François Bayrou ou « l’histoire de France revisitée »...

par Egnaruas
vendredi 9 mars 2007

Ah, il est bien sympathique notre monsieur Bayrou, et puis propre sur lui en prime (style « Gentleman Farmer » des films Audiard/Lautner des années 70)...

Pas contrariant non plus...

A l’en croire, la France n’attend qu’une seule chose : être gouvernée au centre.

Oui, vous avez bien entendu, nous aspirons tous à revivre joyeusement le bon temps des alliances fumeuses de la IVe République qui ont conduit aux succès que l’on connaît ; et d’en appeler tout d’abord aux mânes du général de Gaulle (qui, soit dit en passant, a quitté le pouvoir en 46, justement parce qu’il ne supportait plus d’avoir à composer avec un "tripartisme" -PC/SFIO/MRP- qui, par son immobilisme, annihilait toute ses volontés de réforme).

Mais ce n’est pas tout : nous avons droit également à l’apologie du gouvernement de Gaulle de 58...

Ah, comme on peut être fier de ce constituant qui, à en croire monsieur Bayrou, a remis la France en marche grâce au soutien unanime des différents partis « de la gauche à la droite ».

La encore l’amalgame est non seulement fumeux et spécieux mais, en plus, furieusement démagogique ; car, soyons clairs, la soi-disant « collaboration fructueuse » entre gauche et droite s’est délitée au fil des mois de mai à décembre 1958 pour laisser la place dès 1959 à un gouvernement de droite « encore plus dur que dur » composé presque exclusivement de ministres UDR (l’UMP de l’époque) dirigé par le non moins pur et dur « intégriste-godillot » UDR Michel Debré.

Mais ce n’est pas tout puisque François Bayrou en appelle aussi au souvenir de Pierre Mendès-France « ce grand Français » qui, à en croire notre candidat a « profondément voulu gouverner au centre ».

Dommage...oui vraiment dommage qu’aucune des réformes souhaitées par PMF n’ait jamais été votée par une droite qui lui a toujours été non seulement hostile mais haineuse ! En effet, pour la droite, Mendès avait quatre défauts « rédhibitoires » : il était juif, de gauche, ne buvait pas de vin et, comble de l’hérésie, aspirait à la décolonisation.

Puis-je amicalement rappeler à monsieur Bayrou que c’est la droite qui a honteusement congédié un Pierre Mendès-France au bord des larmes un funeste soir de 1955 au cri de « bradeur de l’Indochine » !

Tout ceci pour rappeler à François Bayrou que personne, mis à part Georges Clémenceau en 1917 (mais nous étions alors au bord du gouffre en pleine guerre de 14), non, jamais personne n’a souhaité, pu ou voulu gouverner la France au centre !

Ah si, j’oubliais... il existe bien quelqu’un qui, en son temps, a eu le courage d’affirmer que seule « une nouvelle société » basée avant tout sur l’écoute desFrançais et le dialogue social pouvait sortir la France de l’ornière : ce précurseur s’appelait Jacques Chaban-Delmas.

Mais cette précision mérite un petit rappel : à votre avis, qui a tué dans l’œuf « l’initiative Chaban » ?

Eh bien tout simplement l’alliance du président UDR de l’époque Georges Pompidou et du père spirituel de Monsieur Bayrou : Valéry Giscard d’Estaing (qui, bien que centriste, n’a pourtant jamais gouverné avec un seul ministre de gauche durant sept ans !)

Force est donc de constater que François Bayrou s’ingénie en permanence à faire mentir l’histoire afin de persuader les Français qu’il est le seul recours entre deux alternatives « qui ont démontré leur inefficacité depuis vingt ans... »

Mais, que je sache, François Bayrou a ardemment et longuement participé à plusieurs de ces gouvernements sans qu’à aucun moment l’inefficacité qu’il décrit si bien n’ait entravé son action au sein de collègues ministres de droite !

Et ce n’est pas le fait qu’il ait voté une motion de censure contre le gouvernement actuel, qui n’avait réellement aucune chance d’aboutir, qui me réconciliera avec son absence fondamentale de « volonté politique ».

François Bayrou n’a strictement aucun programme « construit » (l’avez-vous entendu déjà entendu parler « sérieusement » de politique étrangère, de lutte contre les inégalités, de précarité, de développement durable, etc..)

Mis à part cette utopie « Louis-Philipparde » mille fois rabâchée de « gouvernement au centre » (mais avec quelle majorité gouverner ?), il ne cesse de déblatérer un monceau de propos démagogiques et... soporifiques !

Alors, ne nous leurrons-pas : François Bayrou (à son corps défendant peut-être) « roule pour Sarko » en tentant de « ratisser » le plus largement possible encore plus sur sa gauche que sur sa droite...

Il y a fort à parier qu’au soir du premier tour notre 3e homme soi-disant « au dessus des partis » monnaiera âprement les suffrages qui se seront portés sur son nom avec un Nicolas Sarkozy ravi de l’aubaine, malgré ses propos du moment.

Que ne ferait-on pas en échange d’un beau portefeuille ministériel avec, tiens, en prime, un titre ronflant de ministre d’Etat.

Alors, ne soyons pas dupes du traquenard... votons en fonction de nos sensibilités et de nos convictions et non pas en fonction des propos lénifiants et « faussements encourageants » d’un candidat « faux nez » de la droite qui masque la réalité de ses ambitions sous l’apparence trompeuse du « père tranquille » qu’il n’est pas.

Pour ma part, c’est tout vu, je ne tomberai pas dans le piège de la facilité...


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