Fin d’année, fin de règne
par Bernard Lallement
vendredi 30 décembre 2005
Deux SDF sont, encore, morts de froid, à Lyon et au Mans, portant à 12 les décès dus à l’hypothermie depuis le mois de novembre. Au moment où nombre d’entre nous allons fêter la nouvelle année avec force ripailles, l’annonce n’est pas de celles à susciter notre émoi, notre générosité ou notre compassion. La misère qui s’étale à notre porte fait bien moins recette qu’un Tsunami ou que le Téléthon.
Le sort de ceux qu’on appelle « les accidentés de la vie » est laissé à la discrétion des associations, avec les faibles moyens, financiers et humains, dont elles disposent.
Pensant réveiller le citoyen, plus occupé à ses besognes qu’au sort des nécessiteux, Médecins du monde, qui nous rappelle combien vivre dans la rue est une torture, a distribué des tentes igloo dans les rues de la capitale, l’une des villes les plus riches du monde.
La seule réaction des pouvoirs publics fut celle de Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale, pour dénoncer cette opération qualifiée de « contre-productive », car susceptible de « pérenniser » la situation des sans-abri, sans que la ministre fasse, pour autant, de propositions concrètes et durables.
Car la pauvreté et la précarité s’installent, tranquillement, dans notre pays, et prennent un nouveau visage.
Le Samu social de Paris a observé l’évolution des personnes qu’il a prises en charge entre 1999 et 2004. Il ressort de son étude que les femmes et les jeunes prennent une place bien plus importante parmi les hébergés. « Les femmes sont passées de 15 à 20 % des hébergés entre 1999 et 2004. Les jeunes progressent pendant la même période passant de 0,5 % à 11 %. »
Les couples représentaient, en 2004, 7,6 % des hébergés, contre 4,6 % en 1999.
Quant aux familles, leur nombre a été multiplié par sept durant la même période. Elles étaient 2663 en 2004, pour 400 en 1999.
Aucun indication, aucune volonté des pouvoirs publics, aucune mobilisation de l’opinion ne permettent d’envisager une inversion de cette tendance.
Chirac super casteur
Nous apprenons ainsi qu’en décembre 2004, il aurait essayé de pistonner une actrice, amie de sa fille Claude, auprès du Rom Howard et Brian Gazer, réalisateur et producteur du film Da Vinci Code, et se serait soucié de mieux faire payer l’acteur Jean Reno, qui interprète le rôle d’un détective français. Hélas, tout ceci en vain. L’information est révélée dans la dernière édition du magazine Newsweek et, bien entendu, démentie par le service de presse de l’Élysée.
Une société qui génère de plus en plus d’exclus, et une classe politique déconnectée des réalités quotidiennes, tel est le triste bilan que nous pourrions tirer de l’année qui s’achève.
Photos : Libé - porte de Taroudant