L’écologie à deux vitesses
par ÇaDérange
mercredi 3 mai 2006
La célébration de la catastrophe de Tchernobyl donne lieu à un comportement schizophrène des associations écologiques et des Verts.
Je m’explique. Ces associations se sont positionnées depuis le début de leur émergence médiatique et politique, comme des adversaires "totaux" du nucléaire en général et de l’industrie nucléaire civile. Avec de grand succès, puisqu’elles ont réussi à faire en sorte que la construction de centrales nucléaires s’arrête, et surtout que le développement de types de centrales futures comme les centrales surgénératrices soit totalement arrêté après une longue lutte de leur part, qui a culminé avec la décision prise par Dominique Voynet de fermer et de démanteler la centrale pilote de Creys Malville.
Et puis le réchauffement climatique qui, jusqu’alors, n’avait pas été véritablement appréhendé comme un danger écologique majeur, a émergé comme le problème écologique majeur qui menaçait la planète et l’humanité tout entière. Et toutes les études suivantes ont confirmé que les conséquences de ce réchauffement climatique pouvaient être tragiques pour la planète.
Coup dur pour les écologistes. Car la seule source d’énergie de masse qui ne produise pas de CO2 est le... nucléaire. Bien sûr, il y en a d’autres, l’hydraulique qui est aussi une source d’énergie de masse (cf. le barrage des Trois Gorges en Chine, qui produit l’équivalent de 20 centrales nucléaires) mais dont quasiment tous les sites potentiels ont déjà été équipés, dans les pays développés tout au moins. Le solaire est d’un coût exhorbitant, et n’est pas une source d’énergie de masse. L’éolien a un certain potentiel, mais avec l’inconvénient majeur de ne pas être là quand on a besoin de lui. Les éoliennes ne sont utilisables que 25% de leur temps, le vent est le moins fort et le moins présent en hiver, là où est le pic de la demande, et les installations d’éoliennes suscitent des réactions de rejet. Restent la biomasse et les biocarburants dont le potentiel quantitatif n’est pas non plus énorme, en raison du déficit de terres arables.
Que faire, donc, quand on est écologiste ? Fermer les yeux et poursuivre, comme si de rien n’était, dans ses luttes traditionnelles anti-nucléaire. Ou bien reconnaître la réalité des choses, qui est que l’effet de serre est un problème bien plus important et prioritaire que l’arrêt de l’énergie nucléaire. Et que cette énergie est, dans l’état actuel des choses, la seule réponse aux besoins quantitatifs en énergie d’une planète dont les besoins vont en s’accélérant et les ressources fossiles en s’épuisant. Et que la technique du nucléaire civil - en dehors de Tchernobyl, qui était tout autant une catastrophe d’un système sociopolitique qu’une défaillance technique non maîtrisable- était infiniment plus sûre que celle de l’extraction du charbon (un Tchernobyl tous les deux ans, en Chine !) et pouvait être considérée comme un risque acceptable face aux besoins d’énergie de l’humanité.
Certains écologistes ont pris le parti d’accepter la réalité. C’est le cas, par exemple, du pape de l’écologie britannique, James Lovelock qui, comme je vous en avais fait part dans un message du 1er mai 2005, demande à ses compatriotes de relancer l’industrie nucléaire. Les nôtres restent dans la tradition de leurs combats traditionnels et préfèrent fermer les yeux sur le réchauffement climatique.
C’est cette schizophrénie aveuglante qui apparaît à l’occasion de l’anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl, où l’on a pu voir la France de l’antinucléarité, aidée par des médias amateurs du sensationnel sans réflexion critique, se déchaîner contre le nucléaire.Un Parti socialiste qui se prononce contre l’EPR de Flamanville sans nous dire comment il compte répondre aux besoins énergétiques immédiats du pays. Chez les Verts, Monsieur Yves Cochet, candidat à la présidence, repliant ses banderoles pour les réutiliser encore et encore, en même temps qu’il nous décrit, dans son livre récent, un monde de l’après-pétrole moyenageux et insupportable. Enfin, Greenpeace ou CAP21, dont le silence est assourdissant sur la manière dont ils comptent résoudre la quadrature du cercle.
Je recommande aux Français de lire le livre d’Yves Cochet pour voir le monde que les écologistes nous proposent. Le repliement sur soi et le retour au Moyen Age, en quelque sorte. Il n’y a vraiment rien qui puisse nous attirer, surtout dans un contexte où les autres pays, dans le même temps, auront, eux, su refuser le retour au Moyen Age et se seront réorientés vers le nucléaire civil (cf. mon message du 23/02/06 : Nucléaire : sont-ils tous idiots ?).
A mon sens, le rôle des politiques n’est pas de nous présenter un monde cauchemardesque, mais de prendre les mesures pour éviter qu’il ne se produise. Je ne suis pas un grand fanatique du nucléaire, mais je préfère le nucléaire civil, une disponibilité énergétique suffisante, une économie qui continue à nous assurer notre subsistance, et une maîtrise du réchauffement climatique acceptable, car c’est probablement le mieux que nous pourrons faire, même avec le nucléaire...