Violente offensive de l’Iran et de ses alliés

par PAF 2.0 (Politique arabe de la France)
vendredi 16 décembre 2005

L’Iran et ses alliés (Hezbollah, Syrie, Hamas et Jihad islamique) mènent actuellement une offensive de grande ampleur au Moyen-Orient. Que va faire l’Europe ?

Les objectifs visés sont les suivants :

Les moyens mis en oeuvre sont : la violence terroriste, l’intimidation et la recherche du soutien des masses musulmanes. Ceux qui auraient des doutes sur ce triste constat n’ont qu’à considérer les faits suivants, tous très récents, et largement documentés dans la presse générale :

- Lundi, à quelques heures de la remise du rapport Mehlis II à l’ONU, le député et journaliste libanais Gebrane Tuéni, farouche opposant à la Syrie, a été assassiné à Beyrouth, dans un attentat à la voiture piégée. C’est un acte de défi du régime syrien à la communauté internationale. Comme le dit bien Libé, Damas mène une stratégie de la "casse".

- Dans la foulée de l’attentat de lundi, le Premier ministre libanais Siniora a annoncé son intention de demander une enquête de l’ONU sur la série d’assassinats qui ont frappé le Liban, manifestement seul moyen de protéger le Liban. Aussitôt, les ministres chiites émanant du Hezbollah et de Amal ont suspendu leur participation au gouvernement, à peine quelques heures après l’attentat qui venait de traumatiser le pays entier. Le Hezbollah, plus virulent sur la question que son compère Amal, montre ainsi très clairement où se situe sa véritable allégeance. Plutôt que de se mettre du côté du Liban, mis à mal par l’extrême violence des services syriens, il choisit son alliance stratégique avec Damas et Téhéran. Après tout, c’est logique : le Hezbollah est une créature des Gardiens de la révolution iranienne, les Pasdarans.

- Le Hamas, mouvement terroriste palestinien, a menacé jeudi Israël de représailles sur son territoire en cas d’attaques contre l’Iran, soupçonné par la communauté internationale d’avoir un programme nucléaire militaire. Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, était alors en visite à Téhéran où il rencontrait notamment le Guide suprême de la Révolution iranienne, l’ayatollah Khamenei. Il ajoutait : « Nous faisons partie d’un front uni contre les ennemis de l’islam, chaque membre de ce front se défend avec ses moyens dans sa région ». Il précisait aussi le but poursuivi par son mouvement : « récupérer toute la terre islamique de la Palestine », euphémisme pour « destruction d’Israël ». Reconnaissons aux leaders du Hamas (encore une fois) leur capacité à ne pas tomber dans le politiquement correct. Notons aussi que l’Iran est le premier soutien financier du Hamas, dont le bureau politique se trouve à Damas.

- La semaine dernière, le Jihad islamique, mouvement terroriste palestinien soutenu par la Syrie (où se trouve son bureau de commandement) et qui entretient des liens financiers et idéologiques avec l’Iran, commettait un attentat-suicide dans la ville israélienne de Natanya, y provoquant la mort de quatre Israéliens. Le Hamas décrétait par ailleurs, dans la foulée, la fin de la trêve avec Israël, à partir de 2006. Ainsi, alors que, malgré les difficultés et les lenteurs, le processus de réglement avance entre Israël et les Palestiniens, avec notamment le désengagement de Gaza et l’accord de Rafah, le Jihad islamique et le Hamas, soutenus par leurs maîtres de Damas et de Téhéran, n’hésitent plus à annoncer haut et fort leur volonté de saboter ce processus.

C’est à la lumière de ces faits qu’il faut interpréter les propos du président iranien Ahmadinejad, répétés jusqu’à la nausée, sur l’Holocauste, les Juifs, la tumeur, le mythe, etc. Il s’agit pour l’Iran de s’appuyer sur les masses musulmanes, de se présenter comme leur leader. Et en effet, comme le rappelle Libération, les propos d’Ahmadinejad sont, hélas, tout à fait populaires dans le monde arabo-musulman. Pour ne pas laisser trop d’espace aux chiites iraniens sur ce thème très "vendeur", le guide des Frères musulmans égyptiens, Mohamed Mehdi Akef, tenait d’ailleurs à rappeler, jeudi à Ahram Weekly (interview ici), que lui aussi considérait Israël comme un "cancer"... Saine émulation...

Face à cette alliance redoutable qui veut, autour d’un Iran nucléaire dominant l’Irak à majorité chiite, maintenir la mainmise de la Syrie sur le Liban, quitte à le déstabiliser, et la guerre à outrance contre Israël jusqu’au retrait de la "tumeur" de la terre d’islam, face à cette politique de la confrontation à outrance, les Occidentaux commencent, timidement, à réagir. On sait que les États-Unis ont des moyens d’action limités, et que la Chine et la Russie sont plutôt complaisants à l’égard de l’Iran. C’est donc sur l’Europe, et notamment sur la France, que repose un grand poids de responsabilités. C’est un grand test.

L’Europe doit maintenant faire la preuve qu’elle est capable de se comporter en grande puissance qui a des muscles. La France, notamment, s’est faite la championne (autoproclamée) de la résolution des conflits par le dialogue, la persuasion, la négociation multilatérale. Manifestement, le dialogue n’a que peu d’effets sur l’équipe de tueurs au pouvoir à Damas, et le respect du droit international ne préoccupe que modérément les Ahmadinejad et autres Bachar Assad. Il est donc temps pour l’Europe de montrer qu’elle n’est pas que belle parleuse et donneuse de leçons, mais qu’elle sait agir avec fermeté pour faire respecter des principes universels.

Je note des signes intéressants, des frémissements, peut-être annonciateurs d’une réelle fermeté européenne -dont on est encore loin :

- L’éditorial de Libération de jeudi suggère à la France de geler ses relations diplomatiques avec Téhéran :

Quand le chef d’un État de 66 millions d’habitants, puissance régionale, qui rêve de nucléaire de surcroît, se met hors la loi internationale, nie l’Histoire et appelle à détruire un pays et à déporter son peuple, il n’est plus possible de dialoguer et coopérer avec cet État. Ni de lui reconnaître une voix dans le concert des nations, tant que cette voix n’aura pas changé. Qu’attendent les Européens, et la France la première, pour, au moins, geler leurs relations diplomatiques avec Téhéran ?
- Le nouveau ministre allemand des Affaires étrangères a estimé jeudi que la patience des Européens vis-à-vis de l’Iran avait ses limites. Et pour la première fois, le secrétaire d’État aux Affaires étrangères a, de son côté, évoqué la possibilité que l’Allemagne restreigne l’accès à son territoire aux dirigeants iraniens. On est loin de la diplomatie schröderienne, extrêmement accommodante face à l’Iran. Rappelons que l’Allemagne est un partenaire économique très important du pays perse.

Il s’agit aussi pour la France et pour l’Europe de voir clair dans le jeu régional et dans la volonté de nuisance de groupes tels que le Hezbollah et le Hamas, qui ont trop souvent bénéficié d’une certaine indulgence. Remis dans la perspective de l’offensive iranienne, ces groupes constituent des menaces directes aux intérêts européens : il est temps d’en tirer les conséquences qui s’imposent.


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