Le harcèlement commence dans les jeux de cours

par CHALOT
dimanche 4 juin 2023

Le harcèlement en général et le harcèlement scolaire en particulier a fait la une des journaux à la suite du suicide d'une adolescente de 13 ans.

L'émotion est très grande dans la région de Lille et dans toute la France.

Cette jeune fille qui a mis fin à ses jours après avoir subi de nombreux harcèlements peut être une fille d'ami, une voisine, quelqu'un de proche.

D'ailleurs elles nous est proche.

Cette question me touche particulièrement, comme ancien instituteur, comme formateur enfance et aussi parce qu'elle me renvoie à un passé vécu d'enfant, c'était loin, très loin mais j'y pense encore.

Il n'y avait pas internet, ni de téléphone portable, mais il y avait le bizutage, ce jeu initiatique qui n'a de jeu que le nom .

Le harcèlement

https://www.education.gouv.fr/non-au-harcelement/le-harcelement-c-est-quoi-325361

« Le harcèlement est défini comme étant une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique.

À l’école, elle est le fait d’un ou de plusieurs élèves qui se fondent sur le rejet de la différence et sur la stigmatisation de certaines caractéristiques d’une personne qui ne peut se défendre (l’apparence physique, le sexe, le handicap, un centre d’intérêt original, etc.).

Ce rapport de force et de domination, ainsi que la régularité des agressions dans le temps, participent à l’isolement de la victime. »

Le harcèlement ne vient pas comme cela, il est inhérent à des habitudes, une « culture », rien de méchant, dit-on.

Les jeux de brimade sont les ancêtres des comportements conduisant à harceler d'autres personnes, à les mettre en difficulté, à les isoler, à se moquer d'elles et à les mettre au ban de la micro société que l'on structure.

Dans les stages BAFA, les formateurs ne devraient pas faire l'impasse sur des « petits jeux cons » et d'ailleurs, aux FRANCAS et aux CEMEA, ces jeux sont analysés, dénoncés.

Les fameux jeux à gages participent de cet univers infernal pour certains enfants car ce sont les mêmes enfants qui parce qu'ils sont moins réactifs ou peu coordonnés qui se retrouvent à la suite d'un jeu qu'ils ont perdu obligés de passer par une épreuve.

Prenons la chandelle, celui qui n'a pas vu le foulard mis derrière son dos doit par exemple faire le tour du cercle à clache pied et se retrouve au centre …

Il doit alors lever le bras... puis deux... si une deuxième fois il ne voit pas le foulard mis derrière lui.

Comment me dira le commentateur, ce jeu est innocent, traditionnel !

Non ! Rien n'est innocent quand devant le groupe il met en difficulté un enfant.

Il est possible de s'amuser, de faire des chandelles sans gage.

C'est comme le jeu des chaises musicales : l'animateur installe autant de chaises moins une que de participants et demande aux enfants de tourner autour et lorsqu'il interrompt la musique, tous doivent trouver une chaise et celui qui n'y arrive pas est éliminé.

Dans la phase suivante, on retire une autre chaise, puis deux.

Tout le monde semble s'amuser, sauf le « pauvre » qui est éliminé immédiatement.

« Vraiment ! Tu exagères, la vie avec toi risque d'être triste » !

Pourquoi rejeter, exclure alors que l'innovation peur contribuer à faire que le rire ne soit pas provoqué par des exclusions.

Connaissez-vous les chaises musicales coopératives :

on retire à chaque fois une chaise, le jeu consiste à se retrouver tous sur le moins de chaises possibles, personne n'est éliminée, c'est la coopération qui prime.

Certains jeux de cour, traditionnels qui se perpétuent d'une génération à l'autre méritent d'être revisités.

Prenons le fermier dans son pré, c'est souvent, le même, le plus fragile qui se retrouve être « le cochon » qui est battu.

Avec des stagiaires, nous avons modifié la règle et au lieu de terminer par tous les participants qui frappent « théoriquement » mollement sur le dos du cochon, nous avons décidé de faire une danse.

Le rôle de l'adulte, de l'éducateur est important, il se doit à chaque fois de réfléchir aux objectifs qu'il se fixe et que jamais un enfant ne soit moqué, mis de côté.

Je vous assure que c'est possible et que sans raillerie stupide, on s'amuse mieux.

Dans son livre https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/65562 dont je vous conseille la lecture, Smina Kernoua revient sur plusieurs mauvais souvenirs scolaires comme celui-ci ;

« Comme je n'ai pas les moyens d'acheter une flûte, pendant les cours de musique, le couloir devient mon lieu de confinement. »

L'attitude de l'institutrice est inqualifiable !

Comment combattre le harcèlement scolaire si des adultes se prennent au « jeu » sans en mesurer les conséquences ?

Un enfant humilié devant ses pairs par un adulte a peu de chance de s'en sortir indemne !

 

Combattre le harcèlement, c'est refuser le mépris, c'est respecter tous les enfants, montrer par l'exemple et pas uniquement par le discours que chacun doit être protégé et surtout ne jamais être montré du doigt ou moqué par l'adulte de référence.

 

Jean-François Chalot

 


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