Mons, capitale européenne de la culture 2015, également zone de non-droit ?

par Jonatan G.
mercredi 9 avril 2014

Comment la capitale européenne de la culture 2015 peut-elle tomber à ce point dans la criminalité et l'insécurité ? Est-elle destinée à devenir une zone de non-droit ou trouvera-t-on les mesures nécessaires pour endiguer le phénomène ?

Grand-Place de Mons
Photo Jean-Pol Grandmont (licence CC-AT-SA)

Mons, ville de 97.000 habitants (250.000 si on compte l'agglomération), est également le chef-lieu de la province de Hainaut, dans le sud de la Belgique. Designée capitale européenne de la culture pour 2015, elle est le siège de la célèbre "Ducasse de Mons", ou "Doudou", événement reconnu par l'Unesco.

Mons, ville historique très attachée à ses origines. Ancienne ville fortifiée dont certains édifices sont méticuleusement entretenus (Collégiale Ste-Waudru, Beffroi,...). Mons, ville d'étudiants (environ 12.000 étudiants dans deux universités et plusieurs hautes écoles, dont un quart occupant des logements d'étudiants en ville). Ville de fête et de bonne humeur dotée d'une superbe grand-place, d'un port de plaisance et d'autres coins pittoresques à deux pas du centre-ville.

Voici la description que pourrait nous dresser l'office de tourisme. Voilà qui correspond à Mons il y a quelques années.

Pourtant, la réalité est toute autre. Depuis une dizaine d'années maintenant, force est de constater que Mons n'est plus que l'ombre d'elle-même. Deux problèmes de taille : l'économie locale en déclin, et l'insécurité en hausse vertigineuse.

Tout d'abord, afin de désengorger le centre-ville dont le plan historique rend la circulation automobile très problématique, les autorités ont décidé de développer un grand centre commercial "extra-muros", au nord de la gare. Difficilement accessible à pied, mais desservi par des navettes de bus gratuites. Et surtout proposant un vaste parking gratuit, alors que le stationnement en centre-ville est onéreux.

Le piétonnier et les autres rues commerçantes ont alors commencé à se vider : les grandes enseignes ont déménagé vers le centre commercial "Les Grands Prés", les petits commerçants subissant cette désertion. Au cours de ces dix dernières années, le piétonnier et les environs survivent tant bien que mal, voyant de nombreuses enseignes ouvrir et fermer tour à tour.

Mons, c'est également un nid à établissements Horeca : brasseries et tavernes sur la Grand-Place, cafés dans les rues avoisinantes, disco-bars à la place du Marché-aux-Herbes (place "festive" de la ville). Et ces établissements subissent de plein fouet les augmentations vertigineuses du prix de la bière. La "pils" qui coûtait entre 1 et 1,50 € il y a seulement quelques années dépasse maintenant allègrement les 2 € en de nombreux endroits. Boire un verre, activité très populaire chez nous, est devenu un luxe et n'est plus à la portée de toutes les bourses. En conséquence, les établissements ferment les uns après les autres. Ce fut encore le cas de deux établissements réputés la semaine passée.

La vie estudiantine dans le centre, bien que parfois bruyante, apportait de la vie à tout moment. Elle contribuait sans doute à la sécurité ambiante. Mais la ville a décidé de fermer les deux salles destinées aux soirées estudiantines : le Waux-Hall et l'Alhambra. L'IRAM et l'ISSHA, deux écoles supérieures parmi les plus importantes, ont émigré vers le campus FUCaM, loin hors du centre. Ce sera prochainement le cas de l'ISIC et du Sacré-Coeur également. De ce fait, la population estudiantine dans le centre de Mons a chuté de manière drastique.

Mais l'élément qui fait couler beaucoup d'encre depuis quelques semaines, c'est la monté en puissance de l'insécurité. Les médias belges citent principalement deux réglements de compte à l'arme à feu en pleine rue à quelques jours d'intervalle (le second ayant causé la mort d'un homme au pied de la Grand-Place). Mais on parle peu des très nombreuses agressions qui sont commises dès la tombée du soir. On parle peu aussi du vandalisme, en particulier envers les véhicules. Le trafic de drogue est également très présent dans cette ville culturelle, proche de la frontière française.

La police locale assure faire tout ce qui est nécessaire, les autorités communales ne semblent pas réagir outre mesure, mais la différence de climat en dix ans est saisissante. Au début des années 2000, les rues étaient remplies à toute heure d'étudiants, jeunes adultes ou même couples plus âgés qui se promenaient, partageaient un bon moment autour d'un repas ou d'un verre. Aujourd'hui, beaucoup d'entre eux se détournent des lieux et les rues sont devenues le terrain de jeu de dealers ou autres délinquants. Les bagarres sont de plus en plus fréquentes, et couteaux et armes à feu en sont des outils incontournables.

Face à cette dégradation permanente, les autorités semblent stoïques, voire impuissantes. Le phénomène est connu, mais les chiffres sont là : la criminalité est en hausse. Les habitants ne le cachent pas : ils ne se sentent plus autant en sécurité qu'à l'époque. Des villes comme Charleroi, jadis réputée le "Chicago belge", ont relevé le défi de devenir plus sures. Mons sera-t-elle capable de faire de même ? Sera-t-elle à la hauteur de son statut de capitale européenne de la culture, alors qu'elle freine des quatre fers la vie estudiantine tout en laissant s'installer une population fort indésirable en ses murs dès la nuit tombée ?


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