une relation aux autres éminemment codifiée, c'est à cet instant précis la prise de contact direct avec un ego qui carbure à l'égoïsme.

Poussez-vous que je me fasse ma place ! Laissez-moi aller à ma seule guise ! Je c'est moi et pas un autre qui mériterait tout autant considération et égards que moi-même. Il n'y a que Moi qui existe en dépit de l'immense cohorte de mes semblables qui ont le même objectif respectable : se mouvoir en compagnie.

Mais là est la limite à ne jamais dépasser : ils peuvent faire ce qu'ils veulent à la condition de ne pas entraver celui qui tire toute sa puissance de son fidèle destrier mécanique. Il convient de faire place nette, d'abolir les réglementations, de ne surtout pas se trouver sur sa trajectoire, de prévenir longtemps à l'avance de toutes vos intentions à la condition qu'elles ne viennent pas se mettre en travers de la route de « Moi Je ».

Sinon, c'est l'escalade verbale, la pluie des injures et des jurons, ponctués parfois d'un avertisseur tonitruant bien plus que sonore. Le pilote ne se contrôle plus, il vocifère et qualifie tous ses semblables d'une palanquée de qualificatifs péjoratifs qui attestent de la verdeur de son langage routier. Celui-ci n'a plus rien à voir avec le vocabulaire habituel, c'est la métamorphose du chauffard qui accumule les « connards » avec la même aisance que les infractions.

Le plus extraordinaire dans cette folie absurde c'est qu'il semble échapper aux règles et aux contrôles. Que les radars ne soient sur la route que pour prendre en flagrant délit ceux qui se feront insulter par celui qui échappe à leur vigilance. Lui n'a aucune limite tant dans sa célérité délirante que dans son vocabulaire excrémentiel.

La ligne blanche est depuis longtemps franchie, le chauffard n'en a cure. Il fonce tête baissée et gueule grande ouverte, comme si son véhicule roulait aux propos orduriers et à tous ces coups tordus qui attestent d'une absence totale d’empathie et de prévenance pour tous ceux qui se mettent en travers de son passage.

Si sa pratique est adroite, ses dérèglements n'en sont pas moins l'expression même d'une personnalité qui d'un seul coup met les points sur les « i » à qui découvre stupéfait, l'autre facette du personnage. Dans pareil cas, il est préférable de descendre de cette automobile ou plus raisonnablement de reprendre la main et le volant. Il convient alors de s'interroger sur la véritable nature de celui qui (se) conduit de la sorte.


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