Ethique et journalisme TV

par ilaļ
mercredi 26 avril 2006

Une démocratie saine est une société libertaire dans son expression, aidée par une culture de liberté où le journalisme est multiculturel, multiethnique et religieux. Toute vérité est bonne à dire certainement, mais soyons honnêtes, pouvons-nous tout écouter, tout comprendre ou tout accepter ? Sans parler de censure ou de propagande, le droit à la déontologie n’est-il pas le premier devoir du journaliste ou de son public ? Je suis très loin des chasses aux sorcières ordinaires, pourtant il y a quelque chose qui me choque, ou plus précisément quelqu’un.

Il y a quelques mois, nous apprenions que la reine du 20h de France 2, Béatrice Schoënberg pour ne pas la citer, fréquentait un ministre du gouvernement. Jusque-là point pointilleuse, je me dis que cela reste du domaine des people et que leur vie privée ne m’intéresse pas tant qu’elle ne transparaît pas dans mon 2Oh. Quand soudain... Le pire arrive... Ils se marient. Mme 20h de France 2 épouse sous les projecteurs le ministre de la cohésion sociale, de la solidarité et du logement, M. Borloo, ami des Villepin, Sarkozy ou encore des Chirac, un homme populaire, crédible et pilier UMP, s’il faut le préciser. Et là je tique. Est-ce un procès d’intention que j’entreprends inconsciemment ? Non, loin de là. Quand Mme Schoënberg me donne des nouvelles officielles issues des voies royales du gouvernement, que sait-elle vraiment des bruits de couloir des ministères, où s’arrêtent son devoir de journaliste et son devoir d’épouse ? Quelles limites s’impose-t-elle ? Chef d’orchestre du JT, sans pour autant être un censeur, son pouvoir est loin d’être négligeable. Quand pendant l’affaire du CPE, Mme Schoënberg oublie de préciser que son mari souhaiterait qu’aucun chef d’entreprise ne fasse signer le contrat polémique, ou quand, en remarquant bien, on note que sur TF1 M. Borloo est souvent cité pour de multiples actualités et que sur France 2, même en tant que ministre, il ne fait que de rares interventions, nous pouvons nous poser la question de l’efficacité de son travail de journaliste.

Sans la mettre directement en cause, est-ce que la fonction de ministre n’est pas antithétique de celle de journaliste ? L’un est engagé, l’autre se doit de ne pas l’être. Certes, le cas s’est déjà présenté, Ockrent ou 7/7, mais les périodes étaient moins agitées et les journalistes moins affichés. Et si Mme Chazal fréquentait M. Sarkozy, personne ne monterait au créneau ? J’ose croire que le tollé serait général. A la suite de tous ces problèmes, la direction de France 2 a demandé une mise à l’écart de la journaliste pendant quelque temps. Une mise au placard, dans le but lui laisser le temps de définir la limite entre les rôles d’épouse et de journaliste ? Aujourd’hui, la tempête du CPE est terminée, et Mme Schoënberg est de retour à son poste. Il faut espérer que France 2 ne la mettra pas de côté à chaque fois qu’elle est personnellement impliquée dans l’actualité...

En tant que téléspectateur d’une chaîne publique, actrice de l’audimat, j’espère qu’elle saura se mettre en retrait et que son objectivité prendra le pas sur son carriérisme. Après Pujadas enterrant M. Juppé avant l’heure, et Hondelatte vexé par quelques calomnies, espérons que Mme Schoënberg ne sonnera pas le glas de la crédibilité de France 2. Après le 12, le JT n’est pas mort, ne quittez pas.

En élargissant le débat, d’autres variantes m’agressent continuellement, comme l’utilisation à outrance d’images chocs pour vendre le JT quelles que soient les conséquences : pour les violences dans les banlieues, une couverture médiatique dithyrambique. Une voiture brûlée vaut-elle d’éclipser toutes les initiatives de quartier ? Pour le mouvement étudiant gréviste luttant pour l’abrogation d’un nouveau contrat précaire, plus de 50 % de couverture journalistique sur les violences de fin de manifestation. De même, je voudrais encore mettre l’accent sur une dérive : celle de l’audimat. Le traitement de l’information en France va à l’inverse de celui des journaux étrangers, où une majorité des reportages s’orientent sur le monde au détriment parfois de leur propre actualité régionale pour couvrir l’international. En France, M. Jean-Pierre Pernault réalise à chacun de ses 13h plus de 50 % de parts de marché, pourtant son journal est ostensiblement axé sur la culture du terroir régional. Où est l’ouverture sur le monde ? Où sont les conflits internationaux qui gangrènent notre société ? Où sont les débats ?


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