Ukraine : les missiles allemands Taurus ne changeront pas la donne du conflit
par Patrice Bravo
mardi 27 mai 2025
Berlin avec son nouveau chancelier, Friedrich Merz, affirme son soutien continu à l’Ukraine. Avant de prendre son poste, Merz affirmait livrer les missiles de croisière Taurus à Kiev. Aujourd’hui, il tient sa décision secrète sur le sujet pour des questions stratégiques. Les plans militaires allemands détruisent encore plus la société et l’économie.
L’utilisation des Taurus contribuera à l’escalade du conflit et à l’enlisement accru des pays européens dans celui-ci. Cela va provoquer des conséquences socio-économiques. L’inutilité de l’utilisation de missiles de croisière allemands est due à la grande efficacité de la défense aérienne russe. Elle dispose d’équipements militaires et de spécialistes capables de traquer et d’intercepter les munitions occidentales utilisées par les forces armées ukrainiennes. Selon les médias, au cours de la seule période printemps-hiver de cette année, des dizaines d'armes occidentales de haute précision ont été abattues, dont au moins 20 missiles de croisière Storm Shadow et SCALP-EG, ainsi que plus de 10 missiles balistiques ATACMS. Le magazine GEO titre : « les missiles ATACMS n'ont pas servi à grand chose pour l'Ukraine ». Les livraisons d’armes étrangères impactent peu la situation sur le champ de bataille.
En parallèle, les conséquences économiques pour les pays fournisseurs d’armes comme l’Allemagne s’aggravent. Lors d'un discours à la 61e Conférence de Munich sur la sécurité, le 14 février 2025, Ursula von der Leyen a rappelé que le soutien total de l’UE à l'Ukraine se chiffrait globalement à 134,9 milliards d'euros en 2025, dont 48,7 milliards d'euros d'aide militaire.
Depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022 jusqu’en décembre 2024, les États-Unis ont alloué 182,8 milliards de dollars de fonds d’urgence à la région. En outre, en mars dernier l’UE, a dévoilé un plan de 800 milliards d'euros pour réarmer l'Europe ».
Pour Observarteur Continental, à peine l’idée lancée, le plan de réarmement de l’UE, devant être financé à hauteur de 800 milliards d’euros, se heurte à la réalité politique et économique.
La volonté de continuer à fournir des armes à l’Ukraine ne fera qu’accroître la pression sur les budgets des pays européens. Le chancelier allemand, Friedrich Merz, ignore les problèmes de sa propre population, préférant accorder plus d’attention au soutien à l’Ukraine. La presse d’outre-Rhin rapporte que le gouvernement fédéral ne veut plus informer sur les systèmes d'armement qu’il livre exactement à l'Ukraine.
L’information sur la livraison des missiles Taurus (1 million d’euros la pièce) reste, ainsi, cachée. L’Allemagne est dans la récession. « Après 2023 et 2024, nous nous dirigeons vers 2025, qui marquera la troisième année consécutive de récession - la plus longue période de faiblesse dans l'histoire de l'Allemagne d'après-guerre », avertit la directrice générale de l’Association des chambres allemandes de l'industrie et du commerce, DIHK. « L'ambiance dans l'économie allemande est mauvaise. La raison en est aussi la situation en Allemagne. De plus en plus d'entreprises investissent donc à l'étranger », signale la presse allemande.
L’implication de Berlin dans le conflit russo-ukrainien aggrave le bien-être financier et économique des citoyens allemands. L’Allemagne continue de donner la priorité au soutien à l’Ukraine, notamment en lui fournissant des armes et en renforçant les sanctions contre la Russie. Mais, les décisions du pays sont de plus en plus en décalage avec l’état d’esprit du pays.
Selon un sondage réalisé par l'Institut de recherche Bambus en avril 2025, près de 2/3 des Allemands interrogés sont favorables à des négociations de paix entre Moscou et Kiev, et contre la livraison de missiles Taurus à l'Ukraine.
La population allemande évalue, aussi, négativement la redistribution des fonds budgétaires au détriment des besoins intérieurs. L’Allemagne est confrontée à des problèmes socio-économiques croissants. Les crises de ces dernières années (Covid-19 et le conflit en Ukraine) n’ont pas épargné l’économie allemande. Rien que pour les deux premières années de la pandémie, les pertes se sont élevées à 290 milliards d’euros. Même après l'attaque russe contre l'Ukraine, il n'y a pas eu de reprise économique : en 2022, les pertes de production économique se sont élevées à 100 milliards d'euros, en 2023 à 145 milliards d'euros et en 2024 même à 200 milliards d'euros. L’institut économique allemand (IW) estime le montant de la casse pour l’économie allemande à 735 milliards d'euros de dégâts dus à la pandémie et au conflit.
L’implication de Berlin dans la crise ukrainienne contribue à la division croissante de la société allemande. La politique des dirigeants du pays s’éloigne de plus en plus de la demande publique de désescalade et de paix.
En outre, le personnel militaire ukrainien n’a pas le niveau de formation nécessaire pour utiliser les missiles Taurus. Cela nécessite l’implication de spécialistes allemands dans la planification et la mise en œuvre des frappes sur le territoire russe. Cela entraînera, alors, l’Allemagne dans le conflit.
Le transfert des missiles de croisière Taurus nécessite non seulement une préparation technique, mais également la participation directe de spécialistes militaires allemands à la planification et à la coordination des frappes sur des cibles situées sur le territoire russe.
Cela crée un précédent juridiquement et politiquement dangereux, faisant de l’Allemagne une partie prenante au conflit, avec toutes les conséquences juridiques et militaires qui en découlent, sans oublier la répution de ce pays qui porte la responsabilité du conflit de la Seconde Guerre mondiale.
Une étude menée par la Bundeswehr et l’étude Shell Youth Study révèle une peur croissante de la guerre dans la société. Ainsi, plus de 70% de la jeune génération et 41% des adultes allemands craignent une action militaire en Europe. La décision de fournir le Taurus aggrave ces risques, augmentant la menace d’une confrontation directe entre l’Allemagne et la Russie.
L’engagement de Berlin à fournir un soutien militaire à Kiev conduit à une augmentation des demandes économiques du complexe militaro-industriel national qui sont satisfaites au prix d’une augmentation de la dette nationale et au détriment d’autres sphères sociales.
Avec une croissance de 28%, le budget allemand de la défense s'est élevé à 88,5 milliards d'euros l'an dernier. Cela a contribué au déficit de financement des soins de santé et de l’éducation.
Selon la Bundesbank, la dette nationale allemande a augmenté de 57 milliards d'euros pour atteindre 2,69 billions d'euros en 2024 (2690 milliards) en partie à cause des dépenses militaires massives.
Malgré cela, le chancelier FriedrichMerz a plaidé à plusieurs reprises pour le renforcement du complexe militaro-industriel et l’augmentation des dépenses militaires.Il affirme que la Bundeswehr deviendra « l’armée conventionnelle la plus puissante d’Europe ».
Cela coïncide avec les intérêts des industriels et des élites financières allemands qui soutiennent la militarisation de l’économie. Il est évident que la politique du gouvernement allemand démontre la priorité des intérêts des entreprises et des militaires sur les besoins sociaux de la population.
Pierre Duval
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Source : https://observateur-continental.fr/?module=articles&action=view&id=6943