Joyeux 7 octobre

par Jules Seyes
lundi 7 octobre 2024

Un an, un an déjà que le 7 octobre est venu s’ajouter à la longue liste des crises du monde. Ce coup de tonnerre intervenait dans un ciel serein et cette simple constatation dénote de l’immense erreur stratégique Israélienne et des occasions perdues.

 

Le triomphe des extrémistes

La présentation du sept octobre dans nos médias fut partielle et partiale, mais devons-nous nous en étonner tant notre presse nous y a habitué ?

Entre racisme et mépris de tout ce qui n’est pas occidental, ils ont réduit l’opération du 7 octobre à la poussée d’une bande de fauves/monstres/terroristes, choisissez votre terme. Le méchant musulman/terroriste par nature (Lisez bien nos médias depuis le 7 octobre, l’amalgame s’y lit sans trop de peine) Pourtant était-ce là l’essentiel ?

En réalité, le 7 octobre marque une union des extrémistes, nous savons désormais qu’une partie des unités affectées à Gaza avait été envoyée en Cisjordanie malgré les avertissements tant internes que transmis par les services étrangers (Ex égyptiens). Ces ordres ne venaient pas de l’état-major du Hamas !

Sans aller jusqu’à dire qu’il y a eu volonté cynique de laisser commettre un attentat, cette allocation de forces démontre une tendance du gouvernement Likoud à remplacer les processus politiques par des faits accomplis et la violence.

Situation d’autant plus grave que les accords d’Abrahm avaient ouvert une nouvelle vague de paix après les accords de camps David et les accords d’Oslo, morts par l’assassinat du premier ministre israélien par un fanatique sioniste !

Notons à ce stade qu’Israël refuse de s’investir lorsque l’accord exigerait de véritables contreparties. Israel a pris les accords d’Abrahm et les avantages qui allaient avec, mais a refusé de régler la question palestinienne. La plaie a continué à suppurer jusqu’au sept octobre.

Être une démocratie n’excuse pas tout et notamment pas de s’en prendre à des populations qui ne votent pas. Car oui on peut reprocher au Hamas d’avoir pris les armes, mais quel autre avenir lui était offert ?

Israël a détruit l’aéroport de Gaza, neutralisé son port et mis les échanges sous contrôle, voire parfois, souvent refusé de payer les droits de douanes qui revenaient aux organisations palestiennes.
Alors, on peut reprocher aux Gazaouites de s’être donnés aux extrémistes, certes… Mais les israéliens se sont aussi donnés aux leurs. Quid du plan de développement des territoires occupés ? Cherchez Gaza 2030, cela n’existe pas ! Israël, puissance occupante acceptait normalement le devoir de s’occuper de ces populations auxquelles il avait pris les outils pour contrôler leur destin. Le contexte peut l’expliquer, voire le justifier, mais il n’exonère pas des responsabilités liées. Il a choisi de ne pas assumer cette responsabilité.

Au contraire, l’appareil politique israélien (Pas militaire, fort heureusement) a joué sur la crise et la confrontation pour construire ses gains politiques. Le Likoud et les partis religieux y ont vu le moyen de réaliser leurs buts (territoriaux voire religieux).

Le sept octobre est né de ce triomphe des extrémistes. Le Likoud et le Hamas ont trouvé un accord pour nous diffuser un concert de heavy Metal, dommage pour les amoureux de la valse !

 

Quand on fait la guerre, il faut la gagner !

Dont acte, c’était la guerre et au lieu de réagir comme après le commando septembre noir où Israël (Oui, le même état) modéra sa riposte et fit l’admiration du monde entier. Au contraire, dès les jours suivant un débat opposait les stratèges et les tacticiens sur l’entrée des IDF à Gaza pour affronter les troupes du Hamas.

Le débat opposait ceux qui écoutaient les positions des responsables gouvernementaux israéliens qui ont formé un cabinet de guerre : Il fallait en découdre et l’armée Israélienne vaincrait le Hamas au sol dans un jugement de dieu magnifié.

Hélas, les tacticiens avaient prévenu : Le combat ne pouvait être gagné contre une guérilla pour laquelle il suffit de ne pas perdre.

Le résultat fut pire que les avertissements des stratèges, car l’amour des dirigeants occidentaux (Pas seulement israéliens) pour la guerre masque leur manque de compréhension de la réalité du phénomène :

La guerre n’est pas une compétition où vous tuez des adversaires et vous lancez dans une course au plus grand nombre de bombes larguées sur des civils. Elle est au contraire de briser la volonté de combattre de l’adversaire.

Sur ce plan-là, grand Schelem israélien ! Nous savons depuis la guerre contre le terrorisme que chaque victime collatérale cause sept recrues pour les mouvements terroristes. Pour cette raison, Israël commencera par un bombardement indiscriminé de Gaza qui causera des dizaines de milliers de mort civils (On parle de 40K, ce qui fait 280K nouveaux combattants pour le Hamas) Bravo, Israël avait assuré le recrutement du Hamas pour une décennie. Beau gâchis.

Et un an plus tard, on en est là : La brillante stratégie/Tactique/incompétence a conduit les troupes israéliennes à combattre dans Gaza encore un an plus tard face à un Hamas dont les bataillons ont réussi à remplacer leurs pertes.

On fait mieux comme succès stratégique et pour éviter de reconnaître l’échec, le gouvernement israélien se lance dans une politique d’assassinats ciblés contre le Hezbollah sur le front nord.

Résultat, Israël est entré depuis quelques jours au Liban, histoire de tenter le match retour de sa défaite de 2006.

 

Des dizaines de milliers de morts pour l’infamie et placer Israël en danger

Résultat d’un an de guerre : une large partie de l’opinion publique mondiale en vient à haïr ce pays dont la survie a toujours dépendu de l’appui international. Bravo, belle manière de scier la branche sur laquelle on est assis.

Autre résultat, l’armée Israélienne, non contente de combattre les bataillons du Hamas sur leur terrain se trouve désormais en ligne face à ceux du Hezbollah avec ses cent mille hommes. Soit Vingt mille hommes du Hamas, plus cent mille du Hezbollah, un magnifique fois six dans le rapport de force. Combien de temps, Tsahal pourra-t-elle faire face à cette dégradation du ratio amis/Ennemi ?

Enfin, les provocations ont provoqué une forme de guerre aérienne avec l’Iran et les Houtis. Désormais, la défense AA israélienne a été percée à nombre de reprise et rien que la consommation de munitions de ces démonstrations de forces posent problème dans un occident à court de missiles de défense après les combats d’Ukraine et du moyen orient.

 

Force est de constater que Hamas et Hezbollah ont intérêt à laisser pourrir la situation, car le temps qui passe les arrange. Mais, coté Israélien, le pouvoir politique n’a pas de stratégie pour réduire les tensions.

Dès lors, la montée aux extrêmes semble programmée qu’en sera-t-il au moment où Hamas et Hezbollah décideront d’utiliser le cœur de leurs arsenaux ?

En réalité, cette montée des tensions pose la même question qu’en Ukraine : les pouvoirs occidentaux ne sont plus capables de reculer avec grâce et s’enferment dans une stratégie de joueurs perdants. La seule méthode étant de redoubler dans l’espoir que par un déchaînement de puissance, le réel finisse par céder à la volonté de nos gouvernants.

Hélas, on ne remplace pas l’analyse stratégique par le caprice et notre classe dirigeante échoue à comprendre les évolutions du monde.

Cette année de guerre a révélé encore davantage qu’en Ukraine d’importantes évolutions stratégiques qui nuisent aux avantages comparatifs de l’occident et devraient nous obliger à modérer nos ambitions.

Au contraire, nous avons choisi de les ignorer pour nous concentrer sur notre volonté et comme le troisième Reich finissant nous nous réfugions dans les armes miracles et le triomphe de la volonté.

 

 

Et si les Israéliens sont incapables de le comprendre, ils finiront par mettre en danger leur état obtenu au prix de si grands efforts.

Certes, il fut donné par les occidentaux en guise de Méa Culpa pour l’antisémitisme (Théodore Herzel a assisté à la dégradation de Dreyfus). Ce fut au prix d’un viol de la communauté arabe et notamment palestinienne. Mais comme on le dit : L’enfant d’un viol a aussi le droit de vivre.

 

Seulement, cela ne l’exonère pas des crimes qu’il peut commettre au cours de son existence. Israël se met en danger par des actes qui lui valent la réprobation internationnale. Sauf que désormais, ses sponsors ne sont plus capables, pour les raisons que nous avons vu de protéger ce pays contre les conséquences de ses violences et spoliations.

Alors, nous fêtons aujourd’hui les un an de cette campagne, espérons que nous serons capables d’offrir aux parties les moyens de négocier pour éviter un second anniversaire qui sinon rapprochera Israël (Et dix millions de civils qui y habitent) de l’abîme !

 

NB : La photo d'illustration est une création pour illustrer les concepts développés dans l'article.


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