Philippe de Villiers, le meilleur des meilleurs artifices de Nicolas Sarkozy !

par Mathieu2
lundi 24 avril 2006

Philippe de Villiers entre en guerre présidentielle de manière tonitruante. Nicolas Sarkozy dévoile sa stratégie un peu plus chaque jour. Des lièvres dans un marathon...

Le 21 avril 2002 a été un traumatisme pour l’électorat de gauche. Cette donnée essentielle va peser de toutes façons sur son comportement électoral pour 2007 : il va avoir tendance à « voter utile », comprenez PSF. A partir de là, dans cette guerre qu’est la présidentielle, des candidats comme Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin se doivent de ne pas se laisser doubler au premier tour, ni sur leur gauche, ni sur leur droite.

A sa gauche, nous avons vu que Nicolas Sarkozy faisait tout pour avoir Ségolène Royal comme adversaire socialiste. Ajoutons que les événements autour du CPE ont été l’occasion pour le ministre de l’intérieur d’en faire le minimum en matière de sécurité, afin de mobiliser un électorat de droite à bout (on joue sur les peurs, un grand classique de la vie politicienne française), mais aussi de renforcer les gauches extrêmes, ce qui ne manque pas de gêner le PSF, comme François Mitterrand avait su gêner la droite en renforçant le FN. A titre d’exemple, Rennes a été un modèle du genre, avec un véritable bidonville installé Place du Parlement de Bretagne pendant des semaines, au grand dam des habitants du centre ville, une Université de Rennes 2 véritablement assiégée, des mouvements d’extrême-gauche totalement libres et visibles, des manifestations, blocages et casses quotidiennes pendant des semaines, voire des mois.

A sa droite maintenant, il s’agit d’empêcher l’indéboulonnable Jean-Marie Le Pen d’être présent au second tour. Or, Philippe de Villiers, par une campagne tonitruante fondée sur un message central : « l’islamisation de la France », un discours particulièrement musclé, et ces jours-ci la sortie d’un livre choc : Les mosquées de Roissy, arrive opportunément pour concurrencer Jean-Marie Le Pen. Nicolas Sarkozy lui a emboîté le pas hier, reprenant sans vergogne le slogan de Philippe de Villiers : « La France, tu l’aimes ou tu la quittes ! », un slogan lui-même repris... du FN ! Et voici comment on fait glisser le débat à droite. Une belle mécanique politico-médiatique.

Dans le même temps, Philippe de Villiers n’a pas de mots assez durs contre Nicolas Sarkozy, mais presqu’aucun contre Jean-Marie Le Pen et Ségolène Royal. Il s’agit de donner le change ! En réalité, Philippe de Villiers n’a que depuis récemment adopté sa stratégie de pseudo-rupture. Certes, dans la famille de la droite classique, il appartient à la droite de cette droite, mais il n’a jamais cessé d’en faire partie. En 2005, il a sorti un livre pour descendre Chirac : Les turqueries du grand Mamamouchi. Car Jacques Chirac n’a eu de cesse, depuis qu’il est président, de prendre des positions de gauche, au grand dam de Philippe de Villiers et de l’immense majorité de l’électorat de droite d’ailleurs. Philippe de Villiers, lui, n’a jamais rompu avec la famille de la droite. Résumons tout ceci par quelques dates :

- 1986 : secrétaire d’état à la communication dans le gouvernement Chirac.

- 1995 : il appelle à voter Jacques Chirac au deuxième tour pour faire obstacle aux candidats de gauche.

- 1998 : il fait partout liste commune avec le RPR.

- 1999 : il est élu député européen sur la liste de Charles Pasqua, une figure historique du gaullisme. Ils arrivent en tête de la droite, devant le RPR et l’UDF. Il fusionne le MPF avec le RPF.

- 2000 : il quitte le RPF, dont il dénonce la gestion par Charles Pasqua, et recrée le MPF.

- février 2002 : il annonce qu’il ne sera pas candidat aux élections présidentielles de 2002, officiellement pour ne pas « ajouter la division à la division ». Il appelle à voter Chirac au deuxième tour.

- de 2002 à 2004, il est de nouveau député de Vendée et siège à l’Assemblée nationale parmi les non-inscrits.

- 2005 : campagne référendaire sur le Traité européen, il est un des meneurs du non souverainiste à droite, en compagnie de la députée UMP Christine Boutin et du député UMP Nicolas Dupont-Aignan.

- 11 septembre 2005 : il est le premier à annoncer officiellement sa candidature à l’ élection présidentielle de 2007.

Si Philippe de Villiers sert Nicolas Sarkozy en empêchant Le Pen d’être au second tour, il prépare aussi son avenir politicien. C’est la dernière présidentielle pour Jean-Marie Le Pen, il s’agit de s’imposer contre Marine Le Pen et Bruno Gollnisch avec le thème de l’islam/islamisme en France, un thème qui n’est pas central dans le discours du FN, au profit de l’immigration (ce qui n’est pas la même chose). Il a l’avantage de mettre une Marine Le Pen en porte à faux dans sa stratégie de respectabilité du discours frontiste. C’est un angle d’attaque bien pensé, Jean-Marie Le Pen s’étant toujours targué d’entretenir des amitiés avec des musulmans, notamment dans le cadre de la guerre d’Algérie, et en présentant même des candidats FN musulmans aux élections. Philippe de Villiers, lui, en stigmatisant les musulmans, met les pieds dans le plat, désoriente, et espère capter une partie de l’électorat du FN, en plus de capter les votes des milieux le plus à droite de la communauté juive française qui n’ont évidemment, eux, jamais voté Jean-Marie Le Pen.

Médias, livres, petites phrases... La guerre présidentielle a commencé à droite pour Nicolas Sarkozy et Philippe de Villiers. Jean-Marie Le Pen, Dominique de Villiers, François Bayrou, les socialistes, les extrêmes-gauches laissent pour l’instant partir les lièvres. Eux font les tortues. En hexagone, la guerre des ambitions personnelles sera longue. Personnellement, je n’irai pas voter.

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