Quelles perspectives pour les OGM ?

par Lalmy
mercredi 30 novembre 2005

Les OGM, organismes génétiquement modifiés, ont investi ces dernières années le débat public. Les industriels s’en font les promoteurs en mettant en avant leurs avantages supposés : économies d’engrais et de pesticides, meilleure résistance, meilleure productivité, etc. Des collectifs de citoyens les dénoncent, en soulignant les risques que les OGM font courir à la biodiversité, leur coût qui les rend inaccessibles aux paysans des pays pauvres, le manque d’études sur leur impact sur la santé humaine à long terme. On peut donc s’interroger sur l’utilité et les risques des OGM aujourd’hui. En a-t-on besoin ? Qu’apportent-ils de plus que les hybrides ? Quels dangers représentent-ils ? Actuellement l’absence de débat explique que l’opinion publique soit largement contre les OGM. Cette situation conduit les collectivités locales à adopter des délibérations pour s’exprimer contre les cultures OGM sur leur territoire (2000 communes et 17 régions) au nom du principe de précaution. Cette situation se retrouve au niveau européen : 80 % des Européens s’opposent aux OGM. Le citoyen se sent privé de son droit à l’information, de son droit à l’expression. Ce déficit de démocratie conduit naturellement à des actions de désobéissance civile. La question des OGM est un problème qui est devenu extrêmement politique, et dont les politiques, les premiers, ne peuvent pas faire abstraction. Les élus doivent donc imposer le dialogue et le débat aux lobbies industriels, agricoles et scientifiques, qui essaient d’imposer leurs choix aux individus consommateurs sans les consulter. Le débat doit être ouvert, et tenir compte des enjeux humains, environnementaux, économiques et scientifiques. La France est la deuxième puissance agricole mondiale, elle ne peut pas se permettre de continuer à perdre du terrain dans le domaine de la recherche agronomique face aux États-Unis, même si elle entend promouvoir un nouveau modèle de développement agraire. Dans ce débat, le parti radical de gauche, qui a toujours défendu le citoyen contre les pouvoirs, a un rôle particulier à jouer. Nous devons exiger une grande loi de bioéthique qui repose sur trois exigences fortes : le droit à l’information, l’exigence éthique et une recherche responsable. Mettre fin aux tensions, aux lacunes, à la confusion. Le citoyen doit pouvoir librement choisir les produits qu’il consomme. Depuis le scandale de la vache folle, tout le monde est devenu très sensible à sa sécurité alimentaire, et nous devons exiger, dans notre vie de tous les jours, des produits bon marché, mais de qualité. L’étiquetage et la traçabilité sont actuellement la seule protection dont on dispose, en l’absence d’un cadre législatif efficace ! Or, les textes sur la traçabilité ne sont toujours pas publiés, et une grande confusion règne sur l’étiquetage. Par exemple, le seuil minimum de signalement de présence d’OGM a été relevé par la commission européenne pour satisfaire les agriculteurs produisant du bio qui ne sont pas à l’abri d’une contamination OGM. C’est là, pour eux, un minimum de garantie pour écouler leur production, car un tel risque, n’est, à l’heure actuelle, pas assurable. Nous exigeons le droit à l’information pour le citoyen, c’est-à-dire :

- la traçabilité au seuil actuel ( 0.9)- l’obligation pour les firmes de l’agroalimentaire d’inclure dans leur démarche expérimentale le coût d’une étude toxicologique avant tout essai en plein champ, pour une réelle bio-vigilance. Aujourd’hui, il y a plusieurs instances d’examen au niveau national : Commission du génie biomoléculaire (CGB), Comité de biovigilance, Commission du génie génétique, Commission des biotechnologies de l’AFSA. Il est urgent de réorganiser le système de contrôle et de surveillance pour plus de transparence. En effet, malgré cet empilage de comités Théodule, aucune instance politique ne se prononce sur la localisation des expérimentations, ni le ministre, au plan central, ni même le maire, au plan local. De plus, si le ministre de l’agriculture se prononce sur l’autorisation de principe, c’est ensuite l’industriel qui choisit librement l’endroit où aura lieu l’expérimentation. Cette situation pose un problème d’ordre public, donc une question politique qui ne peut être négligée et doit trouver une réponse par une réglementation précise et exigeante. Nous exigeons la création d’un organisme interministériel unique rattaché à l’AFSA, qui contrôle en amont et en aval le développement et l’expérimentation des OGM, avec des moyens contraignants, pour imposer des procédures qui garantissent l’information et la sécurité des citoyens.

Pour un soutien de la recherche en matière d’OGM. Sans pour autant se détourner de l’agriculture biologique, qu’il convient de soutenir, d’encourager, mais aussi et surtout de protéger, il faut poursuivre la recherche sur les organismes génétiquement modifiés. D’une part, parce qu’ils peuvent effectivement répondre à certains soucis environnementaux (pollution), d’autre part, parce qu’ils offrent des perspectives dans le domaine de la recherche médicale. Toutefois, il est nécessaire de rappeler que le développement des OGM n’est pas la seule voie de progrès pour l’agriculture. Ainsi, les hybrides, moins chers que les OGM, offrent aujourd’hui des possibilités de développement réelles pour les pays les plus pauvres, avec des applications immédiates.

La recherche dans le domaine sensible du vivant doit être une recherche « responsable » et respectueuse de l’humain. On n’acceptera pas les dérives qui ont marqué la recherche nucléaire, qui s’est trop souvent faite au mépris de l’homme, en ex-URSS, aux États-Unis, et même en France.

L’agriculture issue de produits OGM est sans doute une nécessité, parce qu’on ne peut refuser le progrès, parce que demain nous devrons adapter nos productions agricoles à d’autres environnements. Mais elle ne doit pas être une menace pour les générations futures. Elle doit préserver la biodiversité, et ses résultats doivent profiter à l’Humanité tout entière. Ainsi, nous devons nous préserver des dérives en luttant contre l’appropriation du vivant, en défendant prioritairement le certificat d’obtention végétale. Et soutenir la mise en place d’une biovigilance dans tous les pays du monde, et notamment dans ceux en voie de développement, dans le cadre d’une Agence mondiale de l’environnement, sous l’égide de l’ONU. La France ne peut pas, seule, imposer sa volonté dans le domaine agricole, c’est pourquoi ces combats doivent être relayés à l’échelle européenne.


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