Hyperactivité : le rapport de l’INSERM et son instrumentalisation politique
par KHalamity
mercredi 12 avril 2006
La pétition « Pas de zéro de conduite » a dépassé le cap des 100 000 signatures, l’occasion de revenir sur le rapport qui fâche, et sur la facilité intellectuelle qui pousse beaucoup d’entre nous à taxer les enfants d’hyperactifs...
Vous en avez tous entendu parler, de ce rapport. Partout, dans la presse, sur nos petits écrans, et même, semblerait-il, dans l’hémicycle parlementaire. Voici donc les stigmates d’une instrumentalisation politique. Après les grands débats sur la sécurité qui nous ont fait frémir dans nos chaumières si calmes, voici le nouveau fer de lance : la délinquance. Prévenir et "soigner" la délinquance.
Mais franchement, vous parents, vous professionnels de l’enfance, pourriez-vous dire avec honnêteté qu’un petit bout d’homme de moins de 3 ans deviendra un bandit de grand chemin ?
Bien sûr, il y a celui-ci, un peu solitaire, qui n’aime pas prêter ses jouets. Celle-ci qu toutes griffes dehor se bat pour récupérer sa poupée. Et cet autre encore, qui a dérobé les craies du tableau. Un enfant solitaire, un peu chétif, dans un coin de la salle de jeu. Un autre exubérant, "hyper actif" peut-être, qui hurle à longueur de journée et ne tient pas en place...
Moi, je n’y vois que des enfants. Des adultes en devenir. "En devenir".
Aujourd’hui, si j’écris ce petit billet d’humeur, c’est d’abord pour crier ma révolte. Tous dans notre petit confort intérieur, dans nos petites vies tranquilles, nous ne voulons pas être dérangés. Nous ne voulons pas sortir de notre zone de confort. Il est alors aisé, facile, d’envoyer tel enfant chez le psychologue, de taxer tel autre d’hyper actif.
Oui, certains enfants sont remuants. Oui, c’est vrai, certains enfants expriment leur mal être en s’agitant, en mordant, en criant... Pour autant, sont-ils bons pour la camisole ? Sont-ils définitivement perdus ?
Ce serait alors oublier d’écouter les enfants et de les prendre pour ce qu’ils sont. Ce serait alors se décharger de notre responsabilité de parent, ou de professionnel. Un enfant qui remue, ayons la patience de le prendre en charge, et remuons avec lui. Je vous dérange, en disant cela, non ? Tant mieux.
C’est la maman qui vous parle. J’ai une petite fille de 7 mois à la maison, et autant dire que le calme n’est plus de mise dans ma vie. C’est contre ma nature, moi qui suis silencieuse, solitaire, qui aime lire et bricoler... Aujourd’hui je dois danser, chanter, ramper à quatre pattes, participer à de longues parties de chatouilles avec Jade. Mais il ne me viendrait pas à l’idée de dire que ma fille est hyper active.
Je reviens également brièvement sur la propension facile à conduire nos petits bonhommes chez le psy. Une lenteur d’apprentissage, une demande excessive de présence, et hop !!! "Allo, Madame la psy ? Psychotropes et 35 séances ? "
Et si, nous parents, nous prenions simplement le temps de vivre avec nos enfants ? Être enfant, ce n’est pas facile. L’apprentissage de la vie est long, douloureux. Le chemin, semé d’embûches.
Si, en plus, papa et mamans ont des soucis, s’ils se séparent, s’ils boivent, s’ils sont violents, s’ils pleurent, ou s’ils sont simplement un peu largués dans l’exercice de la parentalité, parce que, peut-être, ils sont toujours au fond d’eux des enfants qui pleurent, alors, pour l’enfant, la vie peut devenir vraiment compliquée.
Et si, nous, professionnels, nous prenions simplement le temps d’écouter les petits bobos du coeur, d’expliquer certaines choses avec nos mots à nous. Si nous prenions un peu de temps pour aider, et orienter les parents largués, sans jugement...
Alors, peut-être, en effet, peut-on prédire dès l’âge tendre que certains éprouveront plus de difficultés que d’autres à avancer. Mais ne les condamnons pas pour autant. Et ne les droguons pas non plus. Tout cela, ce serait remettre en cause le principe de la résilience (cf. B. Cyrulnik).
Et si nous laissions à ces grands en devenir l’opportunité de se construire, de se blesser, de se relever, et de faire les bonnes rencontres ?
Pour approfondir :
Enfants, l’autre dérive sécuritaire
Education des tout-petits : il faut des moyens pas des détecteurs de déviance
Des souris et des enfants : haro sur le rapport de l’INSERM
On ne peut pas prédire qu’un enfant de 3 ans sera délinquant