Aurions-nous la berlue ?
par Roues Libres
mercredi 12 avril 2006
300e épisode du Grand Journal de Michel Denisot, hier soir sur Canal +. Invités, Jamel Debbouze, Diams et Ségolène.
"J’ ai un ange gardien : ma mère", nous avoue Jamel au fil d’une de ses interviews. Jamel est dans l’air du temps. "La France est saturée de peurs" , écrit très justement Luc Ferry dans Le Figaro. Peur de la vitesse, des OGM, de la couche d’ozone, du réchauffement de la planète, des poulets, du chômage, du nucléaire, de la sécheresse, des jeunes, des vieux, de manquer...
"Maman j’ai peur". Nos jeunes nous l’ont braillé à tue-tête au fil de leurs cortèges et de leurs gesticulations. Conservateurs ? Peut-être, féminisés, sûrement. Ne serait-ce que par la proportion frappante de filles dans les cortèges et parmi les leaders d’opinion, dans les facultés. Ce n’est pas souffrir d’un machisme incurable que de soutenir que la féminisation de notre société a pour corollaire un besoin croissant de sécurité. Et que la peur du changement y puise probablement ses racines profondes. Certes les hommes ont failli en politique. Nous sommes dirigés au plus haut niveau de l’ Etat et depuis plus de 25 ans par de vieux caciques, depuis les années Giscard, notre dernière tentative restée sans suite, de modernité en politique. Chirac comme Mitterrand sont arrivés au pouvoir suprême à 65 ans, un âge où le Français moyen se satisfait d’ être en régime de croisière dans une retraite à laquelle il a aspiré depuis si longtemps... Pas de quoi rassurer des jeunes, qui trouvent à juste titre que l’évolution très défavorable de la pyramide des âges fera peser sur leur génération une charge d’autant plus insupportable que les richesses accumulées par les plus vieux leur auront été confisquées. La proportion toujours croissante des familles recomposées joue sans doute aussi un rôle dans cette féminisation de notre société. 125 000 enfants sont concernés chaque année par le divorce de leurs parents, à 73% à l’initiative de leur mère. 13% seulement des enfants sont confiés à la garde du père.
"Maman, j’ai peur". Mais Ségolène est là, mes chéris. Elle n’a pas vraiment de réponses, mais elle est là, ce qui est rassurant en soi. C’est du solide et du sérieux, une maman qui veille. Une famille à elle toute seule. Elle nous montre d’ailleurs la sienne à l’envi, sur de grandes pages de Paris Match. Madame Royal se sent désormais portée. Elle se déclare prête. Les promesses de soutien commencent à s’accumuler sur son nom au PS. Se serait-elle décidée pour la voie Royal ? C’est probable, sinon certain. Rien n’est encore définitif en effet, tant elle recule sans cesse l’épreuve de vérité, celle de la confrontation des programmes. Le moment où une caresse ne suffira plus.
Ségolène Royal a tout compris du rôle devenu central des médias, dans une élection au suffrage universel. Elle en use et en abuse. Presse people, shows TV grand public, une seul débat sans risques sur le CPE sur Europe 1. Quant à la méthode d’élaboration du programme, elle laisse pantois. Elle est l’expression même d’une démagogie assumée et déguisée en "écoute" des Français. Tout, sauf le leadership dont ils ont réellement besoin pour sortir des impasses dans lesquelles ils ont été enfermés.
"Pour avoir commencé à expérimenter la démocratie participative en région Poitou-Charentes que je préside, j’ai acquis la conviction que les citoyens, lorsqu’un problème est vécu ou lorsqu’un progrès est espéré, sont des experts légitimes de la question posée", écrit-elle sur son blog, "Désirs d’avenir". Désirs avec un s, car on le sait, les enfants ont des désirs multiples et souvent contradictoires. Un désir tout simple d’avenir ne suffirait pas à les combler. Donc Madame Royal attend nos idées. Elle se contentera d’en faire le tri, selon des critères qui, par contre, ne nous ont pas été exposés. Il s’agit donc bien de démagogie sélective.
Ce qu’on attend d’un chef d’ Etat dans ces périodes difficiles, c’est d’abord une vision. Une direction à prendre, fondée sur des convictions fortes, qui doivent être soumises au suffrage des Français qui eux, se devront de l’approuver en tout ou en partie. La démocratie participative est un leurre. Un artifice médiatique de plus qui, au mieux, sert l’ image d’une candidate moderne et ouverte au dialogue, ce qui concernant Madame Royal constitue un véritable face-lift, ou au pire tente de masquer la vacuité du projet sous un feu d’artifices. Artificiel et médiatique, c’est le mot qui convient. Comme pour Berlusconi.