La France et son aide ŕ la lutte contre la pauvreté dans le monde

par TSAKADI Komi
mercredi 16 août 2006

Malgré l’engagement de la France à trouver des mécanismes innovants pour le financement de la lutte contre la pauvreté dans le monde, notamment, la taxe sur les billets d’avion, le compte épargne co-développement... elle vient d’être classée 17ème sur 21 des pays riches pour ce qui est de leur implication dans ladite lutte par une Ong américaine : le Centre pour le développement mondial[1], rétrogradant ainsi de trois rang par rapport à 2005.


Ce classement annuel établi depuis 2003 (publié dimanche dernier) et plaçant en première place les Pays-Bas[2], s’appuie sur un « indice d’engagement en faveur du développement » qui analyse sept aspects de l’implication des pays riches : le montant et la qualité de l’aide financière, l’ouverture envers les exportations des pays pauvres, les investissements, l’immigration, l’environnement, la sécurité et le développement des technologies.


La France est notée par rapport à sa piètre politique d’accueil des populations issues des pays pauvres, (16ème sur 21), pour ses « importantes exportations d’armes vers les pays non démocratiques » (21ème sur 21 en ce qui concerne le critère de sécurité), 9ème sur 21 pour l’aide internationale, 14ème pour les investissement et 10ème pour le commerce.


Même s’il est permis de douter un peu d’un tel classement opéré par une Ong américaine, une des vecteurs de l’influence américaine, cela vient corroboré le constat fait par l’ActionAid UK[3] une Ong britannique qui avait épinglé la France comme étant l’un des pays mauvais donateurs, 89% de son Aide publique au développement (APD) étant qualifiée de « fantôme » car retournant en France (financement des consultants, la logistique occidentale...) par rapport à l’aide réelle qui sert directement à l’éradication de la pauvreté.

Dans ces conditions, il ne fait aucun doute que la réalisation des « Objectifs de Développement pour le Millénaire » (ODM) soit hypothétique. Adoptés en septembre 2000 dans le cadre des Nations Unies, les OMD ambitionnent entre autre de réduire de moitié la pauvreté dans le monde d’ici 2015.

Les huit OMD (réduire de moitié l’extrême pauvreté ; favoriser l’accès à l’éducation pour tous les enfants ; promouvoir l’égalité et l’autonomisation des sexes ; réduire la mortalité infantile et améliorer la santé maternelle ; combattre l’épidémie du sida et le paludisme ; favoriser l’accès à l’eau potable ; assurer un environnement durable et développer un partenariat mondial entre le privé et le public) ont donc peu de chance d’être atteints en 2015.

Au regard de ce classement, on ne doit pas s’étonner de la faiblesse d’influence de la France de plus en plus marginalisée dans le monde par rapport aux grandes Nations comme les Etats-Unis et la Grande Bretagne.

En effet, à défaut de rivaliser avec l’Hyper Puissance des Etats-Unis, la France aurai pu développer un soft power par le biais de l’aide à la pauvreté dans le monde. Soft power est un terme inventé par Joseph S. Nye en 1990 qui consiste à attirer dans son camp des pays par un jeu d’influence et d’attraction, sans avoir recours à la « puissance dure » (hard power) combinant la pression militaire, financière ou économique.

Sans cela, la pérennisation de la France en tant qu’acteur crédible sur la scène internationale restera compromise.

Pour cela, un soft power à la lutte contre la pauvreté suppose que la France trouve des solutions aux règles commerciales drastiques (taxation perverse des produits africains et pratique des subventions agricoles) et au poids écrasant de la dette extérieure des pays pauvres.

Il implique aussi que la France revoit ses « importantes exportations d’armes vers les pays non démocratiques » notamment africains. Plutôt que de soutenir des régimes corrompus et autocratiques africains (Togo, Tchad, Gabon, Cameroun...) qui n’offrent d’autres perspectives à leurs populations que la révolte et l’immigration, elle devra contribuer par son soft power à la démocratisation vraie de ces pays pour l’installation des gouvernements issus des élections libres et transparentes. Elections permettant à des personnes animées par l’exigence de résultats, proposant des idées nouvelles et performantes pour sortir résolument ces populations du cycle de la pauvreté, d’accéder au pouvoir.

Komi TSAKADI



[1] www.cgdev.org

[2] Pays Bas, Danemark ; Suède ; Norvège ; Nouvelle-Zélande ; Australie, Finlande/Autriche ; Allemagne ; Canada/Suisse ; Etats-Unis/Irlande ; Belgique ; Portugal/Espagne ; France ; Italie ; Grèce ; Japon.

[3] www.actionaid.org


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