Sans-abri : à quand des hébergements durables ?
par Médecins du Monde
vendredi 25 août 2006
Les seize missions de Médecins du monde qui travaillent auprès des sans domicile fixe constatent quotidiennement l’aggravation de leur situation. L’association continue donc de réclamer des solutions d’hébergement durables pour les personnes à la rue, et pour cela, poursuit la distribution des tentes.
Depuis plusieurs mois, le bitume parisien est parsemé de tentes de Médecins du monde. « Et l’on ne décampera pas tant que de meilleures conditions d’hébergement ne seront pas proposées », prévient Graciela Robert, responsable de la mission SDF. Avec l’opération « A défaut d’un toit, une toile de tente », entamée en décembre dernier, l’association a déjà distribué plus de trois cents tentes igloo aux sans-abri de la capitale. « Cette campagne-action a pour objectif d’offrir aux personnes à la rue un abri de fortune et de rendre le problème plus visible. Les tentes sont comme des balises », explique Graciela Robert. Plus de cinq millions de personnes se trouvent en situation de mal logement en France, selon le rapport 2006 de la Fondation Abbé Pierre, tandis que 57% des patients vus par la Mission France vivent dans des logements précaires, ou se trouvent sans logement.
Cette situation entraîne une dégradation de leur santé. De plus, leurs conditions de vie sont inacceptables, quel que soit le moment de l’année. Les sans-abri ne souffrent pas moins l’été : l’hypothermie fait alors place à la déshydratation. Les personnes se rendent également moins compte des effets nocifs de la consommation d’alcool. Sans oublier l’éternel parcours du combattant d’une personne à la rue pour organiser son quotidien... « Trouver un endroit pour se nourrir, pour se laver, faire les démarches de réinsertion et de recherche d’emploi. Cela requiert tout un planning et provoque des situations de détresse permanente », note Graciela Robert.
Le profil des sans-abri a changé
Depuis de nombreuses années, sur le terrain, la responsable a constaté une évolution des profils des personnes à la rue : de plus en plus de jeunes, de femmes, et de personnes ayant des problèmes de santé mentale. Et tous les ans, le même scénario se répète : les moyens, déjà insuffisants, mis en place pendant l’hiver, diminuent dès l’arrivée des beaux jours. Alors que leurs besoins restent les mêmes, les personnes à la rue ont accès à moins de places d’hébergement d’urgence, et ont moins de points de distribution de nourriture. « La question n’est pas uniquement financière, insiste Graciela Robert. Ce qui est en jeu, c’est aussi la façon dont on analyse les besoins, et celle dont on conçoit l’aide. Il faut mettre à plat ce dispositif d’hébergement. Ce qui permettra peut-être aussi de diminuer le nombre de refus d’aller dans les centres d’hébergement ». En effet, beaucoup de sans-abri ne veulent pas s’y rendre, car ils ne s’y sentent pas en sécurité, à cause des vols, de l’inadaptation des structures à leurs besoins... Les équipes constatent ainsi quotidiennement la nécessité de sortir des plans d’urgence hivernale et de créer des hébergements durables.
Catherine Petillon, journaliste bénévole à Médecins du monde
http://www.medecinsdumonde.org/terrain/thematiques/thematique_sdf
------------------
Des mesures encourageantes
Selon l’association, les mesures préconisées par le rapport d’Agnès de Fleurieu et de Laurent Chambaud, remis à la ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la Parité le 9 août, sont encourageantes. Ainsi, la proposition de créer un « hébergement de stabilisation » avec des centres ouverts en permanence et sans limite de durée va dans le bon sens : des solutions durables et adaptées aux personnes sans abri. Toutefois, ces mesures doivent être mises en œuvre en nombre, au niveau national, et avant l’arrivée de l’hiver, afin de ne pas retomber dans le schéma des traditionnels dispositifs d’urgence.