Roule ma poule

par C’est Nabum
jeudi 23 novembre 2023

 

Ça marche sur des œufs…

 

Les expressions n'ont sans doute pas un lien, proche ou lointain, avec la réalité. Que vient faire ici la poule pour signifier une quelconque approbation, elle qui depuis le grand virage de l'industrie agroalimentaire, passe son existence en batterie. À moins qu'il y ait là, depuis les années 1950, une pensée visionnaire qui avait envisagé le passage à l'automobile nucléaire.

La poule ne roule pas, ni des épaules ni des pattes du reste. Elle est prisonnière dans quelques centimètres carrés pour pondre sans relâche ou bien se faire un peu de gras. Elle ignore tout du grain qui éventuellement pourrait lui préparer de l'éthanol afin de s'initier elle aussi aux mobilités douces. La volaille est à l'arrêt.

L'autre poule qui nous roule s'habille en bleu. Loin de moi l'idée même de déclarer ainsi à un agent de la fiscalité routière que les radars ont rapporté dix-sept milliards en vingt ans à un état qui a bien fait de mettre tous ses œufs de la police de la route dans ce panier d'oseille et non d'osier. Si ça roule un tout petit peu vite, ça rapporte gros : la poule aux œufs d'or en somme.

La poule ne serait là que pour la rime, on eut pu dire bien des choses en somme pour signifier ce message simpliste : « Roule ma boule ! » aurait du reste légitimement tenu la corde si le second terme n'avait engendré un risque redoutable en passant au pluriel. « Roule le moule ! » quant à lui était sans doute un peu tarte tout en portant en lui un dérapage possible en passant au féminin. Quant à « Roule la foule ! » le gouvernement habitué à cette pratique tenait à s'en réserver l'exclusivité.

La poule était donc la mieux placée pour venir exprimer la satisfaction et le consentement. Quand il s'agit de subir sans rechigner, quoi de mieux qu'un nom féminin ? Imaginez-vous un « Roule mon coq » ou encore « Roule mon beau poulet ! » tandis qu'elle se contente de pondre et de laisser rouler ses œufs tout en fermant son bec.

Le cul de la poule est bien visé dans cette formulation. Il n'y a pas de quoi en faire des salades, le cul de poule sert aussi à cet effet. On aurait pu s'attendre à une réaction de sa part, elle était parfaitement en droit de nous voler dans les plumes, d'oser la prise de bec. Au lieu de quoi, sombrant dans la vulgarité, elle rétorqua de manière définitive « Mon cul, c'est du poulet ! » expression qui mit sa liberté d'expression au pilon.

La boucle était bouclée, la poule mise au ban ou au pot commun de la langue, elle dut se résoudre à rouler ainsi pour exprimer un peu abusivement l'expression de la plus totale satisfaction. Les lexicographes loin de marcher sur des œufs ont forcé le trait sans même chercher des poils aux œufs. Ce « Roule ma Poule » ne risquant pas même la coquille tant dans sa graphie, il était d'une simplicité enfantine.

Nous sommes bien loin de l'incommensurable difficulté à écrire convenablement : « Les poules du couvent couvent ! » et mieux encore, de le lire à haute voix sans erreur. La foule se satisfit pleinement de ce « Roule ma poule » tandis que seuls les marins auraient préféré un « Roule ma houle » bien plus réaliste et imagé. Mais ceux-là durent rester les pieds sur la coque avec la ferme injonction de ne pas se mêler des choses de la Terre.

Bon, j'en ai fini avec mes élucubrations matinales. Il est l'heure pour moi de me préparer un œuf sur le plat, celui-là au moins ne risque pas de rouler et comme disait ma grand-mère, on ne fait pas d’omelette sans casser les œufs. Ne sachant vraiment pas quoi écrire, j'ai pondu ce billet cul par-dessus tête !

À contre-sens.


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