Maurane n’est pas un chiffre
par Caro
mardi 22 août 2006
Certains chiffres nous ont été tellement répétés qu’ils en deviennent insignifiants... Nous le savons tous, des milliers d’enfants meurent tous les jours en Afrique et ailleurs, par manque de nourriture, par manque de soins, par manque d’eau potable... Je pourrais rechercher ces chiffres, les répéter une fois de plus ; mais Maurane m’obnubile.
Elle vient de naître, nous sommes le 8 juin 2006 à Addis Abeba, capitale de l’Ethiopie, l’un des pays les plus pauvres de la terre, fameux berceau de l’humanité. Dagemawit est son prénom éthiopien, elle n’a pas de nom de famille car elle sera abandonnée le lendemain de sa naissance. Si petite, fragile et seule, elle est confiée à l’orphelinat. Elle devient alors notre fille, elle s’installe dans nos cœurs, nous sommes ses parents adoptants. Elle est si belle, si paisible sur les photos que nous avons d’elle. Elle devient Maurane Dagemawit Ady. Elle n’est plus seule.
Fin juin 2006, Maurane a 20 jours. A l’orphelinat le pédiatre la voit et rédige son dossier médical. Elle est en bonne santé malgré son petit poids, 2 kilos à 20 jours. A des milliers de kilomètres d’elle, tout s’organise : sa chambre, les doudous, la poussette, les vêtements... tout se met en place pour l’accueillir dans sa maison. Nos familles, nos amis sont déjà fous d’elle, petite princesse du bout du monde. Nous rêvons au voyage qui nous permettra d’aller la chercher, de la serrer dans nos bras.
Maurane a 50 jours et elle vient de mourir. Nous sommes le 28 juillet 2006. C’est la saison des pluies en Ethiopie, il pleut sans discontinuer sur la capitale éthiopienne. Il doit faire froid et humide à Addis Abeba, notre petite fille ne le supportera pas. Nous n’aurons pas pu aller la chercher à temps, nous n’aurons pas pu la serrer dans nos bras, la protéger, la câliner. Maurane a rejoint les anges. Nos sentiments pour elle resteront à jamais, mais ils demeureront à l’état de pensées aimantes envolées de France vers l’Ethiopie.
Des milliers d’enfants meurent tous les jours en Afrique et parmi eux, le vendredi 28 juillet 2006, Maurane Dagemawit Ady, notre fille.
Des milliers d’enfants meurent tous les jours en Afrique mais ces chiffres froids, anonymes, trop brutaux, trop entendus, ne percutent plus ni nos cerveaux ni nos cœurs. Mais Maurane n’est pas un chiffre ; elle ne le sera jamais, comme ne le seront jamais ces milliers d’enfants.