Geoffroy Lejeune au JDD : et pourquoi pas ?

par Laurent Herblay
samedi 8 juillet 2023

Quel tintamarre ! La nomination par Arnaud Lagardère de l’ancien directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles à la tête de la rédaction du JDD a déclenché une grêve de sa future rédaction, un déluge de critiques, auxquelles Arnaud Lagardère a fini par répondre publiquement, et même une tribune signée par 400 personnalités dans le Monde. Des réactions excessives et qui posent bien des problèmes.

 

Les censeurs ne sont-ils pas les extrémistes ?

 J’écris d’autant plus facilement sur ce sujet que je n’ai jamais particulièrement apprécié Eric Zemmour, ses idées et ses prises de position, et que la ligne portée par les médias rachetés directement ou indirectement par Bolloré n’est pas la mienne. Certains attaquent sa performance économique à Valeurs Actuelles, mais l’attaque est toujours si superficielle qu’il est difficile de lui faire crédit : certes, la diffusion de Valeurs Actuelles recule de 8,7% en 2022, mais celle de l’Express recule de 10,4%. Mais surtout, quand la diffusion de L’Obs a perdu 40 000 exemplaires sur 4 ans, Challenges 20 000 et l’Express plus de 80 000, Valeurs Actuelles en a gagné 10 000, malgré le recul de 2022. En clair, dans un secteur en grande difficulté, il faut reconnaître que le bilan de Geoffroy Lejeune, directeur de la publication de Valeurs Actuelles depuis 2016, semble assez bon, en tout cas, bien meilleur que la plupart de ses concurrents.

 Et puis, dans le système économique qu’acceptent et même défendent l’immense majorité des journalistes du JDD, c’est le propriétaire, l’actionnaire, qui décide. Bien sûr, je ne sous-estime pas la grave crise traversée par les médias, que je développe dans mon livre, et les journalistes ont bien sûr le droit de protester, mais au final, ils ne sont pas les décisionnaires finaux. Et surtout, pourquoi ce sont surtout les personnalités de droite assumée qui posent problème dans les médias ? Le problème de Geoffroy Lejeune, c’est qu’il ne suit pas cette « pensée unique » qui domine nos élites politiques et médiatiques depuis des décennies. Et cette « pensée unique » a un centre de gravité au centre-gauche, et tolère les personnes qui vont de la gauche dite sociale-démocrate jusqu’au centre-droite. Mais des personnalités plus à gauche (Ferroni), plus à droite (Zemmour), ou simplement ouvertes (Taddéï) ne sont pas tolérées.

 Car c’est bien ce qu’il y a derrière l’opposition à la nomination de Geoffroy Lejeune : une intolérance extrême à des opinions sortant de cette pensée unique, au point de tout simplement vouloir les faire taire, même si elles sont largement présentes dans l’opinion des Français. Mais ce qui est effarant dans la tribune publiée dans le Monde, c’est de s’opposer à cette nomination parce que « le JDD, avec ses qualités et ses défauts, est toujours resté attaché à la diversité des opinions. Il ne peut devenir un journal au service des idées d’extrême-droite  ». S’il y a bien une chose que Geoffroy Lejeune pourrait apporter au JDD, c’est justement une diversité des opinions, chose tellement absente de bien des médias. Les signataires justifient leur intolérance, et leur refus de la diversité des opinions au nom d’un attachement proclamé à la diversité des opinions, qu’ils refusent en s’opposant à sa nomination !

 Et que dire du qualificatif d’extrême-droite qui lui est affublé ? Aucun des nombreux signataires, ne semble avoir trouvé une déclaration ou un écrit qui pourrait justifier ce qualificatif… C’est juste un terme utilisé pour disqualifier un homme, une xénophobie idéologique tout aussi violente que les autres formes de xénophobie comme le racisme. Que des éléphants prétendument socialistes signent un tel papier n’étonnera personne devant le naufrage complet de ce parti, passé sous les 2% en 2022 ! Dommage que certains signataires n’aient pas pas vu le caractère profondément intolérant, xénophobe et autoritaire d’une telle démarche. Car ce qui gêne aussi, c’est le caractère bien peu démocratique d’une telle démarche. La propension du centre à vouloir faire taire les opinions trop loin de lui rappelle une nouvelle fois que les centristes sont bien les moins démocrates, comme même The Economist l’avait relevé…

 Ce qui est assez frappant aussi, ce sont les dérives idéologiques de cette gauche, tellement assurée de sa supériorité morale, qu’elle cède un peu trop facilement à des penchants autoritaires. Ce n’est pas le rôle d’une ministre de la culture de s’émouvoir de la nomination d’un directeur de publication d’une opinion différente, en tout cas pas dans une démocratie qui fonctionne bien. Ce faisant, elle révèle des penchants autoritaires dignes de régimes peu démocratiques. N’est-ce pas parce qu’ils croient à leur supériorité morale que certaines personnes de gauche en viennent à défendre des positions totalement aberrantes par rapport à leurs valeurs, qu’ils en oublient tous les principes démocratiques quand ils veulent faire taire des personnes d’opinions différentes, ou quand ils défendent les accoutrements promus par des islamistes misogynes dont le seul objectif est de promouvoir leur religion tout en renvoyant les femmes à une condition moyenâgeuse, où elles sont inférieures aux hommes ? Quel naufrage !

 Ce faisant, la seule preuve d’extrémisme ici me semble bien davantage être l’intolérance des censeurs à l’égard de Geoffroy Lejeune. C’est lui qui apporterait un peu de diversité à un paysage médiatique bien trop uniforme. Cette levée de boucliers totalement excessive ne fait que révéler le caractère nauséabond de ce centre-gauche conformiste, intolérant, xénophobe et autoritaire.


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