Blogosphère : tentatives de manipulation de l’opinion publique

par Michel Monette
vendredi 10 mars 2006

Le New York Times publie une sombre histoire de blogueurs relationnistes de Wall Mart. Doit-on se réjouir du pouvoir médiatique ainsi accordé aux blogueurs, ou s’inquiéter de ces tentatives de manipulation de l’opinion publique par blogueurs interposés ?

Wal-Mart a choisi d’incorporer les blogs dans sa stratégie de relations publiques. Des textes produits par la firme américaine sont expédiés par courriels aux « sous-traitants » médiatiques, qui les reproduisent quasi intégralement sur leurs blogs.

Le journaliste du New York Times a ainsi découvert qu’un billet posté par le blogueur Brian Pickrell reproduit des extraits intégraux de phrases identiques à celles présentes dans un courriel expédié par une firme de relations publiques engagée par Wal-Mart. Pickrell critiquait une législation qui force Wal-Mart à augmenter le montant de ses contributions au régime d’assurance de ses employés.

Autant Wal-Mart que la firme de relations publiques sont formels : aucune rétribution n’est versée aux blogueurs qui reproduisent ainsi les arguments qui leur sont « suggérés ». Peut-être - accordons-leur le doute - mais il y a, dans le comportement des blogueurs qui font le jeu de Wal-Mart, un dangereux glissement.

Pickrell et ses semblables font plus que du plagiat malodorant. Ils jettent un discrédit sur la communauté des blogueurs qui, sans prétendre à la rigueur journalistique, brandissent le drapeau de l’indépendance d’esprit.

Bien sûr, on répliquera qu’il y a toujours quelques brebis galeuses, quelques déviants d’un système dans lequel somme toute, dans l’ensemble, les blogueurs sont assez honnêtes pour avouer ouvertement leurs accointances économiques ou idéologiques.

Bref, tout comme l’armée américaine n’est pas à l’image des tortionnaires d’Abu Ghraib, les blogueurs qui n’avouent pas de quelles mains proviennent leurs textes seraient l’exception qui confirmerait la règle.

L’utilisation des blogs par l’entreprise privée, et les formations politiques, à des fins promotionnelles, n’a rien de nouveau, rappelle le journaliste du New York Times. Nous avons tous à l’esprit ces textes manquant cruellement de recul, vantant les mérites d’un nouveau produit, au point qu’on se demande qui, du blogueur ou du responsable de la commercialisation, les a rédigés.

Le cas de Wal-Mart est différent. Le colosse commercial aux pieds des relations du travail fragiles a choisi d’utiliser délibérément les blogueurs dans une stratégie visant à retaper son image.

Certains soutiendront que tout ceci n’est qu’une tempête dans un verre d’eau. Est-ce le cas ?

New York Times.Wal-Mart Enlists Bloggers in P.R. Campaign.


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