La France peut-elle sortir du chaos ?

par stephane rossard
mardi 11 avril 2006

Est-ce le chaos en France ? Oui, car tous les éléments sont réunis : effondrement de l’exécutif, vide du pouvoir, confusion dans l’action, désordre public, une France fracturée et, à sa tête, des bidouilleurs à la place de visionnaires. Le chaos peut empirer ou au contraire donner naissance à une ère nouvelle. Chaque Français a une part de responsabilité. Son sort et, celui du pays, plus que jamais, est entre ses mains.

Est-ce le chaos en France ? A la lumière des différents éléments qui définissent le ‘’chaos’’, tentons d’apporter une réponse objective :

1er élément : l’effondrement. Comme l’a dit François Bayrou, nous assistons bien à un effondrement de l’autorité politique actuellement en France. Plus exactement de l’exécutif et de sa dyarchie. Autrement dit, du président de la République et du Premier ministre. Comme le relève fort justement le quotidien Le Monde, dans son éditorial en date du 6 avril dernier, nous nous trouvons face ‘’un pouvoir tétanisé, dépassé, voire affolé’’. Une situation qui ne date pas d’aujourd’hui, mais qui remonte à la dissolution malheureuse de l’Assemblée nationale en 1997. Depuis, l’autorité du président de la République n’a cessé de décliner, de s’émousser. D’où une parole de plus en plus inaudible, et contestée par un grand nombre, sans cesse croissant.

2e élément : le vide. Le corollaire de cet effondrement au plus haut niveau de l’État, c’est la création d’un vide. Autrement dit, il n’y a plus de pilote dans l’avion, ou de capitaine à bord ! Ce qui veut dire plus de direction, plus de main forte pour tenir la barre ou piloter dans un ciel sans encombre. Au contraire, la cabine de pilotage étant désertée, laissée à l’abandon, c’est le crash assuré. D’autant que les zones de turbulence sont particulièrement violentes ! L’heure du choc, du heurt fatal avec le sol ou l’iceberg, pour reprendre l’image du Titanic, se rapproche inéluctablement !

3e élément : la confusion la plus absolue règne, à deux niveaux. D’une part, au niveau politique. A la tête de l’État, c’est impossible de se retrouver sur la direction établie. On entend, en effet, de la part du président de la République et de son Premier ministre tout et son contraire : un véritable écheveau impossible à démêler. Cela a été particulièrement criant sur le dossier du contrat première embauche, avec le président qui promulgue une loi tout appelant à la modifier ! Quant au Premier ministre, un jour il campe fermement sur ses positions, le lendemain il se dit prêt à discuter sans tabou !
Confusion aussi sur le terrain. Normal, car les ‘’troupes’’, faute de direction claire, ne savent plus à quel saint se vouer. Ainsi, au Parlement, la majorité, qui hérite du dossier du CPE, se déchire. Dans les entreprises, la question est : que faire ? Appliquer ou ne pas appliquer la loi ? Puisque cette ladite loi est appelée à changer, voire à être abrogée !

4e élément : le désordre. L’essence même, me direz-vous, du chaos ! En effet, les manifestations s’amplifient, les actions éclairs, tels les blocages d’universités, d’écoles, de routes, de ponts, de gares, se répandent aussi vite que la poudre. Les grèves se multiplient... un pays sens dessus dessous. Frôlant avec l’anarchie, car il n’y a plus de maître, ou, pire, son autorité est battue en brèche. En effet, ce n’est plus le pouvoir qui commande, mais la rue qui pose ses diktats. Ainsi, c’est la rue qui impose ses conditions de dialogue : le retrait de la loi. Qui agit à coups d’ultimatums face à un pouvoir apparemment dépassé car faible, en lambeaux. Par ailleurs, la rue appelle à ne pas appliquer la loi. Bref, l’État de droit est bafoué. La subversion l’emporte. La République et l’État de droit ne sont pas loin de la ruine, car respectés par personne.

5e élément : du désordre naît un ‘’terrain fracturé’’. En d’autres termes, un pays profondément divisé, avec des lignes de séparation fortes. Des oppositions qui s’expriment avec passion, qui s’enflamment pour déraper dangereusement sur le terrain du radicalisme, voire de l’intolérance. En effet, on fait plus que contester l’opinion de l’autre, on la rejette. Ce qui se traduit par un non-respect de la différence. Le plus exemple en la matière, ce sont les entraves aux universités. Au nom de quel droit les manifestants empêchent-ils les étudiants, qui ne partagent pas leur contestation, de se rendre à leurs cours ? Une situation scandaleuse. Des méthodes condamnables ! Sans parler d’une unité au niveau national qui a depuis longtemps volé en éclat. La Nation se meurt. A sa place, c’est la consécration des communautés identitaires, qu’elles soient religieuses, ethniques et même, plus dangereuses, raciales ! La fragmentation l’emporte sur la cohésion.

Ce chaos, à qui la faute ? C’est le dernier élément de ce chaos. Car a tout chaos il y a une cause ou un fait générateur. On la connaît, le contrat première embauche. Mais dans ce cas, à l’origine, il est plus pertinent de dire qu’on trouve un homme, ou des hommes. Un homme bidouilleur, pour emprunter un terme au monde de l’informatique, et acteur principal de ce chaos. Autrement dit, une personne qui emploie des méthodes de travail peu orthodoxes, incompréhensibles par quelqu’un d’autre que lui. S’il peut résoudre de petits problèmes, il ne peut pas travailler en groupe. Toute ressemblance avec des personnages existants n’est que fortuite ! Reprenons :
- une personne qui emploie des méthodes de travail peu orthodoxes : appeler au dialogue après avoir fait passer en force une loi. Cela ne vous rappelle-t-il pas la méthode du Premier ministre ?
- une personne qui emploie des méthodes de travail incompréhensibles par quelqu’un d’autre que lui. A part Jacques Chirac, pour qui c’était clair et limpide comme de l’eau de roche, sa déclaration à la télévision, qui d’autre l’a comprise ?

Oui, depuis vingt ans, nous avons eu des bidouilleurs à la tête de la France car ils replâtrent les murs alors que c’est la maison entière qui s’écroule, qu’ils rafistolent alors que le bateau prend l’eau, qu’ils font dans l’homéopathie alors que la France a un besoin urgent d’un remède musclé.

A la lecture de ces éléments, la France, indiscutablement, fait face à un chaos. Un choix donc se présente à la France et aux Français : d’une part, du chaos peut naître une situation plus saine et meilleure avec l’avènement d’un ordre qui remette le pays sur les rails. D’autre part, le chaos peut dégénérer car il s’autoalimente. Et donc entrer dans une spirale infernale sans fin. La France et les Français ont le choix. Le chaos qui empire ou le renouveau. Chacun a une responsabilité. Jamais l’expression citoyen responsable n’a pris autant de sens que maintenant.


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